Les Vieilles Charrues «pas du show-business», selon Christian Troadec
FESTIVAL•Le plus grand festival de France a démarré avec 500 personnes sur une place de village…Propos recueillis par Camille Allain
Il y a 25 ans, une quinzaine de copains organisaient dans la petite commune de Landeleau (Finistère) une soirée-concerts, qui avait rassemblé 500 personnes. Un quart de siècle plus tard, l’événement a déménagé dans la ville voisine de Carhaix et est devenu le plus gros festival de France. A l’occasion de leurs 25 ans, les Vieilles Charrues s’apprêtent à accueillir 270.000 personnes en quatre jours. Le succès ne se tarit pas. Christian Troadec, l’un des fondateurs de l’événement, devenu maire de la commune et leader des Bonnets Rouges, nous livre ses souvenirs.
Vous faisiez partie de l’équipe fondatrice du festival. Comment est née l’idée des Vieilles Charrues ?
Certains ont parlé d’une kermesse, mais ce n’était pas trop ça. Notre idée au départ, c’était d’animer le territoire, de créer un événement qui donne envie aux gens de rester, surtout à la jeune population de 20/25 ans qui quittait la région.
Le nom de Vieilles Charrues, c’était un petit pied de nez à Brest, non ?
Oui, on voulait taquiner le rassemblement de vieux gréements qui avaient lieu la même année à Brest (Brest 92, qui existe toujours aujourd’hui et aura lieu au même moment). C’était un hommage au milieu rural. Aujourd’hui, le festival a gardé ces valeurs.
Vous étiez sans doute loin d’imaginer un tel succès ?
Oui, c’est évident. La première année, nous étions 500 mais l’accès se faisait uniquement sur invitation, auprès des copains. Nous l’avons ouvert au public l’année suivante et 3.000 personnes sont venues. Ensuite, le festival a grandi en marchant, sans se précipiter. Nous nous sommes toujours battus pour que ça ne devienne pas un événement de show-business.
C’est ce qui fait le succès du festival ?
Je pense qu’au départ, nous avons profité de la disparition de certains événements comme Elixir, qui organisait des concerts dans les années 80, ou Tamaris, qui se tenait à Morlaix. Ces festivals s’étaient éteints et il y avait une attente du public breton. Nous avions aussi la particularité d’être moins marqués musicalement. Nous n’étions pas que rock ou que chanson. Nous avons toujours programmé tous les styles.
En 25 ans, les plus grands groupes du monde se sont produits aux Vieilles Charrues. Personnellement, qui auriez-vous aimé voir ?
Il y a un grand artiste qui aurait mérité de jouer c’est Rory Gallagher, mais il est décédé trop tôt (en 1995). Je pense qu’il nous manque aussi quelques grands groupes de rock, comme U2 par exemple. Peut-être qu’il faudrait qu’on le fasse sur une soirée dédiée, quelques jours avant le festival par exemple.
Vous êtes aujourd’hui maire de la commune. Quelle importance ont les Vieilles Charrues pour le territoire ?
C’est d’abord un impact médiatique extraordinaire. On en parle dans tous les journaux, à la télévision… C’est colossal pour l’image d’une région, pour son attractivité. Les commerçants du coin en profitent d’un point de vue économique. Il y a aussi un impact social car le festival fédère de très nombreux bénévoles et acteurs du coin.
Et pour la population ?
Je pense que les Vieilles Charrues ont redonné une fierté aux habitants du territoire. A l’époque, on souffrait de difficultés économiques. Les usines fermaient, les jeunes partaient. Le festival a redonné aux gens l’envie de rester et d’aller de l’avant. Je pense que d’un point de vue économique, cela joue aussi pour notre attractivité, car nous prouvons que nous pouvons nous mobiliser. Cela donne une bonne image aux acteurs économiques. Je pense que ça a pu jouer dans l’installation de l’usine de lait chinoise, par exemple.