SOCIALISME« François Hollande a créé les conditions du divorce avec le PS»

«François Hollande a complètement marginalisé le PS dans sa façon de gouverner»

SOCIALISMERetour en cinq dates-clés sur la déliquescence du PS qui avait porté François Hollande au pouvoir...
Dorian Debals

Dorian Debals

Le premier déplacement post-Elysée de l’ex-président dimanche aura été le siège du Parti Socialiste rue de Solférino, accueili hier par une banderole « Merci ».

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Mais « merci » pour quoi ? Car François Hollande quitte l’Élysée à un moment où le Parti Socialiste traverse une crise sans précédent, menaçant de disparaître définitivement. Politique de l’offre, déchéance de nationalité ou loi travail : il aura malmené sa majorité du début à la fin de son quinquennat. Pourtant, au début de son mandat, le parti du congrès d’Epinay tenait quasiment tous les pouvoirs entre ses mains. Décryptage avec Frédéric Sawicki, professeur de sciences politiques à l’Université Paris I et spécialiste du PS.

13 novembre 2012, l’enterrement du disours du Bourget

Lors de sa première conférence de presse à l’Elysée, François Hollande plaide pour une politique de l’offre et propose un pacte de compétitivité et 20 milliards de baisse d’impôts pour les entreprises. En contradiction totale avec le discours du Bourget qui avait marqué sa campagne. Le roi de la « synthèse » lorsqu’il était premier secrétaire du PS (1997-2008, un record) croit pouvoir concilier le « socialisme de l’offre » et le « socialisme de la demande ». Mais il commence déjà à fracturer sa majorité, six mois seulement après sa conquête de l’Elysée. Quelques mois auparavant il contribue fortement à faire nommer Harlem Désir premier secrétaire du PS, « une personnalité sans aucune épaisseur, une première indication que le parti va se marginaliser par rapport aux institutions » décèle Frédéric Sawicki.

24 avril 2013, la grande désillusion

Le site de Florange ferme définitivement, malgré les promesses faites aux ouvriers par le candidat Hollande pendant la campagne. C’est le début de la grande désillusion pour les électeurs de gauche. Un an plus tard, le Parti socialiste et ses alliés perdent 162 villes de plus de 9.000 habitants, du jamais vu aux municipales pour un parti au pouvoir sous la Ve République. Arnaud Montebourg, le ministre du redressement productif très impliqué dans le projet de sauvetage de Florange, démissionnera quelques mois plus tard. Rejoignant avec Benoît Hamon le clan des « frondeurs » du PS, une épine dans le pied de plus pour le président de la République.

17 février 2015, la loi Macron braque

Après la nomination de Manuel Valls premier ministre l’année précédente, la loi Macron d’inspiration social-libérale, braque l’aile gauche du Parti socialiste. La maire de Lille Martine Aubry dénonce une «régression sociale ». Les « frondeurs » menacent de voter contre, ce qui pousse le premier ministre Manuel Valls à dégainer l’article 49.3 et à engager la responsabilité du gouvernement. « On a une majorité, on le sait. On veut simplement aller vite », explique alors un de ses conseillers. Pourtant, la majorité présidentielle, déjà fragilisée, vacille. Pour le professeur de sciences politiques, « cet épisode montre que François Hollande n’aura pas, à la différence d’un Mitterrand ou d’un Jospin, pris le temps de prêter attention au PS dans sa prise de décision ».

16 novembre 2015, la déchéance de nationalité fracture

Plusieurs mois après la débâcle socialiste aux départementales et aux régionales, et trois jours après les attentats du Bataclan et du Stade de France, François Hollande annonce vouloir étendre la déchéance de la nationalité française aux binationaux nés Français. Finalement le président de la République renonce. Mais c’est trop tard : Christiane Taubira, la caution de gauche du gouvernement démissionne quelques mois plus tard. « On voit que c’est Hollande lui-même qui a créé les conditions du divorce avec la base du parti. Après avoir nommé un premier ministre ultra-minoritaire au sein du PS (5 % à la primaire), il propose des mesures en contradiction totale avec le corpus idéologique qu’il a porté en 2012. Il aurait dû amener des compensations à son aile gauche. », analyse Frédéric Sawicki.

20 juillet 2016, la réforme de trop

La ministre du Travail Myriam El Khomri présente sa réforme du Code du travail. Le projet de loi, salué par le Medef, provoque la colère des « frondeurs » socialistes. Frédéric Sawicki remarque qu'« à l’époque François Hollande accuse les « frondeurs » d’être dans la logique de l’affrontement, mais c’est bien lui qui aura cherché jusqu’au bout le plus petit dénominateur commun. Cependant la responsabilité de la mort programmée du parti de la rue de Solférino est collective : ce ne sont que les contradictions profondes du PS qui sont remontées à la surface. » Une dizaine de manifestations parfois violentes ont lieu en France pendant cinq mois. Encore une fois, le premier ministre de François Hollande a recours à l’article 49.3 pour faire adopter la réforme, signe que la majorité présidentielle est définitivement morte.