Le rail français appelé à la transparence
SÉCURITÉ•e association de voyageurs réclame un open-data sur toutes les données concernant la sécurité du matériel et des infrastructures...Maud Pierron
Bientôt l’opération transparence pour le rail français? Plus de 10.000 personnes ont signé une pétition réclamant à la SNCF et à Réseau ferré de France (RFF) la transparence sur l’état du matériel et des infrastructures, lancée mi-juillet par l’Association des voyageurs usagers des chemins de fer (AVUC). «Brétigny-sur-Orge a été un déclencheur, témoigne le porte-parole de l’AVUC, Willy Colin. Ce drame s’inscrit dans le contexte d’un réseau à bout de souffle, d’une ligne malade, abandonnée comme d’autres au profit de la Ligne à grande vitesse (LGV) et de la rentabilité».
«La partie immergée de l’iceberg»
L’AVUC réclame la publication des données du système ferroviaire sur une plateforme accessible au grand public (data.gouv.fr) avec les dates d’entretien du matériel, des caténaires, des aiguillages, la liste des chantiers et des incidents. «En tant qu’usagers nous subissons chaque jour les aléas des incidents et perturbations du trafic, cela nous donne le droit de savoir, le droit de savoir l’état du matériel et des infrastructures sur lesquelles on roule. Il est temps que la SNCF et Réseau ferré de France (RFF) partagent ces données», s’indigne-t-il.
Dans les signataires, figurent des proches de victimes de Brétigny et même des cheminots, qui «disent avoir la "peur au ventre quand ils prennent leur machine"», assure le porte-parole de l’AVUC, témoignant ainsi de l’ampleur du problème. Dans le dossier de Brétigny, Guillaume Pépy a fait preuve de «transparence en engageant très vite la responsabilité de la SNCF mais nous craignons que ce soit une transparence de circonstance, sous les feux des projecteurs», craint celui qui se considère comme «un lanceur d’alerte». Car dans une brasserie de la gare Montparnasse, il fait la liste de plusieurs incidents «très très sérieux» qui lui ont été notamment remontés par des sources internes, qui se sont déroulés entre fin juin et août et sur lesquels la SNCF a très peu voire pas communiqué, sans forcément parler du déraillement du train de fret à Saintes mi-juillet. Pourtant, ils impliquent des ruptures d’essieux et des déraillements, sans blessés heureusement.
«Rassurer les usagers»
«Ce n’est que la partie immergée de l’iceberg, se désole Willy Colin. On attend un geste fort de la SNCF et RFF. Mais ils se comportent comme à l’époque le ministère de la Défense, la grande muette. La SNCF veut que ces questions restent entre les mains d’experts mais ce n’est plus possible, on a changé d’époque, maintenant c’est l’ère de la transparence.» Cette communication pourrait, d’après lui, «rassurer les usagers et rétablir le lien de confiance entre usagers et SNCF, qui est aujourd’hui altérée. La transparence doit être durable, pas de circonstance», martèle-il.
A la SNCF on ne nie pas ces incidents, on ne nie pas de ne pas avoir forcément communiqué précisément l’origine de la panne mais on note que chaque jour 15.000 trains circulent et 4 millions de voyageurs sont transportés. «On ne peut pas communiquer systématiquement en détail sur tout. Notre priorité, c’est la gestion de l’incident, la sécurité et d’informer les passagers sur l’impact sur le trafic. La transparence, c’est une autre problématique. Nous allons échanger avec l’UVAC et voir ce que nous mettrons en place», élude-t-on. A RFF, on assure que le site Internet de l’entreprise de service public qui gère un intérêt public publie «énormément de données déjà et notamment des données de sécurité ferroviaire». De fait, s’il n’y a pas de position officielle à la demande de l’Uvac, il y a un a priori «favorable à la diffusion de toutes les données».