Collision mortelle en Manche: prison ferme requise pour le commandant et le second
Le procureur de la république de Coutances, Renaud Gaudeul, ...© 2013 AFP
Le procureur de la république de Coutances, Renaud Gaudeul, a requis mercredi un an de prison ferme à l'encontre du commandant du ferry rapide impliqué dans une collision qui avait coûté la vie à un patron-pêcheur entre Saint-Malo et l'île anglo-normande de Jersey en 2011 et six mois ferme à l'encontre de son second.
«On a affaire à des officiers qui s'occupent de tout sauf de veille (de regarder le, ndlr) radar (...) alors que tout repose sur la veille radar», a dit le procureur lors du procès en correctionnel.
«On parle cinéma, de fumée de moteurs, de fiabilité d'analyses de stupéfiants sur le personnel navigant», a-t-il déploré.
Le commandant, de son côté, a estimé avoir eu une vitesse «adaptée» lors de l'accident.
«Vu le trafic, sur une mer libre, non c'était adapté», a-t-il dit, en réponse à une avocate des partes civiles qui lui demandait si naviguer à 70 km/h dans un épais brouillard n'était pas faire preuve de «légèreté».
Poursuivis notamment pour homicide et blessures involontaires, le commandant du «Condor Vitesse», âgé de 58 ans, et son second, 48 ans, tous deux de nationalité française, encourent chacun cinq ans de prison.
Il leur est reproché de ne pas avoir vu le caseyeur sur leur radar, de ne pas avoir diminué leur vitesse étant donné le brouillard, d'avoir coupé la corne de brume et désactivé un système anticollision.
«Je ne comprends pas», a dit l'officier lorsqu'on lui a demandé pourquoi il n'avait pas vu le caseyeur sur son radar.
Le 28 mars 2011, le «Condor Vitesse», navire à grande vitesse (NGV) de 86 mètres, est entré en collision avec «les Marquises», petit caseyeur de 9 mètres, basé à Granville (Manche), le coupant en deux et tuant son patron-pêcheur, âgé de 42 ans. Ses deux matelots s'en étaient sortis indemnes mais choqués.
L'enregistrement de l'écran radar et d'une partie des conversations -très partiellement audibles- sur la passerelle de commandement du NGV a été diffusé pendant une demi-heure lors de l'audience.
L'épouse du patron-pêcheur, qui était père de quatre enfants, a pleuré discrètement lorsque le choc a été entendu.
Elle était accompagnée de deux de ses filles et de son fils, adultes, ainsi que de l'armateur du bateau de pêche et des deux rescapés, âgés de 39 et 42 ans.
Le commandant, qui a assuré qu'il «pensait tous les jours à la victime», est apparu affecté, son second plus détendu et volubile. Leurs avocats ont annoncé à la presse qu'ils plaideraient la relaxe.
Dans son rapport, le Bureau enquête accident (BEA) avait relevé qu'en «timonerie, les conversations quasi continues et sans rapport avec la conduite du navire (entretenaient) une ambiance peu compatible avec la concentration nécessaire à la conduite d'un navire à grande vitesse dans le brouillard».