Vers un «21 avril» en 2017? Les militants PS entre fatalisme et espoir
TEMOIGNAGES•Alors que la majorité tangue à un an de la présidentielle, «20 Minutes» a recueilli le témoignage de plusieurs militants PS traumatisés par le choc du 21 avril 2002...Anne-Laëtitia Béraud
A un an de la présidentielle, ça tangue à gauche. A la crise économiqueet sociale qui perdure, s’ajoutent les divisions et les polémiques. Et le spectre d’un nouveau « 21 avril » menace : deux enquêtes d’opinion, réalisées les 16 et 18 avril, révèlent que le président sortant François Hollande serait éliminé au soir du premier tour au profit de la patronne du Front national Marine Le Pen. Que faire pour éviter ce scénario catastrophe ? Entre résignation et combativité, plusieurs militants socialistes se sont confiés à 20 Minutes.
Nicolas Devigne, 37 ans, salarié au CHU de Nantes (Loire-Atlantique)
Le 21 avril 2002, j’étais en voiture et j’ai hurlé quand j’ai entendu les résultats. J’avais votéOlivier Besancenot [alors candidat de la LCR]. Je me suis senti con, mais sûr que l’on m’y reprendrait plus avec la dispersion des voix. J’ai pris ma carte au PS en 2008 et j’ai commencé à militer en 2012 à Nantes. J’ai rencontré des personnes formidables, des élus locaux qui m’ont réconforté avec la politique. Aujourd’hui, quand on fait du porte-à-porte, on sent le ras-le-bol. Il y a un énorme problème avec la communication du gouvernement, comme sur Notre-Dame-des-Landes. Dans la section, ça a pas mal râlé à propos de la déchéance de nationalité. Des binationaux ont dit que si François Hollande était candidat, ils voteraient blanc. Je pense qu’un « 21 avril » va arriver en 2017, avec Marine Le Pen au second tour. Et la primaire de la droite décidera du second candidat. Je n’ai aucun doute sur mes valeurs socialistes mais je suis dépité et je m’attends à ce que la droite gagne la présidentielle.
Maxime Munschy, 24 ans, étudiant à Strasbourg (Bas-Rhin)
Le 21 avril 2002, j’avais 10 ans. C’est mon premier souvenir politique et je me souviens que mes parents étaient en panique. Est-ce qu’en 2017, un « 21 avril » est possible ? Oui. Le Front national peut être au second tour de la présidentielle. Et face à lui, que ce soit la gauche ou la droite, ce sera le jackpot. Sur le terrain, à la section, il y en a qui soutiendront le candidat PS quel qu’il soit. Et d’autres disent qu’ils attendent de voir après une primaire [à gauche], si c’est François Hollande qui se présente…
Thibault Hisette, 21 ans, salarié à Biarritz (Pyrénées-Atlantiques)
Si un « 21 avril » pouvait arriver en 2017 ? Oui, et en pire, car Marine Le Pen pourrait obtenir numériquement plus de voix, ou être en tête au premier tour. Tous les jours, j’ai envie d’arrêter quand je vois l’écart entre ce que fait le gouvernement et le programme de François Hollande en 2012. Mais si la gauche du PS s’en va, il ne restera que la droite du parti, et je ne l’accepte pas. Car si tous les dégoûtés s’en vont, il ne restera que les dégoûtants. Comme d’autres, j’attends une primaire PS ouverte aux citoyens pour que la gauche soit au second tour de la présidentielle. Et si c’est François Hollande qui est le candidat en 2017, je ne ferai pas campagne, alors que j’avais fait sa campagne en 2012, à 17 ans. Je garderai ma carte car je suis profondément de gauche, mais j’attendrai le Congrès du PS qui suivra [après mai 2017] pour renouveler les équipes et changer vraiment de politique.
Elliott Pavia Ernest, 21 ans, étudiant à Nancy (Meurthe-et-Moselle)
Le 21 avril 2002, je m’en souviens très bien, avec ma mère en pleurs devant la télévision. Un « 21 avril » en 2017 est-il possible ? Oui, il y a un vrai risque. La communication du gouvernement et les promesses de 2012 qui n’ont pas toujours été tenues expliquent en partie les retours défavorables que l’on a pu avoir en tant que militant. A propos du récent débat sur la déchéance de nationalité, un étudiant franco-allemand qui va être inspecteur du travail s’est demandé s’il allait partir en Allemagne pour continuer ses études. Mais aujourd’hui encore - même s’il y a des oppositions à certaines lois, comme le CICE [crédit d’impôt compétitivité emploi] ou le projet de loi travail - on croit à une synthèse politique entre la ligne du gouvernement et la base militante socialiste, les frondeurs, les écologistes et les communistes pour 2017. Il faut assumer le débat
Martin Effenberger, 25 ans, informaticien à Molsheim (Bas-Rhin)
A la suite du 21 avril 2002, j’ai fait ma première manif ! C’était un sit-in, dans la cour du collège. Aujourd’hui, un « 21 avril » en 2017, est une quasi-certitude. On en parle beaucoup à la section, car il y en a encore à convaincre que ce n’est pas perdu. Et face aux personnes que l’on rencontre, on doit rester optimistes et positifs, même si parfois on n’y croit plus. On s’appuie sur le bilan du quinquennat, car, même s’il y a des déceptions, il y a des bonnes choses qui ont été réalisées. Il y a toujours un espoir.