Deux gendarmes exposés à l’amiante pendant leurs enquêtes attaquent en justice

Deux gendarmes exposés à l’amiante pendant leurs enquêtes attaquent en justice

JUSTICE – Membres du groupe «Enquêtes techniques amiantes», les deux gendarmes ont respiré des poussières toxiques pendant des années…
Vincent Vanthighem

Vincent Vanthighem

C’est peut-être la preuve irréfutable que de nombreux ouvriers ont été victimes de l’amiante en France. Deux gendarmes, chargés d’enquêter sur les méfaits de ce matériau, viennent de lancer des procédures judiciaires car ils s’estiment, eux aussi, victimes des poussières toxiques, a appris 20 Minutes auprès de leur avocat, Michel Ledoux.

Membres pendant de longues années du groupe «Enquêtes techniques amiante» de l’Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (Oclaesp), les deux hommes ont mené des enquêtes dans les entreprises où l’amiante est soupçonnée d’avoir intoxiqué les salariés.

Demandes d’indemnisation

L’un des deux gendarmes souffre aujourd’hui de plaques pleurales, lésions de la plèvre consécutives à l’inhalation de poussières. Elles peuvent à tout moment se transformer en cancer. «Il est toujours en poste dans la gendarmerie et souhaite garder l’anonymat, confie Michel Ledoux, son avocat. Mais il fait une demande d’indemnisation auprès du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA).»

Le second, qui a pris sa retraite de la gendarmerie et travaille désormais dans le privé, a lancé, de son côté, une procédure devant le tribunal administratif de Melun (Seine-et-Marne) pour faire reconnaître son «préjudice d’anxiété». «Lui n’est pas malade mais il s‘attend à l’être bientôt», confie l’avocat. Car, avec l’amiante, les maladies peuvent se déclarer tardivement.

Sans masque dans les archives amiantées

«C’est un vrai paradoxe que l’on a laissé travailler des gendarmes sur l’amiante sans leur fournir ne serait-ce qu’un masque de protection», tempête Michel Ledoux. Dans leurs dépositions, les deux gendarmes pointent du doigt les investigations menées notamment dans les usines Eternit de Vernouillet (Yvelines) et de Thian (Nord).

«Les archives étaient amiantées, poursuit l’avocat. On le savait bien car elles ont subi un désamiantage par la suite. Malgré cela, les gendarmes ont du mettre leur nez dedans sans protection.»

D’après l’avocat, au moins deux autres fonctionnaires de l’Oclaesp auraient aujourd’hui développé des maladies consécutives à l’amiante. Interdite en 1997, cette substance cancérigène pourrait être responsable de 100.000 morts d’ici 2025. La semaine dernière, l’Association nationale de défense des victimes de l’amiante a d’ailleurs manifesté devant le pôle judiciaire Santé Publique de Paris pour réclamer un procès pénal.