POLITIQUEDémission du gouvernement: L’autoritaire monsieur Valls a refait le même coup qu'à Evry en 2002

Démission du gouvernement: L’autoritaire monsieur Valls a refait le même coup qu'à Evry en 2002

POLITIQUELe Premier ministre a gagné le bras de fer face à Arnaud Montebourg…
William Molinié

William Molinié

Pour sa première intervention sur TF1 après sa nomination à Matignon, Manuel Valls avait déjà joué carte sur table. «Je ne vais pas changer ma personnalité», avait-il prévenu. Le coup de poing sur la table du Premier ministre, obligeant le président de la République à choisir entre lui et son ministre de l’Economie, est révélateur du style de l’homme politique. Un leader qui ne supporte pas la discorde au sein de son propre camp et qui se voit en chef d’orchestre hostile à la moindre fausse note.

«Valls fait du Valls. Rien ne m’a étonné à partir du moment où son entourage a dit hier [dimanche, ndr] que Montebourg avait franchi la ligne jaune. La suite, c’était la sanction», commente Gilles Verdez auprès de 20 Minutes, co-auteur d’une biographie sur Manuel Valls. Les clans Montebourg et Hamon ont essayé d’enferrer le Premier ministre dans une position inconfortable en taxant les propos de son entourage de «sur-réaction» médiatique. En vain. «Je ne peux pas croire qu’ils ne savaient pas comment allait réagir Valls», soutient Gilles Verdez.

«Il m’a remplacé de façon chirurgicale»

D’autant que cette stratégie du «C’est toi ou moi», Manuel Valls l’avait déjà mise en œuvre à Evry (Essonne), dès les premiers mois de son mandat. Nous sommes en 2002. Manuel Valls est alors maire d’Evry depuis quelques mois seulement. Il s’agit de son premier mandat politique. Son premier adjoint, Xavier Matharan, en charge des affaires financières, s’oppose publiquement à lui au sujet d’un projet de référendum de vie locale, rapportent Gilles Verdez et Jacques Hennen dans leur biographie*.

Manuel Valls démissionne le lendemain puis est réélu par le conseil municipal, sans la présence du trublion. «Il m’a dit: “Il y a une divergence entre nous.” Il m’a remplacé de façon chirurgicale. Ça a été très net», se souvient, contacté par 20 Minutes, Xavier Matharan, aujourd’hui avocat en droit public. «C’était quelqu’un d’entier, un vrai leader, déjà à la stature d’homme d’Etat. Il a tranché et j’ai cessé de siéger au conseil municipal. Et entre un premier adjoint et un maire, c’est le maire qui gagne», poursuit son ancien bras droit qui dit conserver de «très bonnes relations» avec Manuel Valls.

Remise en cause de l’autorité

L’anecdote pourrait paraître grossière. Pourtant, on y retrouve les mêmes traits que la séquence politique d’aujourd’hui. «Valls ne conçoit pas qu’on puisse remettre en question l’autorité, poursuit Gilles Verdez. Quand je lui ai rappelé en 2013 l’épisode Matharan, il m’a dit texto: “J’adore travailler en équipe sur le long terme. Mais il y a une règle, on ne me conteste pas publiquement”.»

En forçant François Hollande à choisir entre lui et Arnaud Montebourg, Manuel Valls connaissait la réponse du Président, qui avait déjà joué sa dernière carte en le nommant à Matignon. Lors de la constitution de sa première équipe, le Premier ministre n’avait pas réussi à faire entrer ses fidèles soutiens au sein du gouvernement. Désormais, la couleur du gouvernement Valls II, qui sera connue mardi, donnera le ton des rapports de force entre François Hollande et Manuel Valls, bien décidé à pousser des Jean-Jacques Urvoas ou Carlos Da Silva dans des ministères.

*Manuel Valls, les secrets d'un destin (édition du Moment), Gilles Verdez et Jacques Hennen.