Un greeter pour découvrir les trésors bien cachés de la Goutte d’or
TOURISME•Un greeter, c’est un Parisien bavard qui aime raconter sa ville aux visiteurs de passage. Pierre Lepetit est de ceux-là et il nous a fait découvrir la Goutte d’or. Troisième volet de notre série pour découvrir Paris autrement…Fabrice Pouliquen
Le rendez-vous est fixé boulevard Barbès, à la sortie du métro Château-Rouge. «Histoire de vous mettre tout de suite dans l’ambiance», lance Pierre Lepetit après nous avoir repérés entre les femmes africaines aux boubous colorés et les vendeurs à la sauvette prêts à plier bagages à tout moment. C’est vrai que le coin résume à lui seul la Goutte-d’Or, «quartier multiethnique par excellence de Paris». Un melting-pot au sang chaud qui se coltine une mauvaise réputation. «Ce n’est pas un jardin pour enfants, aime à dire Pierre Lepetit. Mais c’est un quartier attachant et plein de vie, contrairement à bon nombre de coins aseptisés de Paris. Ici, les gens aiment leur quartier.»
«Un greeter? C’est un bavard qui aime raconter son quartier»
Pierre aussi s’est laissé gagner. Ce retraité parisien donne des cours de français à des habitants du quartier. De temps en temps, il se fait aussi guide de la Goutte-d’Or. Enfin, guide n’est pas tout à fait le mot. Pierre Lepetit est greeter, comme 400 autres à Paris réunis au sein de l’association Parisien d’un jour. «Un greeter, c’est quelqu’un de bavard et de passionné par son quartier, raconte-t-il. Au point de vouloir le raconter aux visiteurs de passage.» La tâche n’est pas si facile à la Goutte d’Or. Pierre Lepetit l’admet: «Ici, il n’y a pas de monuments ni d’immeubles qui sortent du lot. Et puis le quartier est tout petit, coincé entre Barbès à l’ouest, la rue Max-Dormoy à l’est, Saint-Denis au nord et le boulevard La-Chapelle au sud.»
Du roi de la sape à la brasserie de la Goutte-d’Or
Pourtant, le greeter tient son public bien plus d’une heure. Sans jamais le noyer dans les dates et les détails historiques. «Ce n’est pas mon boulot, je ne suis pas guide historique», rappelle-t-il. Non, Pierre Lepetit, lui, vous fait découvrir les gens qu’il aime et les choses qui l’étonnent. Comme Jocelyn, un personnage haut en couleur qui a sa boutique de vêtements pour hommes dans la rue de Panama. «Si vous cherchez à vous relooker, c’est l’endroit parfait, sourit Pierre. A Paris, c’est un haut lieu de la Sape, la Société des ambianceurs et des personnes élégantes. Un mode vestimentaire lancé par des dandys africains qui osent les costumes trois-pièces aux couleurs vives.»
Si c’est ouvert, le greeter vous fera aussi entrer au Ayyem Zamen, un café social où aiment se retrouver les retraités du quartier, puis redescendre la rue des Poissonniers, par où autrefois les poissons arrivaient de Normandie. Rue de la Goutte-d’Or, vous ferez halte devant l’immeuble du 49, duquel se serait inspiré Emile Zola pour son roman L’Assommoir. Au 28 de la même rue, Pierre ne manquera pas non plus de vous faire entrer dans la Brasserie de la Goutte-d’Or. «Car oui, le quartier a sa propre bière avec des épices dénichées chez les commerçants du coin», raconte Pierre.
2.600 balades en 2013
Si l’on ajoute le Barbes Palace, l’ancien cinéma de quartier devenu magasin de chaussures, ou encore le joli passage des Poissonniers où a vécu Alain Bashung, cela en fait des portes méconnues à pousser à la Goutte-d’Or. Mais ça, c’est vrai pour chaque visite des greeters dans Paris. «En 2013, on en avait organisé 2.600», précise Christian Rangil, président de France Greeters. Et pour que la surprise soit totale, ce ne sont pas les visiteurs qui choisissent leur balade. «Ils donnent juste leurs disponibilités et leurs centres d’intérêt. On se charge du reste.» De quoi se laisser tenter.