POLITIQUEEt si le retrait de Jean-Luc Mélenchon était une bonne nouvelle pour le Front de gauche?

Et si le retrait de Jean-Luc Mélenchon était une bonne nouvelle pour le Front de gauche?

POLITIQUECar sa très forte personnalité «ferme le jeu pour structurer la gauche alternartive», selon le communicant Philippe Moreau-Chevrolet...
Maud Pierron

Maud Pierron

Jean-Luc Mélenchon quitte la coprésidence du Parti de gauche (PG) qui d'ailleurs n'existe plus et va être remplacé par une direction collégiale. Il annonce son départ lui-même ce vendredi à l’AFP, ajoutant continuer «le combat» politique. Une décision en droite ligne avec ses déclarations de juillet dernier lorsqu’il expliquait vouloir faire «autrement», «[s’]utiliser dans ce qu’[il] se croit capable de faire: la transmission idéologique, le travail intellectuel et culturel». Il ajoutait avoir «besoin de temps, je ne peux plus continuer comme cela», précisant que «plusieurs visages avaient émergé».

«Jean-Luc reste dans la direction du parti, mais il fera autre chose, sa tâche centrale ne sera plus d'être dans la représentation du PG et du Front de gauche», confirme Eric Coquerel, secrétaire national du PG. D'autres, comme lui, François Delapierre ou Raquel Garrido pourraient être amenés à le suppléer sur ce point. Cette volonté de renouvellement, même si elle est actée dans les faits par une nouvelle organisation, n’est pas sûre d’aboutir. On se souvient du NPA qui a voulu faire monter de nouvelles têtes en 2007 après la deuxième présidentielle de Besancenot qui avait même quitté ses fonctions de porte-parole en 2011. En vain, provoquant le retour du «facteur de Neuilly» (Hauts-de-Seine), désormais dans le 18e arrondissement de Paris, pour les européennes en 2014.

Un retrait qui peut permettre «des primaires de la gauche alternative»?

Comme le NPA, le Parti de gauche tient quasiment à la personnalité très forte de son leader qui, de fait, a aspiré la lumière médiatique qui aurait pu nourrir de jeunes pousses. A la question «le Parti de gauche peut-il survivre sans Jean-Luc Mélenchon?», Martine Billard, la coprésidente du PG expliquait à 20 Minutes en début de semaine: il «sera toujours là mais c’est vrai que nous voulons mettre en avant d’autres personnalités émergentes au Parti de gauche. C’est toujours difficile, on l’a déjà vu, les médias disent "c’est Jean-Luc Mélenchon ou personne"».

Avec un Mélenchon qui veut prendre du champ, le parti aura peut-être moins de mal à imposer les Raquel Garrido, François Delapierre ou Eric Coquerel. Et politiquement, ce recul peut changer la donne à la gauche du PS, estime Philippe Moreau-Chevrolet, directeur de MCBG, une agence de conseil en communication et en stratégie d'influence: «C’est une bonne nouvelle pour la gauche alternative car Jean-Luc Mélenchon, avec qui il était très difficile de négocier, était un point de blocage dans les discussions avec les autres partis». En somme, son retrait «ouvre le jeu» dans le sens où il va «libérer la parole» et permettre à «d’autres personnalités» de monter en première ligne.

Duflot la nouvelle Mélenchon?

«Avec de vraies discussions et un vrai travail de fond, une nouvelle dynamique électorale peut s’ouvrir à gauche du PS, avec la tenue de primaires de la gauche alternative pour incarner réellement l’alternative à la politique de Hollande et Valls», analyse Philippe Moreau-Chevrolet. Certains pourraient être tenté de reprendre le rôle de leader du Front de gauche qu'occupait Jean-Luc Mélenchon comme Cécile Duflot. Le quotidien L’Opinion l'appelle d’ailleurs «La nouvelle Mélenchon» ce vendredi.

A gauche, vu la situation économique et sociale, il y a dans l’air des envies de rassemblement. Des rapprochements ont déjà eu lieu entre les frondeurs, le PG, le PC et EELV depuis la sortie du gouvernement des écologistes. Mais la personnalité de Mélenchon, «trop clivante», pouvait empêcher un approfondissement sans compter qu’il hérisse le poil de pas mal de cadres du PCF. Même si Mélenchon a toujours jugé que ces critiques sur sa personne étaient un habillage politique pour masquer des désaccords de fond.

Encore faut-il que Jean-Luc Mélenchon se mette vraiment en retrait, juge Philippe Moreau-Chevrolet. Or, même si le communicant juge qu’«il a échoué dans son pari», que son «discours ne passe pas dans l’électorat populaire» et qu’il a un côté politicien à l’ancienne», l’animal politique qu’est Jean-Luc Mélenchon a toujours su rebondir. Et lui réfute tout abandon du navire. «On se réorganise pour gagner le coup d'après. En ce moment, ça bouge à gauche, chez les Verts avec la tribune d'Eva Joly qui veut une alliance de "l'autre gauche", confirme Eric Coquerel. On nous présente le paysage politique de 2017 centré autour de Marine Le Pen. On veut changer la donne et redonner au peuple sa place d'acteur central. Jean-Luc Mélenchon aura un rôle dans cette démarche, je ne sais pas lequel, mais ce n'est pas une question centrale».