PRESIDENTIELLEFrançois Bayrou, l’empêcheur de tourner en rond de la politique française

Présidentielle: François Bayrou, le trouble-fête de la politique

PRESIDENTIELLELe président du Modem fait durer le suspense sur sa candidature à l’élection présidentielle…
Olivier Philippe-Viela

Olivier Philippe-Viela

Ceux qui l’ont pris au mot quand il assurait préférer son mandat à la mairie de Pau à une nouvelle candidature à l’élection présidentielle se sont peut-être précipités. François Bayrou, le président du Modem, est en train de montrer qu’il n’a pas abandonné l’un de ses credo politiques : se faire désirer.

Sera-t-il sur la ligne de départ lors du premier tour en avril ? Il l’a dit : son annonce de candidature ou de non-candidature se fera mi-février. « Vers le 20, sa décision n’est pas encore prise », indique son entourage. Mais depuis que François Fillon, le candidat LR avec qui il a refusé un accord électoral, est dans la tourmente des affaires, le Béarnais va de média en média pour insister sur ses différences avec le député de Paris.

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« Jamais dans l’histoire de la République, un candidat à la présidence​ n’a été ainsi sous l’influence des puissances d’argent », a-t-il par exemple balancé ce mercredi matin sur France 2. Message mal accueilli dans le camp Fillon : « On voit bien quel est le jeu de Monsieur Bayrou, il nous annonce qu’il va être candidat et donc il veut faire parler de lui une nouvelle fois », selon Bernard Accoyer, secrétaire général des Républicains.

« Les offres politiques qui se présentent ne sont pas satisfaisantes. Nous avions soutenu l’idée d’un rassemblement large autour d’Alain Juppé, ça ne s’est pas fait », justifie la députée européenne Marielle de Sarnez, vice-présidente du Modem.

« C’est une sorte de chevalier blanc »

Mais la candidature de François Fillon étant actée depuis plus de deux mois, François Bayrou ne multiplie pas les passages dans les médias ces derniers jours que pour la promotion de son livre Résolution française. Les problèmes judiciaires actuels du candidat LR lui ont ouvert une fenêtre de tir. « Il a une exigence pour le pays et ses institutions, il veut faire en sorte que la France s’en sorte. Le François Fillon que les Français connaissaient, ce n’est pas ça. Nous sommes tous stupéfaits, dans un grand désarroi, car ça ne fait pas du bien à la société française. Il faut une frontière entre l’argent et la politique », ajoute Marielle de Sarnez.

Et c’est là que François Bayrou entre en scène. L’historien Jean Garrigues, spécialiste de la vie politique, rappelle les grandes lignes de l’image du Béarnais : « Il est apparu comme un poil à gratter de la droite depuis 2002. Bayrou a toujours défendu l’intégrité de l’activité politique. L’un de ses chevaux de bataille a été de dénoncer l’affairisme, le clientélisme, l’opacité. C’est une sorte de chevalier blanc. »

Contre Fillon, contre Macron

Peut-il rallier une partie de l’électorat chrétien qui avait choisi François Fillon pour son image d’éthique lors de la primaire de la droite ? En utilisant l’expression « puissances d’argent » (référence à l’écrivain catholique Charles Péguy, L’Argent, 1913), Bayrou a envoyé un signal : « Ce n’est pas une récupération, plus un rappel, qui résonne au sein d’une certaine droite, celle qui a très mal vécu le rapport à l’argent de Nicolas Sarkozy. Il est l’héritier de cette démocratie chrétienne qui s’inscrit dans le combat de Marc Sangnier [fondateur en 1894 du Sillon, mouvement catholique progressiste] », explique Jean Garrigues.

Fidèle à sa ligne, François Bayrou rejette les possibles alliances partisanes, y compris avec Emmanuel Macron, qui lui a pourtant tendu la main. Le président du Modem a préféré qualifier le candidat d’En Marche ! d’« hologramme » qui incarne « l’hypercapitalisme qui domine le monde ». « François Bayrou a des interrogations sur le modèle de société d’Emmanuel Macron : il semble se soumettre à la mondialisation, sans poser de garde-fous, sans vouloir la réguler, en se satisfaisant de l’uberisation. Est-ce le cas ? Si oui, cela nous pose un souci », précise Marielle de Sarnez.

4 à 5 % d’intentions de vote

Si François Bayrou se présente, il sera le candidat le plus expérimenté, avec ses trois campagnes présidentielles au compteur (2002, 2007, 2012), devant Nathalie Arthaud, Jean-Luc Mélenchon, Nicolas Dupont-Aignan et Marine Le Pen (une chacun, 2012). Mais il n’est crédité que de 4 à 5 % des intentions de vote dans les sondages les plus récents. Ne risque-t-il pas d’être juste une candidature de témoignage ?

« Il est très difficile de mener une campagne solitaire si l’on ne s’appuie pas au moins sur un mouvement qui suscite une mobilisation militante, comme Emmanuel Macron, qui occupe en plus le même espace politique. François Bayrou et le Modem n’ont pas cette dynamique. Mais la fluidité de l’électorat, la tentation du rejet des sortants et son image d’intégrité et d’humanisme chrétien, que vient de perdre François Fillon, ne sont pas négligeables », conclut Jean Garrigues.