Procès de l'amiante: «Le problème, c'est que le temps nous est compté...»
INTERVIEW – Président de l’Association nationale des victimes de l’amiante (Andeva), Pierre Pluta déplore les difficultés rencontrées pour obtenir un procès pénal…Propos recueillis par Vincent Vantighem
Il ne perd pas espoir. Malgré l'annulation d'une partie des mises en examen et les ennuis de la juge d'instruction, Pierre Pluta, président de l'Assocation nationale des victimes de l'amiante croit encore qu'un procès pénale de l'amiante pourrait avoir lieu en 2014. Il explique pourquoi à 20 Minutes.
Contrainte à une mutation, la juge Bertella-Geffroy a demandé une dérogation. Pourquoi est-ce si important qu’elle reste à son poste?
Si elle doit partir, cela fera encore du temps de perdu pour les victimes. Rendez-vous compte, les premières plaintes ont été déposées en 1996. Cela fait dix-sept ans que nous espérons un procès pénal du scandale de l’amiante. Et on vient nous dire que les choses vont encore durer. Le problème, c’est que le temps nous est compté…
Au-delà du maintien de la juge à son poste, que demandez-vous?
Nous réclamons de vrais moyens. Il faudrait que la juge Bertella soit accompagnée d’un pool de magistrats compétents pour enquêter sur les responsables dans les entreprises et les administrations qui ont permis l’utilisation de l’amiante. Avec cela, nous pouvons espérer une fin de l’instruction dès cette année en 2013. Et pourquoi pas un procès dès 2014…
Après l’annulation de plusieurs mises en examen, la mutation possible de la juge, il y a pourtant peu de signes qui permettent de croire à un procès en 2014…
Mais il n’y a jamais eu de volonté politique en France au sujet de l’amiante. Je me souviens de la première rencontre avec Rachida Dati quand elle était ministre de la Justice. Dès notre arrivée, son directeur de cabinet m’a dit: «Vous les victimes obtenez des indemnisations, qu’est ce que vous voulez de plus?» Cela démontre bien le peu de respect que les politiques ont pour les victimes de l’amiante.
Vous avez récemment rencontré Christiane Taubira. Vous a-t-elle tenu le même discours?
Non, Christiane Taubira s’est engagée personnellement pour que ce dossier aboutisse. On verra bien.
La juge Bertella-Geffroy estime que ces ennuis sont liés à la mise en examen de Martine Aubry qu’elle a prononcée. Qu’en pensez-vous?
Tout ne tourne pas autour de Martine Aubry dans ce dossier. Il y a beaucoup de responsables et surtout beaucoup de victimes, de personnes qui sont déjà mortes. Martine Aubry comme d’autres n’a peut-être pas de responsabilité individuelle dans ce drame. Mais c’est tout le pouvoir politique et économique auquel elle appartenait qui en a une.
Avec les victimes, avez-vous prévu des actions pour obtenir ce procès?
Je me souviens que les Veuves des dockers amiantés de Dunkerque ont manifesté pendant plus d’un an toutes les semaines autour du palais de justice de la ville pour être entendues. S’il faut encore faire quelque chose, nous le ferons.