Manolis Glézos, l'ex-résistant grec devenu "indigné"

Manolis Glézos, l'ex-résistant grec devenu "indigné"

A 18 ans, en 1941, il enlevait avec un compagnon le drapeau nazi ...
© 2012 AFP

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A 18 ans, en 1941, il enlevait avec un compagnon le drapeau nazi flottant sur l'Acropole dans une opération devenue légendaire. 71 ans plus tard, Manolis Glezos résiste toujours, cette fois contre la "tutelle" étrangère imposée à la Grèce pour la sauver de la faillite.

Figure emblématique de la gauche radicale grecque, Manolis Glézos, 89 ans, a formé tout récemment un mouvement avec le célèbre compositeur Mikis Théodorakis, 87 ans, "Résistance des Peuples Démocratiques Unis" (Elada), destiné à lutter contre les mesures d'austérité dictées aux Grecs par les bailleurs de fonds du pays.

Pour Manolis Glézos, l'histoire a commencé dans la nuit du 30 au 31 mai 1941 : les Allemands venaient de réduire la dernière poche alliée en Crète et "Hitler a dit dans un discours que +l'Europe est libre+. Nous voulions lui prouver que justement, le combat commençait", raconte-t-il à l'AFP.

"La Grèce a conquis sa liberté, mais pas son indépendance. Sur l'échelle de la sujétion, nous frôlons les 100%, pour tout ce sont les étrangers qui décident", assène ce pétillant octogénaire, faisant allusion à la situation financière actuelle du pays, dépendant de l'aide internationale.

Devant l'impossibilité d'accéder aux marchés, la Grèce espère un deuxième plan de soutien de l'Union européenne et du FMI, qui exigent en contrepartie des mesures d'austérité, violemment contestées dans les rues d'Athènes dimanche dernier.

Arrêté trois fois sous l'Occupation, Manolis Glezos a échappé au peloton d'exécution. "Un policier grec a contrôlé nos papiers pour violation du couvre-feu quand nous nous éloignions de l'Acropole, mais il n'a jamais parlé", raconte-t-il sans vouloir s'appesantir sur son acte de bravoure.

C'est aussi sans s'attarder qu'il mentionne l'exécution de son frère cadet, en 1944. Le portrait du jeune homme surplombe les amoncellements de livres, archives et souvenirs qui encombrent le modeste rez-de-chaussée que Manolis Glezos partage avec sa femme dans une banlieue d'Athènes.

Son engagement dans la résistance, puis son militantisme communiste, sous des régimes autoritaires et militaires, lui ont valu deux condamnations à mort et douze ans dans "presque toutes les geôles du pays".

"Beaucoup y sont devenus fous", note-t-il. Lui a dû interrompre ses études d'économie : "en prison, c'était assimilé à du marxisme".

Ancien membre du Parti communiste grec stalinien, qu'il a quitté en 1968, il est devenu une figure tutélaire de la gauche radicale.

Aujourd'hui, le militant souhaite une prise de relais par la jeunesse "pour descendre tous les drapeaux qui oppriment".

Mais, contrairement à de nombreux Grecs, hérissés par les exigences de rigueur de l'Allemagne en particulier, l'ex-résistant se garde de tout amalgame entre l'occupant d'hier et le sourcilleux partenaire d'aujourd'hui.

Pour lui, "l'ennemi, c'est le G20, l'union des impérialistes".

Pour se sortir de la crise, la Grèce devrait donc ne compter que sur elle : "ne plus consacrer un sou aux dépenses militaires", refuser de rembourser une dette qui n'est "pas légitime", s'en prendre à la fraude fiscale et aux "cumulards du secteur public", "mais en protégeant la santé, l'éducation, la recherche".

Et puis, quand même exiger de l'Allemagne qu'elle s'acquitte de son propre dû, en remboursant le prêt obligatoire au régime nazi, "la seule fois ou la Grèce a prêté au lieu d'emprunter" lance-t-il avec malice sous sa moustache.

"Avec les dommages de guerre", qu'Athènes se réserve toujours le droit de revendiquer, "c'est 162 milliards d'euros, sans les intérêts".

Dimanche, pendant les violentes manifestations qui ont enflammé Athènes, il était devant le Parlement au premier rang des contestataires, avec Mikis Theodorakis.

Après avoir reçu des jets de gaz lacrymogène envoyé par la police, les deux vieillards ont dû être soignés au centre médical du parlement. Ensuite, ils ont assisté, sur le banc des invités du gouvernement, à un débat "historique" au terme duquel les députés ont adopté le programme économique douloureux contre lequel Manolis Glézos et Mikis Théodorakis étaient venus manifester.

"Au début de l'occupation, la résistance était surtout passive. Quand on a escaladé l'Acropole, on n'en a pas croisé d'autres faisant la même chose. Mais jour après jour, nous sommes devenus plus nombreux. Maintenant aussi, le courant de résistance enfle", espérait Manolis Glezos en juin dernier.

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