PRISONSyrie: A Palmyre, Daesh s’empare d'une terrible prison du régime

Syrie: A Palmyre, Daesh s’empare d'une terrible prison du régime

PRISONDes prisonniers de toute confession et toute nationalité ont été enfermés ici depuis les années 1980...
Thibaut Le Gal

Thibaut Le Gal

Au milieu du désert, des murs s’élèvent. C’est la prison militaire de Palmyre. En s’emparant ce jeudi de la totalité de la ville antique, les combattants de l’Etat islamique (EI), ont mis la main sur un centre de détention, symbole de la terreur du régime d’Hafez al-Assad, père de Bachar.

« Si pour les touristes Palmyre est "la perle antique du désert", pour les Syriens c’est d’abord une des plus terribles prisons du régime — Romain Caillet (@RomainCaillet) May 17, 2015 »

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« La prison de Tadmor [nom arabe] est utilisée par le père Assad depuis la fin des années 1970. Depuis quatre décennies, les opposants politiques y croupissent », confirme Wassim Nasr, spécialiste des mouvements djihadistes. « Cette prise aura un retentissement inégalé dans le monde arabe car des gens de toute nationalité et de toute confession, Syriens, Irakiens, Libanais, Palestiniens, chiites, chrétiens, Yéménites, ont été oubliés là-bas. »

« #Syrie si l'#EI prend la prison de #Tadmour #Palmyre cela aura un retentissement inégalé sur l'inconscient populaire du monde arabe — Wassim Nasr (@SimNasr) 20 Mai 2015 »

Entre les murs, d'impitoyables tortures

Depuis les années 1980, elle est connue pour être un lieu de détention impitoyable. Le 26 juin 1980, un coup d’Etat des Frères musulmans tente de renverser Hafez el-Assad. Le lendemain matin, Rifaat al-Assad, frère du président, se rend dans la prison de Palmyre avec une soixantaine de soldats. Entre 500 et 800 détenus sont exécutés. Deux semaines auraient été nécessaires pour nettoyer les cellules.

Dans le pays, officiellement, la torture est interdite. Mais en 1987, un rapport d’Amnesty International indique que des milliers de prisonniers sont régulièrement soumis à des sévices. « Parmi les victimes, figurent aussi bien des étudiants et des avocats que des mères de famille ou des militaires. Quiconque s’oppose au gouvernement risque d’être torturé », note le rapport, qui évoque 35 méthodes de torture.

« A la prison de Palmyre, dans le désert d’Homs, où la chaleur est accablante et les conditions de détention déplorables, les prisonniers sont régulièrement fouettés, battus à coups de pied et de poing, brûlés avec des cigarettes lorsqu’ils entrent ou sortent de leur cellule, à l’heure des repas, et durant leurs "exercices" quotidiens. De plus, lorsqu’on les rase, toutes les trois à quatre semaines, on leur taillade le visage avec des lames de rasoir et des rasoirs à main. »

Les libérations de détenus, un objectif de Daesh

Plusieurs anciens prisonniers ont rapporté les conditions de vie épouvantables derrière les barreaux. C’est le cas de Bara Sarraj, qui a passé neuf ans dans la prison militaire. Il explique que l’enceinte était composée en deux sections. Une ancienne, construite par des militaires français dans les années 1930, et une nouvelle par Assad père dans les années 1970. C’est dans l’ancienne qu’étaient enfermés les partisans présumés des Frères musulmans.

« L’ancienne section comportait 24 chambres de différentes tailles. La capacité moyenne était de 100 personnes par chambre. Je vous laisse faire le calcul », rapporte-t-il à Middle East Voices. « A Tadmor, il n’y avait aucune trace de vie. Ni livre, ni radio, rien». Officiellement fermée en 2001, la prison, a rouvert ses portes dix ans plus tard avec Bachar al-Assad.

La libération de prisonniers est, pour les djihadistes, une manière de lutter contre le pouvoir du clan Assad. « Cela leur permet d’engranger d’éventuels nouveaux combattants et d'avoir une « bonne réputation » sur les populations locales, qui ont pu passer par ces cellules », ajoute Wassim Nasr. Il y a quelques jours, des images de l’EI montraient une libération de prisonniers à Ramadi. Difficile de savoir, ce jeudi, si les combattants de Daesh ont de nouveau libéré des détenus.

« #Syrie 27 prisonniers dont 5 #Liban-ais chrétiens emprisonnés depuis 35 ans à #Tadmor #Palmyre seraient libérés par l'Etat Islamique #EI — Wassim Nasr (@SimNasr) 21 Mai 2015 »