La délicate question des adhérents des partis politiques
POLITIQUE•A droite comme à gauche, les formations politiques connaissent des hauts et des bas en termes d’adhérents…Anne-Laëtitia Béraud
Plusieurs milliers d’adhérents ont récemment abandonné le parti Les Républicains (LR). En un an, leur nombre est passé de 179.000 à 175.900, soit une baisse de 3.100 personnes, avance ce mardi France Info. Un chiffre contredit par le secrétaire général adjoint aux fédérations de LR Eric Ciotti : L’élu des Alpes-Maritimes affirme sur cette même radio qu’« aujourd’hui on est environ à 200.000 adhérents ». Avant de rectifier un peu plus tard auprès de l’AFP : « Au 22 septembre, il y a 178.920 adhérents à jour de cotisation, l’année dernière à la même date on était à 181.000 ». Lors du congrès de « refondation » de l’ex-UMP, fin mai 2015, la formation revendiquait 210.000 adhérents à jour de cotisation.
Comment expliquer ces chiffres si différents? « La définition d’adhérent est floue par nature. Les différents partis n’ont pas une seule et même définition du terme d’adhérent. Et cette notion évolue aussi dans le temps », détaille le politologue Pierre Martin, enseignant-chercheur du CNRS et de l’Université de Grenoble. Ainsi, un adhérent peut être défini comme encarté dans un parti, mais être un simple donateur dans une autre formation. A ce flou juridique, s’ajoutent des difficultés techniques pour compter précisément les adhérents. « Les partis n’ont pas toujours les moyens, ni la volonté de rayer des adhérents dans les fédérations locales. Il faut donc toujours prendre une distance par rapport aux chiffres annoncés », avertit le politologue.
L’objectif de la présidentielle 2017
L’imprécision des chiffres, plus ou moins voulue ou subie, n’empêche cependant pas l’ambition. Le président du parti Les Républicains Nicolas Sarkozy ambitionne 500.000 adhérents en 2017, et « l’objectif de 300.000 adhérents est tenable » comme l’a rappelé Eric Ciotti mardi matin. Cet élan vers la présidentielle semble d'autant plus laborieux alors qu’en 2007, toujours sous la houlette de Nicolas Sarkozy, l’UMP comptait 340.000 adhérents.
Mais là encore, rien de nouveau ou d’original dans cette apparente désaffection, estime Pierre Martin. Les variations du nombre d’adhérents politiques existent tant à droite qu'à gauche. Quand le PS revendique à l’été 2015 131.000 adhérents, « son chiffre varie entre 90.000 et 150.000 » depuis 40 ans, précise le politologue. A droite, les périodes fastes son interrompues par des crises qui dispersent les adhérents. « Le RPR n’était pas dans une situation brillante en 1999, avec la crise liée à Philippe Seguin, rappelle le politologue, tout comme le Front national en 1998 après la scission avec Bruno Mégret ou après l’échec à la présidentielle 2007 ».
Des partis sans grand besoin d’adhérents
Enfin, les vagues d’adhésion peuvent varier… grâce aux partis et à leur activité plus ou moins soutenue dans ce domaine. « Les partis ne sont pas passifs. Ils peuvent produire des adhérents s’ils suivent une politique active de recrutements. Par exemple, les adhésions ont décollé sous Nicolas Sarkozy à l’UMP dans les années 2000 grâce à des campagnes de mailing [envois de courriels] et de gros efforts fournis pour contacter les sympathisants », rappelle Pierre Martin.
Et quand bien même les adhérents intéressent les partis et peuvent leur rapporter de l’argent, ces formations peuvent parfois s’en passer. En effet, «les adhérents demandent des comptes, voire des places… Certains partis estiment ne pas en avoir nécessairement besoin, d’autant qu’ils disposent de différentes sources de financements, dont les subventions publiques », souligne le politologue Pierre Martin.
Depuis les lois sur le financement public aux partis, ces derniers disposent de subventions liées à leurs résultats aux élections législatives et à leur nombre de parlementaires. Pour l’année 2015, un peu plus de 63,1 millions d’euros ont été versés aux partis politiques, selon un décret du 23 janvier 2015 paru au Journal officiel. Le PS et le parti Les Républicains se partagent le gros de cet argent public.