Qui sont les marchands de sommeil ?

Qui sont les marchands de sommeil ?

Logement Les profils sont variés et une part infime d'entre eux sont condamnés par la justice
Hélène Colau

Hélène Colau

Début septembre, un incendie mortel dans un immeuble insalubre de Saint-Denis mettait une fois de plus en cause les marchands de sommeil. Parmi les onze propriétaires incriminés, deux personnes aisées vivant dans l'Ouest parisien. L'un d'eux serait même professeur de droit à l'université Paris-Dauphine… Voilà qui cadre mal avec l'image qu'on se fait de ces bailleurs voyous.

« Ils ont pignon sur rue »
Quel est donc le vrai visage de ceux que l'on nomme « marchands de sommeil » ? « Il y a de tout, mais quand on est propriétaire d'un immeuble en Ile-de-France, on est plutôt riche, déclare Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole de l'association Droit au logement. Ce sont des gens qui ont pignon sur rue ; beaucoup travaillent dans l'immobilier. » Des marchands de biens finissent ainsi par céder aux sirènes de l'argent facile, louant à prix d'or des logements devenus insalubres faute de travaux. En septembre 2011, c'est le très respectable – en apparence – directeur d'une clinique de Bondy (Seine-Saint-Denis) qui était condamné pour avoir loué des chambres de l'établissement à des migrants. « Ce profil correspond aux gros bailleurs, qui possèdent de nombreux logements, explique Jean-Baptiste Eyraud. Mais il y a aussi des petits besogneux. » C'est le cas au Chêne-Pointu, à Clichy-sous-Bois. Selon Hanane Lakhal, de l'association Redresser ensemble le Chêne-Pointu, il y aurait une vingtaine de marchands de sommeil dans le quartier. « Certains sont simplement des propriétaires qui louent une chambre chez eux pour faire face aux charges, 1 000 € par mois pour un trois-pièces, explique-t-elle. D'autres sont des investisseurs : en louant à trois familles un appartement acheté 50 000 €, ils se remboursent très vite. Mais ce ne sont pas des gens riches. » Nombre d'entre eux n'ont même pas mauvaise conscience. Comme ce marchand de sommeil de Gennevilliers (Hauts-de-Seine) qui mettait un point d'honneur à louer ses taudis à bas prix à de modestes retraités et n'engageait jamais de procédure de recouvrement en cas d'impayés. Ou comme ce vieil homme de Clichy-sous-Bois estimant « rendre service aux sans-papiers qui n'arrivent pas à trouver de logement ». Bref, des gens très bien… « Il y en a même un qui travaille dans la police », glisse Hanane Lakhal.

La loi est sévère avec ces bailleurs

Les marchands de sommeil louent des chambres insalubres ou à des prix trop élevés. Ils encourent cinq ans de prison, 150 000 € d'amende et la confiscation des biens. Depuis 2010, ils risquent une astreinte journalière de 50 à 500 € s'ils ne réalisent pas les travaux nécessaires.