Des élus de gauche exigent le retour en France d'un jeune Pakistanais expulsé
IMMIGRATION•Près de 80 élus socialistes, communistes et écologistes signent un appel et dénoncent la politique d'immigration de Manuel Valls...William Molinié
C’est un «cas emblématique», estiment ces 77 élus locaux, députés ou sénateurs de gauche, qui publient ce mercredi une lettre ouverte au ministre de l’Intérieur, Manuel Valls. Ils lui demandent ainsi de délivrer un Visa longue durée à un jeune Pakistanais de 23 ans, expulsé vers son pays d’origine le 1er janvier 2013. Le parcours d’Ahmed Sohail, jeune majeur, arrivé seul en 2004 en France à l’âge de 15 ans, est un «modèle d’intégration», selon les associations qui l’ont suivi.
Emprisonné et battu au Pakistan
Pris en charge par l’aide sociale à l’enfance (ASE) en 2006, il décroche en 2009 un CAP de plomberie puis une promesse d’embauche. Protégé durant sa scolarité par un titre de séjour étudiant, Ahmed dépose son dossier à la préfecture de Seine-Saint-Denis, accompagné de sa promesse d’embauche, pour obtenir une carte de séjour. Pendant un an, il restera sans réponse, jusqu’à ce que son potentiel futur employeur perde patience et prenne un autre employé.
Arrêté en novembre 2012 dans le métro, il est placé au centre de rétention administrative (CRA) de Vincennes pendant 40 jours. La nuit du nouvel an, la décision est prise «au plus haut sommet du ministère de l’Intérieur» d’expulser Ahmed, selon le Réseau éducation sans frontières (RESF). Ahmed est raccompagné, menotté dans l’avion, au Pakistan où il sera alors emprisonné et battu à plusieurs reprises.
>> Lire l’interview d’Ahmed Sohail…
Au-delà de cet exemple particulier, le coup de gueule des élus signataires s’adresse à la politique d’immigration de Manuel Valls. «Ce qui était inexplicable et intolérable sous Sarkozy, le reste sous Hollande. Les pratiques sont aujourd’hui les mêmes qu’à l’époque de Guéant», regrette Jacques Daguenet, adjoint divers gauche au maire du 11e.
«Ce cas est exemplaire d’une politique d’immigration inhumaine, cruelle et répressive qui perdure, malgré ce nouveau gouvernement. Ça doit changer», alarme Ian Brossat, président du groupe communiste et parti de gauche au Conseil de Paris.
Difficultés à mobiliser
«Il faut faire revenir Ahmed. Non pas comme un passe-droit, mais comme le symbole d’une évolution de la politique d’immigration et des consciences», estime Richard Moyon, porte-parole de RESF. Il reconnaît que depuis un an et l’arrivée des socialistes au pouvoir, «la mobilisation est plus difficile qu’elle ne l’était avant sous Sarkozy».
«La politique de l’immigration n’est plus la première préoccupation ni une question majeure pour l’opinion publique», regrette-t-il. «Le risque est qu’à son retour au pouvoir, la droite exerce une politique encore plus inhumaine», complète Jacques Daguenet.
De son côté, le ministère de l’Intérieur a promis de recevoir une délégation d’élus et d’associations mercredi 29 mai.