Fête de la rose: Avec Hamon, Montebourg veut envoyer un signal fort à gauche
POLITIQUE•Element essentiel du gouvernement, le ministre de l'Economie veut faire entendre sa petite musique pour préparer l'avenir...Maud Pierron
Comme un petit air de 2009… Comme il y a cinq ans, Arnaud Montebourg fait de Benoît Hamon l’invité d’honneur de sa fête de la rose à Frangy-en-Bresse (Saône-et-Loire). A l’époque, le secrétaire national du PS à la Rénovation qu’il était s’était assuré du soutien du porte-parole du parti pour imposer le principe de la primaire à gauche à laquelle Martine Aubry n’avait pas encore donné son aval. Aujourd’hui, le ministre de l’Economie et du Redressement productif a pris du poids politique avec sa 3e place à la primaire tandis que le ministre de l’Education est en délicatesse, entre son courant Un monde d’avance, qui n’a pas compris sa décision de participer au gouvernement, et un espace politique qui s’est réduit.
Mais dimanche au milieu des militants, les deux hommes se retrouveront avec l’intention d’incarner une ligne plus à gauche au sein d’un gouvernement accusé d’être trop libéral et d’envoyer un signal clair à tous les déçus. «On passe à l’attaque dimanche», a d’ailleurs lancé Arnaud Montebourg à sa sortie du Conseil des ministres, mercredi. «Au gouvernement, il y a un gros coup de vent à droite, il faut contrebalancer», résume Arnaud Leroy, l’un des lieutenants d’Arnaud Montebourg qui fait partie des députés frondeurs.
«Il doit faire la preuve qu’il peut faire changer la ligne du gouvernement»
La réunion de Montebourg et Hamon «montre qu’il y a des gens importants au gouvernement qui mettent leurs égos dans leur poche pour faire émerger d’autres idées. Qu’il y a autre chose au ‘there is no alternative’servi par le gouvernement qui peut agréger des gens», explique-t-il. Les deux hommes peuvent «infléchir la ligne de l’intérieur. Pas l’infléchir pour l’infléchir mais parce que ça ne marche pas, tout en restant dans le cadre des 3% et des 50 milliards d’économie», ajoute-t-il.
Dans cet esprit, plusieurs frondeurs seront aussi invités, dont Jérôme Guedj, Laurent Baumel ou encore Christian Paul, un joli geste quand on sait comment ils sont considérés par le couple exécutif… «Qu’on vienne ne signifie pas ralliement. C’est évidemment sympathique d’être invité quelque part où on n’est pas traité d’irresponsable et où l’on juge que ce que l’on a à dire peut être intéressant», explique Jérôme Guedj, président du Conseil général de l’Essonne. «Ça envoie le message que nous ne sommes pas cornérisés mais légitimes notre démarche», apprécie-t-il. Pour autant, les frondeurs ne veulent pas être utilisés par un Arnaud Montebourg qui pense au coup d’après.
«On ne cherche pas de leader et on lui a dit qu’on ne voulait pas transformer le débat politique en théâtre», prévient le député frondeur Pouria Amirshahi qui n’ira pas à Frangy car il va aux journées d’été d’EELV et de Nouvelle Donne. Il note que dans ce qui a été présenté comme le grand discours de politique économique du ministre en juillet dernier, «c’était parfois contradictoire ou flou». Si Pouria Amirshahi reconnaît à Montebourg sa «constance en matière de volontarisme politique avec le rôle de l’Etat stratège», il reste un peu sceptique en notant qu’il «doit faire la preuve qu’il peut faire changer la ligne du gouvernement». En clair que son verbe haut soit suivi d’effets.
En tête du trio Montebourg-Valls-Hamon?
D’autant plus qu’en ce moment, la gauche du PS et une partie du PS sont en ébullition sur la politique à mener pour sortir la France de la crise, la manière de récupérer l’électorat populaire et les initiatives à prendre pour y parvenir. «Frangy peut n’être qu’une anecdote qui montre que les atomes se rencontrent sur des questions de fond mais ça doit s’inscrire dans un réel mouvement de fond. Car la question bientôt sera de savoir si on organise les commémorations du centenaire de la mort de Jaurès ou des funérailles du socialisme», analyse Pouria Amirshahi.
A plus court terme se pose la question du futur congrès ou des éventuelles primaires de 2017, avec un Montebourg qui veut se présenter en étendard d’une vraie gauche face à un Valls classé à droite et un Hamon qu’il aurait politiquement absorbé. «Il peut être le recours. Ça reste la figure la plus forte, qui a acquis une vraie expérience ministérielle, qui ‘est battu et n’a jamais abdiqué», fait déjà l’éloge Arnaud Leroy.