Crise des éleveurs: «La trésorerie est dans le rouge»
AGRICULTURE•Des actions sont menées depuis des mois par les agriculteurs…Camille Allain
Voilà plusieurs mois que les éleveurs se mobilisent pour faire entendre leur colère, notamment en Bretagne. Lundi, c’est le Mont Saint-Michel et les abords de Caen qui ont été bloqués. A bout, les agriculteurs réclament l’application de meilleurs prix pour pouvoir vivre de leur activité. Installé à Bazouges-la-Pérouse (Ille-et-Vilaine) depuis 2008, Sébastien Fesnoux subit ces baisses consécutives. Il a accepté de raconter à 20 Minutes ses galères.
Fils d’éleveurs, il a repris une ferme à quelques kilomètres de celle de ses parents en 2008. Tous les trois se sont installés en GAEC, pour mutualiser la production. « Nous produisons 650.000 litres de lait par an sur 112 hectares avec 65 vaches. Nous avons aussi 700 places de porcherie pour faire de l’engraissement », explique-t-il.
«Aujourd'hui, on n'a plus rien»
Des crises du lait, Sébastien en a déjà connues. Mais celle-ci fait mal. « La trésorerie est dans le rouge. Aujourd’hui, j’arrive encore à me verser un salaire mais on doit prendre sur les comptes. Ils sont tous négatifs. Avant quand on avait un peu d’argent, on le mettait de côté, pour assurer en cas de pépin. Aujourd’hui, on n’a plus rien », raconte-t-il. Pour gagner 1.200 euros par mois, l’éleveur de vaches commence chaque jour à 7h30 pour finir à 19h. « Ce métier, j’ai voulu le faire et personne ne m’y a obligé. C’est une passion. Mais aujourd’hui, j’arrive parfois le matin en me disant que ça fait ch… de bosser pour perdre de l’argent ».
Ses parents, eux, sont installés depuis 40 ans. Aujourd’hui Sébastien les décrit comme « blasés». « Ils vendaient leur lait au même prix il y a 25 ans. La différence, c’est qu’aujourd’hui, les charges sont beaucoup plus élevées. Leur niveau de vie a baissé. » De son côté, le jeune éleveur s’est endetté pour se lancer et il lui serait impossible d’arrêter son activité. « Il y aura du travail pour les futures générations, mais à quel prix », s’interroge-t-il, lui qui a œuvré pour l’installation des jeunes générations lors de son mandat aux Jeunes Agriculteurs de Bretagne.
«J'ai peur que ça dérape»
Surtout, Sébastien s’inquiète de voir le conflit déraper. « Les actions qui sont menées aujourd’hui (en Normandie), je les comprends. Moi-même j’ai été à Rennes pour protester. Les chiffres donnés par Le Foll, ça fait des années qu’on les avance, mais personne ne nous écoute. J’ai peur que ça dérape. Il y a des éleveurs qui ont déjà tout perdu. Ils n’ont plus rien à espérer et on ne sait pas ce qu’ils pourraient faire sous le coup de la colère », avance-t-il.