Charles Biétry: «Rennes prend un gros risque en sacrifiant le centre de formation»
FOOTBALL•L'ancien patron des sports de Canal +, Rennais de cœur, fustige une nouvelle fois la direction du club breton...Jérémy Goujon
Il a célébré les 30 ans de Canal+ en déjeunant en tête-à-tête avec André Rousselet, mardi. Passées les festivités de la chaîne cryptée, Charles Biétry (71 ans depuis ce mercredi) s'est penché sur la situation du Stade Rennais et du FC Lorient, adversaires en Ligue 1 vendredi soir (20 h 30).
Rennes et Lorient sont-ils les clubs les plus chers à votre cœur?
Absolument, avec Carnac (sourire). Il y a une équipe où je suis né, où j’ai vécu, où j’ai joué, où mon père a été dirigeant. C’est Rennes, depuis toujours. Et puis Lorient, parce que je leur ai donné un coup de main pendant une année [membre du conseil d’administration en 2005], parce que j’habite dans le Morbihan, et parce que j’y ai beaucoup de copains, notamment le nouvel entraîneur.
Justement, ça doit vous faire mal de voir Sylvain Ripoll et son équipe relégables en Ligue 1…
Ce n’est malheureusement pas une surprise, car les cinq meilleurs joueurs sont partis. On oublie Bourillon, mais en tout, il y en a cinq [avec Ecuele Manga, Monnet-Paquet, Aliadière et Aboubakar]. Personne ne ferait mieux que Sylvain, même pas son prédécesseur.
Le départ d’un entraîneur aussi influent que Christian Gourcuff rendait prévisible la situation actuelle, non?
Il a effectivement une excellente réputation, qui est méritée. Mais on oublie qu’il a beaucoup entraîné en 2e division, et qu'il a raté des montées. Il n’a pas eu tout le temps des résultats extraordinaires. Et le seul titre de Lorient a été gagné par Yvon Pouliquen [coupe de France 2002]. Gourcuff est un superbe entraîneur, mais il y en a d’autres, et Ripoll est tout à fait capable d’avoir, lui aussi, de très bons résultats.
Que vous inspire par ailleurs le début de saison du Stade Rennais?
C’est difficile de mettre en place, d’un coup de baguette magique, un effectif où il y a douze nouveaux joueurs. Ça me surprend qu’il y en ait autant, alors qu’il y a un centre de formation fabuleux. Je crains qu’on fasse ainsi peur aux jeunes…
Cela corrobore la petite pique de Michel Der Zakarian avant le derby Nantes-Rennes, qui fustigeait le changement de stratégie de Philippe Montanier…
Ce n’est pas Montanier qui l’a changée, c’est le président. Il veut effacer toute trace du passage de Pierre Dréossi, et il prend un gros risque en sacrifiant le centre de formation. Il faudrait voir les finances du club. Les douze nouveaux joueurs, il a bien fallu les payer. Et Kana-Biyik et Makoun le sont toujours pour ne pas jouer...
Vous n’entretenez pas les meilleures relations du monde avec René Ruello. Au point d’être aujourd’hui persona non grata au Stade Rennais?
Sûrement pas au niveau des coachs et des joueurs, car j’ai toujours des relations avec eux. Quand Ruello a acheté sa charge (sic), j’ai prévenu le jour même que je ne travaillerai plus à la cellule recrutement. Je n’ai pas attendu qu’il le dise. Je le connais depuis très longtemps. J’ai eu affaire à lui quand j’étais patron des sports de Canal +, et qu’il a voulu se mêler des affaires de la télévision. C’est vrai que je n’ai pas de sympathie pour lui. Après, Rennes, c’est chez moi quand même, il ne pourra jamais l’enlever. Ma première licence au Stade Rennais, je l’ai signée en 1950…
Vous pouvez donc toujours assister aux matchs route de Lorient?
Je ne pense pas qu’il puisse m’interdire l’entrée du stade.
Vous maintenez que tout est fait à Rennes pour le retour de Christian Gourcuff sur le banc?
Je maintiens totalement que c’est l’idée première de René Ruello quand il reprend le club. Il le dit en privé: c’est de travailler de nouveau avec Gourcuff [coach du SRFC en 2001-2002]. J’espère bien qu’il ne réussira pas. Ça voudra dire que Philippe Montanier a eu de très bons résultats, et je serai ainsi très content de voir Rennes en haut de l’affiche.