Education: Pourquoi réformer les programmes du primaire?
EDUCATION – Vincent Peillon installera ce jeudi le Conseil supérieur des programmes (CSP) chargé de faire des propositions pour les refondre à la rentrée 2015…Delphine Bancaud
Des programmes scolaires trop lourds, injonctifs et pas suffisamment dans l’air du temps. C’est pour les toiletter que Vincent Peillon installera ce jeudi le Conseil supérieur des programmes (CSP), chargé de faire des propositions sur le sujet, pour une application à la rentrée 2015.
Dans un premier temps, le ministère compte s’attaquer aux programmes du primaire, mis en œuvre en 2008 par Xavier Darcos. «Ils avaient été décidés à la hussarde sans concertation», explique Christian Chevalier, secrétaire général du Se-Unsa. Pour éviter cet écueil, Vincent Peillon a lancé en septembre une consultation des professeurs des écoles sur le sujet, dont la synthèse sera remise au CSP.
Des programmes jugés trop denses
Les enseignants reprochent tout d’abord aux programmes actuels d’être «trop lourds et extrêmement chronophages, en particulier en français et en maths», explique Sébastien Sihr, secrétaire général du SNUipp-FSU. «On a chargé la barque, ajouté les langues vivantes, l'éducation à la santé, au développement durable... des éléments légitimes, mais sans rien enlever». Un avis partagé par Eric Charbonnier, expert éducation à l'OCDE: «Les enseignants s’efforcent d’aller jusqu’au bout de ces programmes très denses. Du coup, certaines notions sont abordées trop rapidement et des élèves décrochent en cours de route».
Plus grave encore: les programmes ne seraient pas très pédagogiques, selon les experts. «Ils sont injonctifs et ne laissent pas de liberté pédagogique aux enseignants. Ils privilégient une vision mécanique des apprentissages en favorisant le par cœur, au lieu de faire la part belle à la compréhension», s’enflamme Christian Chevalier. Pour Eric Charbonnier, «ces programmes ne sont pas assez axés sur les fondamentaux et ne permettent pas aux enseignants de vérifier régulièrement que leurs élèves ont acquis les connaissances étudiées. Du coup, ceux qui sont en difficulté peuvent difficilement rattraper leur retard». Une pédagogie à l’opposé de celle pratiquée au Québec, où des points du programme sont revus régulièrement pour s’assurer que les élèves ont des bases solides.
Laisser l’empreinte de Peillon
Quant au contenu des programmes, il ne semble pas être très en phase avec l’évolution de la société, comme le souligne Christian Chevalier: «Le citoyen de demain devra surtout être doté de grandes capacités d’adaptation. Il est donc nécessaire de fixer des objectifs en termes de compétences à acquérir plutôt que privilégier un empilement de connaissances».
La révision des programmes sera aussi l’occasion pour Vincent Peillon de laisser la marque de son action. Car c’est aussi un acte politique, comme le rappelle Christian Chevalier: «Les programmes Darcos témoignaient de la vision sarkozyste de l’éducation. Les prochains risquent plutôt de s’inscrire dans la ligne de ceux élaborés par Jack Lang en 2002». Réponse dans quelques mois.