L'essentiel

  • Laurent Wauquiez a été élu président du parti Les Républicains le 10 décembre.
  • Les représentants d'une ligne dite modérée oeuvrent à promouvoir leurs idées face au nouveau patron du mouvement, jugé trop droitier.
  • Xavier Bertrand, Valérie Pécresse, Christian Estrosi construisent des stratégies individuelles et différentes, via leurs mouvements. Mais pour quel résultat?

Edit 9h15: Christian Estrosi transforme son mouvement «La France audacieuse» en parti politique ce mercredi soir à Nice, selon franceinfo

Valérie Pécresse, Xavier Bertrand, Christian Estrosi, une partie des juppéistes… Défiant le nouveau président du parti Les Républicains Laurent Wauquiez, plusieurs élus LR poursuivent des stratégies différentes pour faire vivre une ligne de droite modérée. Attentisme, départ ou maintien dans le mouvement de droite, ces derniers forment une opposition éparpillée façon puzzle. Panorama de cette fronde qui se construit…

Christian Estrosi, maire LR de Nice, lors de la première pierre du projet Diamant, le 16 novembre 2017 à Nice.
Christian Estrosi, maire LR de Nice, lors de la première pierre du projet Diamant, le 16 novembre 2017 à Nice. - LIONEL URMAN/SIPA
  • Christian Estrosi, maire de Nice

Discret depuis l’élection de Laurent Wauquiez à la tête des Républicains, le 10 décembre, Christian Estrosi va faire entendre sa petite musique mercredi soir à Nice. Le maire organise une réunion de son mouvement « la France audacieuse ». Comme l’annonce 20 Minutes, on y parlera du pouvoir des maires avec Arnaud Robinet et Jean-Luc Moudenc, premiers édiles de Reims et de Toulouse qui ont pris leurs distances avec Laurent Wauquiez. La réunion s’annonce par ailleurs anti-Eric Ciotti, fidèle de Laurent Wauquiez… et ennemi de Christian Estrosi. Un pied dedans, et désormais plus qu'un orteil dehors, puisque le maire annoncerait la transformation de son mouvement en parti politique, révèle franceinfo ce mercredi.

  • Alain Juppé, maire de Bordeaux

Alors que sa première adjointe Virginie Calmels vient d’être nommée première vice-présidente du parti, Alain Juppé est attentiste. « Nous sommes dans une phase de décantation. Il est probable que le rendez-vous européen de 2019 » verra la fin de cette opération, a estimé Alain Juppé en marge d’un conseil municipal lundi.

En attendant, l’ancien candidat à la primaire à droite affirme n’avoir aucune intention de plonger dans le chamboule-tout politique. Un silence qu’analyse ainsi Bruno Cautrès, chercheur CNRS au Centre de recherches politiques de Sciences Po Paris (CEVIPOF) : « Alain Juppé est à la fin de sa vie politique et me semble au carrefour de contradictions personnelles importantes… car Emmanuel Macron est en train de réaliser plusieurs de ses projets. Mais la question européenne divise à droite, d’où son attentisme ». Une position tenable quelques mois tout au plus, les élections européennes étant programmées en mai 2019…

Valérie Pécresse, la présidente (LR) de la région Ile-de-France.
Valérie Pécresse, la présidente (LR) de la région Ile-de-France.  - UGO AMEZ/SIPA
  • Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France

Un attentisme repoussé par la présidente de la région Ile-de-France Valérie Pécresse. Celle qui vient de refuser le poste de présidente du Conseil national de LR proposé par Laurent Wauquiez a répété au JDD le 17 décembre qu’elle restait au sein du parti. Mais qu’il fallait compter avec elle et son mouvement « Libres ! » qu’elle souhaite « associé » à LR : « Le débat sur notre ligne politique n’a pas eu lieu lors de la campagne interne. Nous devons le mener. Ma ligne n’est pas la sienne [de Laurent Wauquiez] », précise-t-elle, appelant encore les plus modérés à rester : « Restez avec nous dans "Libres !" ».

Valérie Pécresse, future frondeuse de droite ? La présidente de la région la plus puissante du pays tisse depuis plusieurs mois sa toile d’élus. Mais alors que l’élection de Laurent Wauquiez vient de se dérouler, le temps n’est pas à la discorde, analyse Bruno Cautrès. « Le choix de la fidélité à la famille politique, que met en avant Valérie Pécresse en restant au sein de LR, est une présentation valorisable auprès des adhérents », précise le chercheur. Le temps que la situation s’apaise au sein du parti. Avant de passer à l’attaque ?

Xavier Bertrand, président (LR) de la région Hauts-de-France.
Xavier Bertrand, président (LR) de la région Hauts-de-France. - S. Alcalay / SIPA
  • Xavier Bertrand, président de la région Hauts-de-France

La stratégie poursuivie par Xavier Bertrand reste unique. Au lendemain de l’élection de Laurent Wauquiez, le président de la région Hauts-de-Fance a annoncé qu’il quittait le parti. Avec son think tank « La Manufacture », dont plusieurs réunions sont prévues en Ile-de-France début 2018, Xavier Bertrand souhaite se placer dans le monde des idées tout en faisant de sa région un laboratoire de bonnes pratiques, notamment sur l’emploi et la nouvelle économie.

Ce pari semble cependant hasardeux, estime Bruno Cautrès : « Xavier Bertrand a voulu prendre date en quittant LR. Or, il est très compliqué d’exister hors de l’appareil pour un homme politique. Il faut être un très grand élu local, et là encore c’est un pari risqué d’arriver à se créer un destin national. » D’autant que son avenir est lié à une éventuelle réelection à la tête de sa région. Si ce n’est pas le cas, « il disparaît du tableau », tranche le chercheur. « Xavier Bertrand a été élu au terme d’une coalition très particulière pour contrer le FN lors des régionales de 2015. Peut-être est-il tenté de neutraliser un éventuel candidat d’En Marche pour les régionales de 2021 ? D’où un positionnement suffisamment macron-compatible afin qu’En Marche, qui est dans une démarche de conquête territoriale, ne lui oppose un candidat », suggère Bruno Cautrès.

  • Opposition façon puzzle

Une union entre ces ténors serait-elle enfin possible pour contrer Laurent Wauquiez ? Jusqu’à maintenant, aucun pas n’est fait en ce sens. Et le chercheur en doute au vu de « la balkanisation de cette droite opposée à Laurent Wauquiez ». « Il n’y a pas de leader incontesté, mais des trajectoires personnelles dans la perspective de la présidentielle de 2022 », souligne Bruno Cautrès. Or, avant 2022, l’ambition de ces élus locaux pourrait être brisée par des chocs électoraux bien plus proches, les municipales et les régionales étant fixées respectivement en 2020 et 2021.