Micro-lycée: «Ici, j’ai repris goût à l’école»

Micro-lycée: «Ici, j’ai repris goût à l’école»

REPORTAGE – Alors que Vincent Peillon annoncera ce mercredi des mesures pour lutter contre le décrochage scolaire, «20 minutes» a visité un microlycée qui offre une deuxième chance aux déçus de l’école classique…
Delphine Bancaud

Delphine Bancaud

Des lycéens souriants papotent dans les couloirs avant d’entrer en cours. Difficile de croire qu’il y a quelque temps, plusieurs d’entre eux avaient tiré un trait sur l’école, faute de motivation, en raison de problèmes personnels ou parce qu’ils étaient victimes de harcèlement scolaire… Une période noire vite oubliée lorsqu’ils ont intégré le microlycée de Lieusaint (Seine-et-Marne).

Créée en 2000, la structure s’adresse à des décrocheurs qui souhaitent préparer leur bac et renouer avec le plaisir d'apprendre. Les élèves qui ont quitté l’école sans atteindre un niveau de seconde intègrent la classe Raly (retour au lycée), ceux qui ne sont pas encore prêts à se confronter au baccalauréat s’inscrivent en niveau «préparatoire» et les autres en terminale selon un modèle classique. Car ici, chacun va à son rythme. «Certains ont vraiment besoin de temps pour exercer à nouveau le métier d’élève. Mais une fois qu’ils sont bien installés dans l’établissement, la plupart d’entre eux progressent vite», confie Christiane Ressicaud, professeur de Français. C’est le cas de Brivael, 19 ans, en classe Raly: «J’ai décoché un mois avant de passer mon bac pro car j’étais écœuré du système scolaire classique. Mais ici, tout a changé. Je pense que je vais réussir mon bac et je veux devenir éducateur spécialisé ensuite». Même son de cloche chez Manon, 18 ans, en terminale: «Je pensais que j’avais horreur des études, mais ici j’ai repris goût à l’école. D’ailleurs mes notes sont correctes. Les profs m’ont vraiment remise sur de bons rails», explique-t-elle.

Une pédagogie individualisée

Pour parvenir à ce résultat, les enseignants jouent la carte de la proximité. Ici, le tutoiement est de rigueur entre profs et élèves et chaque jeune bénéficie d’un référent qui guide sa scolarité et reste à l’écoute de ses problèmes. La pédagogie est aussi très individualisée car les effectifs par classe sont peu élevés: «En classe Raly, nous sommes 16 élèves, ce qui permet aux profs de prendre du temps pour reprendre les bases et revenir sur nos difficultés», explique Julia, 19 ans. Les bureaux sont installés en U dans la classe, afin de favoriser l’interaction prof-élèves. «C’est vraiment moins barbant que les cours en lycée classique. J’ai retrouvé le plaisir de participer en classe», témoigne Océane, élève de terminale. Le programme fait la part belle à la philosophie et aux arts plastiques, disciplines qui favorisent le raccrochage scolaire.

Bien que le niveau scolaire des élèves soit assez disparate, l’équipe enseignante veille à ce qu’aucune raillerie n’entache les cours. «Nous apprenons aux élèves à ne pas se juger entre eux afin que chacun puisse regagner confiance en soi», explique François Valadier, professeur d’économie-gestion. Une réalité confirmée par Remi, 22 ans: «Ici on me donne les moyens d’être ce que je suis, alors qu’ailleurs, j’étais en guerre tout le temps». Exit aussi une discipline trop stricte, car l’on préfère miser sur le sens des responsabilités de chacun. «Lorsque je suis absente, on ne me sanctionne pas, on préfère me demander pourquoi», commente Axelle, 18 ans.

Une recette pédagogique qui fonctionne car en 2013, 89 % des élèves de terminale qui ont passé le bac l'ont obtenu. «Et lorsqu’ils poursuivent leurs études, ils obtiennent les mêmes résultats que les anciens lycéens du district», explique François Valadier. Le microlycée n’est pas pour autant une structure magique et certains élèves abandonnent en cours de route car ils ont une histoire compliquée ou qu’ils ne sont pas assez murs pour raccrocher», poursuit-il. Mais même dans ces cas-là, la porte du micro-lycée n’est pas définitivement fermée. «Certains reviennent lorsqu’ils sont motivés», souffle Christiane Ressicaud.