Quand le compost emménage en ville
RECYCLAGE•Les déchets organiques peuvent servir à fabriquer du très bon compost. Et même en zone urbaine, c'est possible. Paris en fait l'expérience...R.G.
Jean-Jacques Fasquel appelle ça sa «compost’story». «J’ai commencé à y réfléchir en 2007. Je me posais des questions sur ma vie, sur ses impacts. Et je me suis rendu compte qu'un tiers de ma poubelle était composé de déchets organiques.» A la lecture d’un article sur le cas rennais, pionnier du compost urbain, Jean-Jacques Fasquel décide de reproduire l’expérience au pied de sa résidence de 560 logements, dans le 12e arrondissement de Paris.
L’idée plaît, mais surprend, se souvient-il, derrière ses lunettes rondes: «La mairie a donné son accord tout de suite. En revanche, il a fallu près d’un an pour rassurer le bailleur. Malgré tout, en juin 2008, on avait nos 3 bacs.» Quatre ans plus tard, ils sont huit, accompagnés d’un jardin collaboratif et de quatre ruches bourdonnantes. Jean-Jacques Fasquel est, lui, devenu maître composteur et enseigne aux collectivités et aux citadins comment faire du contenu de leur poubelle une ressource à part entière.
Formidable créateur de lien social
Ce qui n’était qu’une tentative isolée, la première expérience de compostage en pied d’immeuble dans la capitale, a rapidement pris de l’ampleur. La Ville de Paris s'est inspirée de son initiative en lançant en 2010 une expérimentation sur une centaine de sites. Jean-Jacques Fasquel en a accompagné certains. Chez lui, au 107 rue de Reuilly, comme ailleurs, il a été surpris par l’engouement suscité par l’arrivée soudaine de ces gros cubes en plastique recyclé ou en bois.
«On comptait une vingtaine de foyers volontaires le premier jour, mais dès le lendemain de l’inauguration, on avait une liste d’attente. Si la demande est un peu retombée aujourd’hui, certains attendent encore leur tour.» Formidable créateur de lien social, le compost urbain est, en retour, relativement peu exigeant. Un coup de fourche de temps en temps pour l’aérer, et au bout de six à huit mois, l’engrais est fin prêt à l’emploi.
Nourrir les plantes des jardins voisins
Reste un sujet délicat, inhérent à l’habitat urbain, le problème de l’espace. «Potentiellement, si la résidence a 10m² de libres, c’est réalisable. Mais le lieu doit être pertinent, et recevoir le consensus des autres habitants. Sinon, chacun chez soi peut opter pour un lombricomposteur», explique Jean-Jacques Fasquel. Quant au matériel de départ, composé des bacs et de bioseaux individuels dans lesquels on place ses déchets organiques, les collectivités le financent dans la majorité des cas.
Alimentés par soixante-quinze foyers, les huit bacs de Jean-Jacques Fasquel détournent chaque année 8 tonnes de déchets, soit 3m3 de compost qui viendront nourrir le jardin collectif ou les plantes des balcons voisins. Laissée aux bons soins de la filière classique, chaque tonne aurait engendré 100€ de coûts de transport et autant en traitement.