Portraits: Ils se sont engagés comme réservistes de l'armée
PORTRAIT•A l’occasion de la Journée nationale du réserviste, «20 Minutes» dresse le portrait de plusieurs réservistes…Anne-Laëtitia Béraud
A l’occasion de la Journée nationale de la réserve militaire, jeudi10 avril, 20 Minutes a demandé à plusieurs réservistes les raisons de ce choix professionnel particulier. Des réservistes devenus essentiels à une armée professionnelle, puisqu’on en compte 56.000, répartis dans la réserve opérationnelle et la réserve dite citoyenne. La réserve opérationnelle, composée de volontaires, est totalement intégrée aux armées. Elle augmente d'environ 20% les capacités opérationnelles des ces dernières. Quant à la réserve citoyenne, elle est constituée de bénévoles choisis pour leurs compétences.
Violaine-Patricia Galbert, 56 ans, conseillère conjugale et familiale, lieutenant-colonel de la réserve opérationnelle, conseillère auprès du chef d’état-major de l’armée de terre pour le soutien psychologique des familles de militaires.
Thérapeute de couple, Violaine-Patricia Galbert est, en 2004, une «victime rescapée» du tsunami en Thaïlande. «J’avais survécu. J’étais en tongs dans la montagne, tout était détruit. Ca vous fait réfléchir, vous fait poser les questions essentielles, comme le lien avec son pays», raconte-t-elle. Revenue à Paris, elle met en place l’Association des victimes et rescapés du tsunami (AVRT), et salue le travail «extraordinaire des hommes partis six mois là-bas, pour aider et rechercher les victimes».
Pour celle qui «n’a aucune culture militaire», le tournant s’effectue avec l’embuscade d’Uzbin d’août 2008 en Afghanistan, où dix soldats français sont tués et une autre vingtaine blessés par les talibans. «Après ce drame, j’ai voulu mettre mes compétences au service de l’armée», affirme-t-elle. Elle obtient sa carte militaire en juin 2010. Et depuis, passe son temps entre son travail de conseillère conjugale et familiale et la réserve opérationnelle. «J’exerce une profession libérale, mes enfants sont grands, ce qui est plus facile. Mes interventions sont programmées à l’avance. En 2013, j’ai effectué au total un mois de réserve, par période de deux-trois jours».
Un engagement qui épanouit Violaine-Patricia Galbert, «car l’institution se sert réellement de mes compétences». La professionnelle forme ainsi les cellules de crise qui se mettent en place lors des événements graves, et assure une mission de conseil sur les familles auprès du chef d’état-major de l’armée de terre. «Je vais dans les régiments qui vont partir en opération, et forme la cellule de crise à ce qu’est le deuil, la blessure grave.» Des accidents de vie auxquels la «base arrière» est peu formée. «J’apprends aussi aux militaires à se protéger dans leur relation d’aidants, à éviter le burn out.»
Le soutien aux familles est également essentiel. «Le retour du militaire dans sa famille est la période la plus difficile. La communication peut être faussée, les familles stressées, les militaires en souffrance. C’est d’autant plus dur que le sas de quelques jours concluant une opération extérieure a été suspendu en juillet 2013», raconte-t-elle. Des moments éprouvants où le travail d’aidant prend tout son sens.
Jean-François Wax, 45 ans, maître de conférences en physique à l’université de Lorraine (Metz), adjudant dans la 10e compagnie du 40e régiment de transmission à Thionville.
«De bons souvenirs des dix mois de mon service militaire». C’est avec cette pensée qu’en 2002, Jean-François Wax s’engage, parallèlement à son travail d’enseignant-chercheur, comme réserviste de l’armée. Il est aujourd’hui adjudant, adjoint au chef de section à la 10e compagnie du 40e régiment de transmission à Thionville. Dans sa section, le maître de conférences participe à l’encadrement et la formation de 27 personnels. «A l’université comme à l’armée, je retrouve cet aspect d’encadrement, que ce soit avec mes étudiants ou des militaires», glisse-t-il.
Ancien conseiller municipal, rôdé au milieu associatif, Jean-François Wax fonctionne à l’envie: «Nous les réservistes, nous venons à l’armée car nous le voulons vraiment. On s’arrange avec notre travail, quitte à faire des journées plus longues ou décaler les congés. Les militaires d’active sont parfois surpris par notre motivation». Au sein de sa compagnie, le travail de Jean-François Wax rime avec diversité. Outre la formation «au tir, au combat, au travail en équipe, mais aussi aux transmissions ou aux risques bactériologique et nucléaire», l’homme a participé à une mission Vigipirate à Marseille, et aide les sous-officiers qui veulent passer le concours d’officier, pour les épreuves de maths et de physique.
«La réserve, c’est du temps. Mais quand on aime, on ne compte pas». Et pour Jean-François Wax, servir le pays, c’est être, aussi, au service de la paix. «On ne se rend plus compte que cet état de paix est exceptionnel. La France est une exception dans le monde, et même dans l’Histoire. Je suis le premier de ma famille qui n’ai pas été mobilisé pour la guerre», conclut-il.
Aurore Chopin, 22 ans, en deuxième année d'école d'ingénieur à l'ESIREM (Dijon), sapeur de première classe au 19e régiment du Génie (Besançon), chef de trinome dans un groupe de combat.
Attirée depuis plusieurs années par l'armée, Aurore Chopin se lance dans la réserve après plusieurs préparations militaires. Pour la jeune femme, qui a un oncle militaire de carrière, la «réserve est un bon compromis, alliant vie civile et vie militaire». Affectée à la 5e compagnie du 19e régiment du Génie, Aurore Chopin a par deux fois effectué des missions Vigipirate, en juillet 2010 et juillet 2012 à Paris.
Entre études et l'armée. Mobilisée 4 à 5 jours tous les mois et demi, «ces périodes [à l'armée] sont quasi-toujours pendant les vacances scolaires ou les ponts. Du coup il n'y a pas de problème, je peux aller à l'armée sans avoir le stress de devoir rattraper tous les cours!». Une régularité qui lui permet, affirme-t-elle, «de se tenir à niveau.»
Cette expérience de la réserve militaire lui fait «découvrir des choses que l'on ne voit pas dans notre vie civile de tous les jours, comme le tir, le combat ou les transmissions». Il y a aussi l'enseignement de valeurs comme le dépassement de soi, l'apprentissage du travail en équipe, ou encore le respect de l'autorité et la cohésion. «Et cela me sert tous les jours: à l'école à aider les autres, en stage à savoir travailler en équipe et à respecter mes supérieurs.»