Syrie: L'ONU enquête sur les armes chimiques
CONFLIT•Niant toujours l'usage présumé de gaz toxiques, le président syrien Bachar al-Assad a mis en garde contre toute intervention étrangère...20 Minutes avec AFP
Des experts de l'ONU se sont rendus lundi sur le site d'une attaque présumée à l'arme chimique près de Damas, malgré les tirs essuyés par leur convoi, sur fond de tractations internationales concernant une possible intervention militaire contre le régime.Fustigeant les allégations de l'opposition et de certaines capitales occidentales concernant un usage présumé de gaz toxiques, le président syrien Bachar al-Assad a mis en garde contre toute intervention étrangère, l'estimant vouée à l'échec.
Après avoir essuyé des tirs, les enquêteurs de l'ONU sont finalement parvenus à se rendre à Moadamiyat al-Cham, une localité au sud-ouest de Damas tenue par les rebelles et cible mercredi, selon l'opposition, d'une attaque à l'arme chimique par le régime. Malgré «ces circonstances très difficiles», ils ont pu «visiter deux hôpitaux et parler à des témoins, des survivants, et des médecins et ils ont pu aussi recueillir des échantillons», a déclaré le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon.Il faudra «attendre un peu pour avoir le premier avis du Dr (Aake) Sellström», chef de l'équipe, sur ces éléments, a-t-il précisé. Dans des vidéos diffusées sur internet, les inspecteurs sont apparus dans ce qui semble être un hôpital de fortune, portant des casques bleus.
Un peu plus tôt dans la journée, ils avaient dû rebrousser chemin, le premier véhicule de l'équipe ayant «été délibérément touché à plusieurs reprises par des tirs de snipers non identifiés», avait indiqué un porte-parole de l'ONU, en ne faisant état d'aucun blessé. Alors que régime et rebelles se sont accusés mutuellement de ces tirs, M. Ban a émis une «ferme protestation» auprès des deux parties.
«Pressions psychologiques»
Répondant aux accusations sur un recours aux armes chimiques, le président Assad a estimé qu'il était «contraire au bon sens» de pointer du doigt son régime avant l'enquête. Il a aussi prévenu qu'en cas d'intervention militaire, «les Etats-Unis essuieraient un échec». «Les menaces occidentales de frappe contre la Syrie entrent dans le cadre de pressions psychologiques et politiques (...) mais nous sommes prêts à faire face à tous les scénarios», a par ailleurs affirmé à l'AFP un haut responsable au sein des services de sécurité syriens. Ces déclarations sont intervenues en pleines tractations sur une possible action militaire étrangère.
Le chef de la diplomatie britannique William Hague a estimé qu'il était «possible» de répondre à l'usage d'armes chimiques sans l'aval du Conseil de sécurité de l'ONU, tout en refusant de «détailler les options militaires» envisagées par les Occidentaux.Redisant sa conviction que le régime avait utilisé des armes chimiques le 21 août, il a jugé qu'une intervention serait possible pour des motifs de «détresse humanitaire».
Le secrétaire américain à la Défense Chuck Hagel a déclaré pour sa part que les forces américaines étaient prêtes à agir si nécessaire. «Il y a des signes forts en direction de l'utilisation d'armes chimiques» par le régime syrien, a affirmé un responsable américain aux journalistes voyageant avec Chuck Hagel.
Les occidentaux pourraient mener des frappes chirurgicales
Un autre responsable américain a affirmé à l'AFP que l'autorisation de Damas pour l'enquête --quatre jours après l'attaque présumée-- arrivait «trop tard pour être crédible, notamment parce que les preuves disponibles ont été largement altérées par les bombardements continus menés par le régime».
Pour autant, la Maison Blanche a démenti des informations du quotidien britannique Telegraph affirmant que Washington et Londres s'apprêtaient à lancer une action militaire commune «dans les prochains jours».
Pour le chef de la diplomatie française Laurent Fabius, les pays occidentaux décideront d'une réaction «dans les jours qui viennent», tandis que la Turquie s'est dite prête à rejoindre une coalition contre la Syrie, même sans consensus à l'ONU. Selon des experts, les pays occidentaux pourraient mener des frappes chirurgicales contre des intérêts stratégiques, sans pour autant s'engager dans une intervention de longue durée.
Mises en garde russe et iranienne
Mais la Russie, puissante et fidèle alliée du régime, a mis en garde contre une intervention militaire sans aval du Conseil de sécurité de l'ONU, estimant qu'elle serait «dangereuse» et constituerait «une violation illégale du droit international». Le président russe Vladimir Poutine s'est entretenu lundi par téléphone à ce sujet avec le Premier ministre britannique David Cameron, qui a écourté ses vacances. Autre allié du régime syrien, l'Iran a prévenu les Etats-Unis de «dures conséquences» en cas d'intervention, alors qu'un groupe palestinien proche du régime syrien a menacé de représailles.
La Chine a préconisé elle la «prudence, afin d'éviter toute ingérence». L'Allemagne a de son côté indiqué qu'elle approuverait une éventuelle «action» de la communauté internationale si l'usage d'armes chimiques était confirmé, tandis que l'Arabie saoudite exhortait le Conseil de sécurité de l'ONU à agir face aux «massacres effroyables» commis selon elle par les autorités syriennes.
Lundi, de hauts responsables militaires de pays occidentaux et musulmans ont entamé une réunion de deux jours en Jordanie pour discuter «des scénarios» possibles après les «dangereux développements» en Syrie, selon Amman. Y participe notamment le chef d'état-major inter-armées américain, le général Martin Dempsey. L'Irak a affirmé être opposé à l'utilisation de son espace aérien ou de son territoire pour toute opération contre la Syrie. Sur le terrain, les rebelles ont marqué un point lundi en coupant la seule voie d'approvisionnement de l'armée vers la province septentrionale d'Alep, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).