Intervention de Macron : Grand spectacle, coût, critiques... 5 choses à savoir sur le Parlement réuni en Congrès lundi
DISCOURS•Le président Emmanuel Macron a convoqué les députés et les sénateurs lundi à Versailles, à la veille du discours de politique générale de son Premier ministre..A.-L.B.
L'essentiel
- Le président Emmanuel Macron s'exprime lundi devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles
- Cette réunion extraordinaire et sans débat contradictoire, doit fixer la feuille de route du président
- Celle-ci suscite de nombreuses critiques sur le style du président ou sur son coût
Emmanuel Macron devant le Parlement réuni en Congrès, qu’est-ce que cela veut dire ? Lundi à 15h, le président de la République convoque à Versailles les parlementaires de l’Assemblée nationale et du Sénat et va s’exprimer devant eux. Cette prise de parole intervient à la veille de la déclaration de politique générale d’Edouard Philippe à l’Assemblée. Pourquoi ce Parlement réuni en Congrès est-il un événement rare ? Que va-t-il se passer et pourquoi certains élus annoncent boycotter l’événement ? 20 Minutes revient sur les cinq choses à savoir sur cette intervention rare…
Une réunion exceptionnelle
Ce sera la troisième fois qu’un chef de l’Etat s’exprime devant le Congrès depuis la révision constitutionnelle de 2008, après les interventions de Nicolas Sarkozy et de François Hollande. La Constitution prévoit trois cas de réunion du Congrès, comme le rappelle le site de l’Assemblée nationale. Le Congrès du Parlement peut être réuni en vue d’une révision de la Constitution. Il peut être réuni pour entendre une déclaration du président de la République, déclaration qui peut être suivie d’un débat, hors de sa présence, et qui ne peut donner lieu à un vote ; le Congrès peut également être réuni pour autoriser l’adhésion d’un État à l’Union européenne.
Une intervention sans éventuelle contradiction
Cette déclaration du président devant les parlementaires a pour but de fixer la feuille de route de son quinquennat et de parler aux Français via leurs représentants. Une intervention - sans débat contradictoire - qui se substitue aux interviews traditionnelles des médias, et notamment celle télévisée du 14-Juillet. Du côté de l’Elysée, on a répondu au Monde qu’« il n’y a pas de refus d’obstacle avec la presse », mais que la « pensée complexe » du président n’allait pas avec le jeu des questions-réponses avec des journalistes. Un argument qui a fait bondir sur les réseaux.
Un style à l’américaine
Du côté de l’Elysée, le porte-parole du gouvernement, Christophe Castaner, a rappelé que « le président de la République a pris un engagement devant les Français de réunir le Congrès une fois par an pour balayer un certain nombre de sujets ». Il s’inscrirait alors dans la tradition américaine du discours sur l’état de l’Union, avec des présidents qui font un point annuel sur les grands dossiers, pour fixer le cap. Un discours politique aux airs de show millimétré diffusé en prime time devant des millions de foyers américains…
Une intervention perçue comme humiliante pour le Premier ministre
Antre angle des critiques : l’agenda du président de la République pour s’exprimer. Cette intervention se tient à la veille du discours de politique générale du Premier ministre Edouard Philippe. Ce discours est l’un des plus importants du locataire de Matignon, fixant les priorités du gouvernement et la philosophie de son action.
Pour certains, l’intervention d’Emmanuel Macron représente une humiliation de son Premier ministre issu de la droite. Pour Eric Ciotti (LR), « il n’y a plus de Premier ministre », « totalement relégué dans un rôle subalterne ». « Le rôle du Premier ministre a été de désintégrer, de désagréger la droite. C’est tout. C’est sa seule fonction. Pour le reste, il ne sert à rien », a-t-il dit sur BFMTV/RMC.
Le président du groupe socialiste Olivier Faure évoque aussi une « humiliation » du Premier ministre dont le rôle, de « collaborateur » sous Nicolas Sarkozy, deviendrait celui d’un « simple répétiteur » avec Emmanuel Macron.
Une intervention vécue comme un signe d’hyperprésidence de Macron
L’hyper-communication du président est aussi critiquée. Le député LR Guillaume Larrivé a évoqué une « faute politique » sur RFI : « nous ne sommes pas dans un régime impérial où il s’agirait d’aller applaudir le nouveau prince qui s’exprimerait devant nous en toute irresponsabilité », s’est-il insurgé. « Dans aucune démocratie au monde, aucune, un seul homme n’a autant de pouvoirs concentrés entre ses mains », a dénoncé sur LCI le député PS du Val-de-Marne Luc Carvounas.
« Nous irons donc au château écouter le grand Prince jupitérien. Toute une conception du renouvellement ! », ironise le député Adrien Quattennes (France insoumise). La députée européenne LR Nadine Morano, accuse, elle, le chef de l’Etat d’être « en marche vers la dictature ».
Un coût dénoncé et la perspective d’un boycott par certains
Selon Paris-Match mercredi, cette réunion va coûter entre 200.000 et 600.000 euros. L’hebdo rappelle que le Congrès en 2015 avait coûté environ 400.000 euros en 2009, et 200.000 euros en 2015. Le coût jugé aujourd’hui trop cher. Le député LR Damien Abad s’est agacé d’un « pied de nez à 500.000 euros fait au Premier ministre ».
Le président de l’UDI Jean-Christophe Lagarde, membre du groupe parlementaire Macron-compatible, les « Constructifs », a annoncé mercredi sur Twitter qu’il n’irait pas à Versailles. Sa raison : « C’est inutile et ça coûte cher. Ça rabaisse le gouvernement. Le président de la République n’a pas besoin de nous pour sa com' », a-t-il écrit. Même son de cloche du député UDI Philippe Vigier.
Tout comme le député PS de la Loire Régis Juanico, qui estime que son boycott est une désapprobation contre « une marque d’irrespect » de la part d’Emmanuel Macron.
Le sénateur de Paris et secrétaire national du Parti communiste français Pierre Laurent a lui aussi évoqué un éventuel boycott des députés et sénateurs communistes lundi.
Jeudi après-midi, Jean-Luc Mélenchon, président des députés de la France insoumise, a annoncé que les députés de son groupe n’iront pas au Congrès. Lors d’un point presse, le député a déclaré : « La violence que nous avons subie ne peut pas rester sans réplique, nous la retournons contre ceux qui nous la font subir (…) nous nous rebellons et nous n’irons pas [à Versailles] ».