Comprendre le conflit entre Peillon et les profs de classes prépa en quatre questions
EDUCATION•Les enseignants et les étudiants des classes préparatoires sont appelés à une nouvelle journée de grève ce lundi, pour protester contre le projet de Vincent Peillon de réformer le temps de travail des profs de prépa…Delphine Bancaud
Ils sont rarement en première ligne dans les manifestations. Mais cette fois-ci, ils ne veulent pas désarmer. Les enseignants et les étudiants des classes préparatoires sont appelés à une nouvelle journée de grève ce lundi, par le Snalc, le Snes et six associations d'enseignants de classes prépa, pour protester contre le projet de Vincent Peillon de réformer le temps de travail des profs de prépas. Des manifestations auront également lieu dans plusieurs villes de France et la pétition en ligne contre le projet Peillon compte désormais 42.500 signatures. 20 minutes fait le point sur ce conflit.
Que contient le projet Peillon?
Dans le cadre des discussions sur le métier enseignant Vincent Peillon a proposé de baisser le nombre d’heures de cours pour les enseignants en ZEP (Zone d’éducation prioritaire). Pour financer cette mesure, le ministre de l’Éducation nationale envisage d’augmenter les obligations de service des professeurs des classes préparatoires. Car actuellement, ils ont un temps de service de dix heures de cours par semaine, déchargeables de deux heures, une heure pour les enseignants de deuxième année et une heure au moins pour ceux qui ont des classes de plus de 35 élèves. A titre de comparaison, un prof agrégé dans le secondaire a un temps de service de quinze heures.
Quelles seraient les conséquences pour les profs de prépa?
«Si notre temps de service est augmenté de deux heures, nous allons perdre entre 15 et 20% de notre salaire, car nous ferons moins d’heures supplémentaires», explique Philippe Heudron, président de l’association des Professeurs des classes préparatoires économiques et sociales. Selon la Cour des comptes, un professeur de prépa agrégé gagne en moyenne 4.108 euros nets par mois à quinze ans de carrière et 4.812 euros à 30 ans de carrière. «Nous ne sommes pas des privilégiés, insiste-t-il, car enseigner en classes prépa implique un travail harassant». Outre le temps passé à corriger des copies, les professeurs de classes prépas estiment que le temps de préparation des cours qui sont d’un très haut niveau d’exigence, est énorme: «Les programmes changeant chaque année, certains passent leurs vacances à rédiger des nouveaux cours», souligne Philippe Heudron..
Pourquoi ce projet suscite-t-il l’ire des étudiants?
Mardi dernier, des étudiants des lycées parisiens Fénelon, Lakanal, Louis-Le Grand, Saint Louis, Condorcet sont descendus dans la rue avec leurs enseignants, estimant que la qualité de l’enseignement en classe prépa pouvait être menacée par cette mesure. «C’est grâce au temps investi par les professeurs que nous pouvons avoir un enseignement de cette qualité. Rappelons qu’un paquet de copies d'une classe de prépa, c'est 45 heures de travail, et qu’une heure de cours de khâgne (avec des sujets changeant tous les ans) c'est 10 heures de préparation», expliquent ainsi dans un communiqué, les étudiants du lycée Fénelon à Paris.
Où en sont les discussions entre Peillon et les syndicats?
Mercredi dernier sur France Inter, Vincent Peillon a affirmé qu'il y avait des «situations très disparates qui vont de 1 à 3 - la Cour des comptes l'avait pointé - avec des gens qui travaillent 8 heures d'autres 16 heures et donc nous avons une discussion avec les classes préparatoires pour mettre de la transparence, de la justice et de l'équité». Le ministre de l’Education persiste donc à vouloir que tous les enseignants de classes prépa effectuent dix heures hebdomadaires de cours. En contrepartie, Vincent Peillon a suggéré lundi dernier le versement d'une indemnité de 3.000 euros par an pour ceux qui enseigneraient au moins quatre heures devant plus de 35 élèves. Il y a des professeurs «et surtout les plus jeunes et ceux qui sont à la fois en lycée et en classe préparatoire, qui vont gagner avec cette réforme», a souligné le ministre. «D'autres vont perdre dans des proportions qui sont de 3, 4 ou 5%», avait-il affirmé. Des annonces que le Snalc a jugées «significatives» mais «loin d'être suffisantes».