Camp humanitaire de réfugiés: Encore «flou» et «peu concret» réagissent certains élus parisiens
REFUGIES•Si le lieu n'est pas encore arrêté, ce campement devrait ouvrir d’ici un mois et demi sur une friche dans Paris intra-muros et pourra accueillir plusieurs centaines de réfugiés…Romain Lescurieux
Son invitation mentionnait une « annonce forte ». Entourée de ses adjoints et de représentants d’Emmaüs, France Terre d'asile et Aurore, la maire de Paris, Anne Hidalgo, a dévoilé ce mardi à l’hôtel de ville, la création imminente d’un camp humanitaire à Paris « aux normes de l’ONU » qui accueillera « dignement » plusieurs centaines de réfugiés. Et ce, afin d’offrir « un accueil de jour » mais aussi « l’hébergement de personnes qui arrivent démunies » dans la capitale, « avec l’aide des associations et je l’espère de l’État », a précisé la maire de Paris.
La situation « n’est plus tenable, ni acceptable »
Un an après la première évacuation des réfugiés de La Chapelle et l’évacuation musclée des réfugiés par la police à la Halle Pajol quelque temps plus tard, l’édile a donc décidé « d’alerter, de passer à la vitesse supérieure en apportant des réponses et les moyens d’agir ». Et pour cause, depuis quelques jours, plus de 800 personnes dorment à même le sol, dans la boue, dans le jardin d’Eole dans le 18e arrondissement. « Ce n’est plus tenable, ni acceptable », a-t-elle lancé.
Ce camp donc, qui « s’inspirera de ce qui a été fait à Grande-Synthe », dans le Nord, respectera les « conditions réglementaires » et « celles des camps de réfugiés et de migrants édictées par l’ONU et le HCR » (Haut Commissariat de l’ONU pour les réfugiés), a-t-elle assuré. Cela signifie des hébergements modulaires, « qui puissent être installés rapidement » mais avec « tout le confort nécessaire ». Son but : « Je veux qu’il y ait un lieu identifié, estampillé, et aux normes pour pouvoir remettre ces personnes dans le circuit qui corresponde. » Mais dans quel secteur va ouvrir ce camp humanitaire ?
« Plusieurs terrains en friche dans le nord de Paris sont actuellement à l’étude »
Ce site qui devrait ouvrir d’ici un mois et demi, « sera plutôt dans le nord de Paris », a indiqué l’élu, qui a ajouté que le nom du lieu, qui appartiendra à la Ville, serait « annoncé dans les prochains jours ». Différents endroits vont en effet être expertisés cette semaine afin de trouver le lieu idoine, sans précision des dimensions requises. « Plusieurs terrains en friche dans le nord de Paris intra-muros sont actuellement à l’étude pour implanter du modulaire », répond-on dans l’entourage de la maire, sollicité par 20 Minutes. Des informations toutefois peu « concrètes », pour le moment, selon différents élus interrogés.
« Il ne faut pas que ce soit juste une annonce »
« Etant donné le manque et le retard terrible en termes d’accueil, cette annonce est une bonne nouvelle mais il faut faire attention car il n’y a aucune précision sur les conditions, la capacité, la qualité et la structure qui va gérer », réagit auprès de 20 Minutes Danielle Simonnet, conseillère de Paris et coordinatrice du Parti de Gauche, rappelant que même un mois et demi « c’est long » par rapport à la situation actuelle au jardin d’Eole. Même son de cloche, dans le groupe écolologiste.
« Nous saluons l’initiative car nous étions dans un néant total mais nous sommes déçus par manque de concret et par cette volonté de faire un seul et même grand centre alors que plusieurs à tailles humaines auraient plus judicieux », détaille Anne Souyris, coprésidente du groupe parisien. Du côté de Nathalie Kosciusko-Morizet, l’incompréhension est de mise. « Nous sommes dans un énorme flou. Et dire que cette annonce est une diversion au récent rapport de la chambre régionale des comptes d’Ile-de-France qui épingle la mairie, il n’y a qu’un pas », indique-t-on dans l’entourage de l’élue Les Républicains.
Enfin de son côté, le groupe Communiste-Front de Gauche, qui soutient l’initiative « exige de l’Etat qu’il s’engage pleinement dans la démarche aux côtés de la Ville de Paris qui amorce seule ce projet ». Une vision partagée par l’association Emmaüs. « Il faut faire un effort supplémentaire et surtout voir cette annonce dans une démarche nationale », explique Bruno Morel, directeur général d’Emmaüs Solidarité. Car selon lui « Paris ne peut pas tout porter seule ».