Montpellier: Trains, raccordement, financement... Les questions que l'on se pose sur la nouvelle gare
TRANSPORTS•L'infrastructure, très décriée depuis plusieurs années, accueille son premier train samedi...Nicolas Bonzom
L'essentiel
- La gare Sud de France accueillera son premier train, samedi matin.
- Depuis plusieurs années, le projet est très décrié : trop cher, trop loin, inutile...
- Pour l'instant, seuls huit trains y passeront quotidiennement.
A Montpellier, dans l’Hérault, la nouvelle gare Sud de France accueillera son premier train samedi, sans qu’elle n’ait jamais été inaugurée officiellement. Le TGV qui essuiera les plâtres en catimini, à 6h41, prendra la direction de Paris-Gare de Lyon.
Mais le voyage n’aura pas été de tout repos. Rarement un projet aura été si décrié, qualifié d'« inutile », de « gare fantôme », de « scandale financier », construit dans une zone que certains pensaient trop exposée aux inondations. 20 Minutes répond aux quatre questions que l’on se pose sur la mal-aimée nouvelle gare TGV de Montpellier.
A quoi elle sert, cette gare ?
A rien, assurent ses détracteurs, qui pointent l’argent public mobilisé sur le projet, pour si peu de trains et une gare beaucoup trop éloignée du centre-ville (lire ci-dessous).
Mais pour ses défenseurs, la nouvelle gare TGV, maillon central du contournement ferroviaire Nîmes/Montpellier, était nécessaire, notamment pour désengorger la gare Saint-Roch, la gare historique de Montpellier, et au passage dépolluer un peu le centre-ville en détournant quelques trains. La gare Saint-Roch « n’est absolument pas saturée », s’exclament pourtant les écologistes d’EELV, qui rappellent que celle-ci a été rénovée en 2014, à hauteur de 55 millions d’euros, avec une nef toute neuve.
Dernier avantage, que la SNCF met en avant sur son site : la nouvelle gare permet de gagner 20 minutes de trajet sur la ligne Paris-Montpellier (3h au lieu de 3h20).
Combien de trains passeront vraiment par la gare ?
Seuls huit trains seront programmés quotidiennement sur les panneaux d’affichage de la nouvelle gare, répond la SNCF à 20 Minutes : un aller-retour en TGV vers Paris-Gare de Lyon, un aller-retour en Ouigo vers Roissy TGV et deux allers-retours en Intercités entre Marseille et Bordeaux. Et c’est tout. C’est peu, pour une telle infrastructure.
Pour espérer un peu plus de trains à la Mogère, il faudra attendre que l’autre gros projet ferroviaire du Languedoc, la gare Nîmes-Pont du Gard, à Manduel, sorte de terre. Si de l’autre côte du Vidourle, les travaux ont bien été lancés il y a quelques semaines, l’infrastructure n’accueillera ses premiers voyageurs qu’en décembre 2019. La nouvelle gare de Montpellier devrait donc tourner au ralenti pendant près d’un an et demi.
Est-ce vraiment une gare au milieu des champs ?
Quand le projet a été lancé, oui, on était un peu au milieu des coquelicots. Mais depuis, la métropole a lancé un projet de quartier, Cambacérès, qui ne devrait pas laisser la gare seule longtemps. C’est ici, notamment, que le nouveau stade doit être construit.
Reste cependant la question du transport des voyageurs, une fois sur le quai, qui débarquent à 6 km environ du centre-ville de Montpellier. La ligne 1 du tramway n’y sera raccordée qu’en 2021 ou 2022. En attendant, on se débrouillera avec les moyens du bord : une navette est assurée par la Tam afin de relier la gare à l’arrêt de tramway Place de France, à Odysseum, pour attraper la ligne 1 du tramway ou le bus n°9.
La gare Sud de France sera également desservie par deux lignes de bus Hérault Transport : la ligne 120, qui rejoint l’aéroport Montpellier-Méditerranée et la ligne 106, qui dessert les plages de Carnon, la Grande Motte, le Grau du Roi et la commune d’Aigues Mortes. De la nouvelle gare, il faudra compter environ 40 minutes avec les transports en commun, pour rejoindre le centre-ville de Montpellier, glisse la SNCF.
Qui finance le projet ?
La question est au cœur des nombreuses tensions. Son coût : 135 millions d’euros. L’Etat contribue à hauteur de 45 millions d’euros, tout comme SNCF Réseau et les collectivités territorriales (32,175 millions d’euros pour la région, 11,825 millions d’euros pour la métropole de Montpellier et 1 million d’euros pour l’agglomération de Nîmes).
Mais en octobre 2016, après un comité de suivi du contournement ferroviaire Nîmes/Montpellier houleux, la région Occitanie se fâche. Pour sa présidente, Carole Delga (PS), il n’y a pas assez de trains dans cette gare. Les financements du conseil régional sont soudainement suspendus. « Une gare nouvelle ne peut se justifier qu’à la seule condition qu’elle soit utile et accessible au plus grand nombre. C’est une question de bon sens et de bonne gestion de l’argent des contribuables. A ce jour, le compte n’y est pas, grondait l’élue. Par conséquent, la région reprendra ses paiements quand la desserte de la gare de la Mogère sera à la hauteur des engagements financiers pris. »
Un désengagement qui n’a pas été (du tout) du goût de Philippe Saurel (divers gauche), le maire et président de la métropole de Montpellier, qui ira jusqu’à annoncer, le 20 juin dernier, qu’il ne couperait pas le ruban de la nouvelle gare tant que l’argent promis par la région ne sera pas versé. L’une des multiples raisons, sans doute, avec la grève SNCF et l’emploi du temps chargé de la ministre des Transports Elisabeth Borne, qui a précipité l’annulation de l’inauguration de la gare, qui était annoncée ce jeudi 5 juillet.