Paris: Les inondations sont-elles le signe avant-coureur d'une crue centennale?
INTEMPERIES•Si les 8,62 mètres de la grande crue de 1910 ne devraient pas être atteints, la préfecture de police et la mairie de paris restent sur le qui-vive...Romain Lescurieux
La ville de Paris est battue par la pluie mais sombrera-t-elle ? Après les fortes intempéries de ces derniers jours, le niveau de la Seine a atteint 4,30 mètres au point de référence d’Austerlitz et devrait monter ce jeudi au-delà de 5 mètres, voire 5,70 mètres d’ici à vendredi, selon le Schapi (Service central d’hydrométéorologie et d’appui à la prévision des inondations). Un seuil encore en deçà de la référence de la grande crue de 1910 : 8,62 mètres. Mais mobilisant tout de même les autorités franciliennes face à une eau qui continue de monter.
Téléphone rouge, vigilance et record de pluie
Le service de prévision des crues a en effet activé le niveau vigilance « rouge » en Seine-et Marne - où la ville de Nemours sous les eaux a été évacuée - et « jaune » dans la capitale « Cela signifie qu’il y a un risque de crue ou de montée rapide des eaux n’entraînant pas de dommages significatifs mais nécessitant une vigilance particulière dans le cas d’activités saisonnières et ou exposées », indique la Ville. Un téléphone rouge entre la préfecture de police et la mairie de Paris a donc été mis en place.
De leurs côtés, les services de la Direction de la voirie et des déplacements ont procédé, eux, aux fermetures des berges piétonnes de la rive gauche tandis que la Brigade fluviale poursuivait ses maraudes de vérification. Un dispositif peu fréquent pour une situation jugée « exceptionnelle » par les prévisionnistes.
Les pluies tombées ces derniers jours en France sont un « épisode tout à fait exceptionnel » se produisant « en moyenne tous les 100 ans », souligne François Jobard, prévisionniste à Météo-France, qui annonce de nouvelles intempéries ce jeudi. Qu’en est-il à Paris ? « Le caractère est également exceptionnel pour la capitale. Il est tombé l’équivalent de trois mois de pluie en trente jours et le record de pluie pour un mois de mai à Paris a été battu », note Katia Conte, autre prévisionniste à Météo France, précisant que « nous ne sommes jamais à l’abri d’un phénomène plus virulent ». Le risque d’une crue centennale dans la capitale est-il alors imminent ?
« Nous sommes loin de la crue centennale »
« Nous sommes loin de la crue centennale de 1910 », rassure auprès de 20 Minutes Bruno Janet, chef du pôle modélisation pour le réseau Vigicrues. « Les conditions nécessaires à une telle situation ne sont pas réunies et heureusement. En fait, il faudrait que tous les cours d’eau qui se jettent dans la Seine soient plus actifs. Et là, ce n’est pas le cas car seul le Loing est vraiment agité », ajoute-t-il.
Si la crue de 2010 (3,92 mètres) a d’ores et déjà été battue, il faut remonter à mars 2001 pour revivre une crue d’une telle dimension. La Seine, à l’échelle d’Austerlitz, avait atteint les 5,21 m. En 1982, l’eau atteignait même les cuisses du zouave (6,15 mètres). Mais cette fois-ci, la situation devrait s’améliorer.
« Les précipitations prévues ce jeudi vont encore faire augmenter le niveau de l’eau mais le pic de crue devait être atteint vendredi », affirme-t-il sans donner toutefois de date concernant la décrue. « Notons toutefois que les sols sont détrempés et font facilement réagir les cours. Nous allons donc continuer de suivre attentivement », conclut-il. Même mot d’ordre au sein de la Mairie de Paris.
« Nous ne prendrons pas d’autres mesures ayant des conséquences sur la vie des Parisiens »
« Nous sommes en relation heure par heure avec les services de l’Etat », énonce Colombe Brossel, adjointe à la Maire de Paris, chargée de la sécurité, de la prévention, de la politique de la ville et de l’intégration. « Jusque-là nous avons pris deux mesures opérationnelles : la fermeture des voies sur berges et la mise en place de maraudes pour les personnes les plus démunies. Mais même à 5,70 mètres, nous ne prendrons pas d’autres mesures ayant des conséquences sur la vie des Parisiens », assure-t-elle.
En septembre 2015 et mars 2016, la ville de Paris a participé à deux exercices de simulation de crue exceptionnelle. Le scénario catastrophe de ce dernier prévoyait une montée des eaux quotidienne de 50 cm pour finir à plus de 8 mètres. De quoi faire face à la montée des eaux, selon Colombe Brossel. « Nous avons beaucoup progressé en termes de prises de décisions opérationnelles et de gestion des solutions de proximité », dit-elle, avant de revenir sur la situation actuelle : « Nous restons vigilants ».