Ukraine: les observateurs de l'OSCE interdits de Crimée, Moscou brandit la menace gazière

Ukraine: les observateurs de l'OSCE interdits de Crimée, Moscou brandit la menace gazière

Des hommes armés brandissant des drapeaux russes ont interdit ...
© 2014 AFP

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Des hommes armés brandissant des drapeaux russes ont interdit vendredi l'accès à la Crimée à des observateurs de l'OSCE au moment où Moscou tend les bras à cette région d'Ukraine qui a annoncé un référendum pour son rattachement à la Russie, provoquant la colère des Occidentaux.


Moscou, soumis à des sanctions économiques et diplomatiques des Etats-Unis et de l'Union européenne, a menacé d'avoir recours à l'arme énergétique. Le géant public russe Gazprom a mis en garde Kiev contre une interruption de ses exportations de gaz si le nouveau pouvoir ne s'acquittait pas au plus vite de ses quelque deux milliards de dollars de dette.

En 2009, dans une situation similaire, Moscou avait fermé le robinet du gaz, perturbant du coup l'approvisionnement de plusieurs pays européens. Mais en 2014, l'Europe est moins exposée après un hiver doux et grâce à une diversité d'options de livraisons.

L'annonce a toutefois ébranlé les principales bourses européennes. Paris a cédé 1,15%, Londres 1,12%, mais c’est Francfort qui a subi la plus forte baisse, cédant 2,01%.

Pour la deuxième journée consécutive, les observateurs militaires de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), dépêchés en Ukraine à la demande du pouvoir ukrainien, ont été empêchés de pénétrer en Crimée par des hommes en armes, portant des treillis dépareillés, des cagoules et des fusils d'assaut et arborant des drapeaux russes.

Les 47 militaires non armés de 25 des 57 pays membres de l'OSCE sont arrivés à bord de deux cars près du village de Tchongar, l'un des deux points d'accès par la route à la péninsule. Ils étaient suivis par une cinquantaine de voitures remplies de partisans des autorités de Kiev portant des drapeaux ukrainiens bleus et jaunes qui ont formé une petite manifestation devant le barrage de contrôle.

L'un des observateurs, qui a demandé à rester anonyme, a confié à l'AFP qu'ils allaient «tenter de négocier avec ces gens». «Nous tentons simplement d'entrer en Crimée, en tant qu'invités du gouvernement ukrainien et sous mandat de l'OSCE», a-t-il ajouté.

Peu après, les observateurs de l'OSCE ont dû faire demi-tour, la tentative de négociation n'ayant rien donné. Ils doivent désormais décider s'ils tenteront une 3e fois de passer.

Pour sa part, Moscou a critiqué l’initiative de l'OSCE, estimant que l'organisation aurait dû «attendre» une «invitation officielle des autorités de Crimée».

La veille, c'est sur un autre accès à la Crimée que les observateurs avaient été contraints de rebrousser chemin par des hommes armés.

Ces observateurs ont pour mission de tenter de faire retomber la tension en Crimée, où les forces russes encerclent des bases militaires ukrainiennes et où le Parlement local a décidé de se séparer de Kiev et d'organiser le 16 mars un référendum de rattachement de la Crimée à la Russie.

- Manifestation à Moscou en soutien à la Crimée -

L'initiative du Parlement de Crimée a été saluée à Moscou par les présidents des deux chambres du Parlement, le président de la Douma (chambre basse) Sergueï Narychkine assurant qu'ils respecteraient le «choix historique» de la Crimée.

Les députés laissent ainsi entendre qu'ils voteront, sans surprise, en faveur de l'intégration de cette région, où vivent deux millions d'habitants, à l'immense Fédération de Russie.

Jeudi, le président ukrainien par intérim Olexandre Tourtchinov avait dénoncé le référendum annoncé, fustigeant «un crime contre l'Ukraine commis par les militaires russes».

A Moscou, une manifestation de soutien aux habitants de Crimée a réuni plus de 65.000 personnes, selon la police. Une délégation du Parlement de Crimée, qui a rencontré des parlementaires russes, a pris la parole devant la foule.

«La Russie ne nous laissera pas tomber», a lancé le président du Parlement de Crimée, Vladimir Konstantinov.

- Echec des négociations -

Sur la scène diplomatique, malgré d'intenses consultations depuis une semaine, Occidentaux et Russes n'ont pas réussi à trouver de porte de sortie pour la crise qui a éclaté fin février avec la prise de contrôle par des forces russes de la Crimée.

Après des tergiversations, Bruxelles et Washington ont finalement dégainé l'arme des sanctions diplomatiques et économiques.

Pendant son second très long entretien téléphonique avec Vladimir Poutine en moins d'une semaine, Barack Obama a déclaré que la Russie agissait en violation de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui conduisait les Etats-Unis «à prendre des mesures de représailles, en coordination avec ses partenaires européens».

Pour sa part, Vladimir Poutine a mis en garde son homologue américain contre le risque de «sacrifier» les relations américano-russes pour des «problèmes internationaux isolés, bien qu'extrêmement importants», selon le Kremlin.

Engagé dans la plus grave épreuve de force avec Moscou depuis la chute de l'URSS, le président américain a ordonné des restrictions de visas et autorisé des gels d'avoirs, visant potentiellement des responsables russes et ukrainiens.

Les dirigeants européens ont pour leur part suspendu les négociations sur les visas avec la Russie et menacé de prendre davantage de sanctions, notamment économiques, si la situation continuait à se détériorer.

- Moscou ne veut pas d'une Guerre froide -

A Sotchi, le président russe a déclaré espérer que les jeux Paralympiques d'hiver qui viennent de s'ouvrir contribuent à «apaiser les tensions».

Et dans la soirée, son porte-parole Dmitri Peskov a assuré que la Russie ne cherchait pas une nouvelle Guerre froide. «On voudrait l'éviter, j'espère qu'il n'en est pas ainsi, qu'elle n'a pas encore commencé et qu'elle ne commencera pas», a-t-il déclaré, soulignant qu'«il reste un espoir que le dialogue permettra de trouver des points d'accord».

Il a toutefois mis en doute la capacité de l'Union européenne à être un médiateur dans la crise, accusant les Européens de ne pas avoir respecté l'accord du 21 février signé à Kiev, prévoyant la formation d'un nouveau gouvernement d'unité nationale en Ukraine.

Jeudi, le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, a annoncé jeudi que l'UE allait signer les volets politiques de l'accord d'association avec Kiev avant l'élection présidentielle du 25 mai en Ukraine.

Le refus du régime du président Viktor Ianoukovitch, désormais déchu, de signer l'accord avec l'UE avait déclenché en novembre un mouvement de contestation, suivi d'une répression violente avec un bilan d'au moins 100 morts, une violence inédite dans l'histoire de la jeune Ukraine indépendante.

Cet article est réalisé par Journal du Net et hébergé par 20 Minutes.