RUSSIEAttentats meurtriers dans le métro de Moscou

Attentats meurtriers dans le métro de Moscou

RUSSIELes autorités russes accusent la rébellion islamiste dans le Caucase du Nord
Frédérick Lavoie

Frédérick Lavoie

De notre correspondant à Moscou,


Le moment et le lieu avait été choisis pour faire le plus de victimes possible: 7h57 et 8h36, un lundi matin, sur la ligne de métro la plus fréquentée. Ce lundi, deux attentats suicides perpétrés par deux femmes kamikazes ont fait 38 morts et plus de 60 blessés à Moscou. La première explosion a retenti à quelques centaines de mètres du Kremlin, un lieu hautement symbolique, dans la station Loubianka, cette station desservant le siège du FSB (ex-KGB). La deuxième explosion s'est produite sur la même ligne, à la station Park Koultoury. Même si le métro de la capitale russe n'avait pas connu d'attentats depuis plus de cinq ans, le modus operandi avait des airs de déjà vu. Selon les caméras de surveillance, l'une des deux kamikazes était «une jeune femme de 18-20 ans, au visage typique du Caucase et aux yeux marrons.»

Leur identité et leur passé n'avaient pas encore été déterminés lundi soir. Mais en août 2004, c'était déjà une femme qui s'était fait exploser à l'entrée de la station Rijskaïa, faisant 10 victimes. Des femmes avaient également participé, ceinturées d'explosifs, à la prise d'otages dans un théâtre de Moscou en 2002 (130 morts). À l'époque, elles avaient été surnommées les «veuves noires». Plusieurs avaient perdu un mari, un frère ou un père indépendantiste tchétchène, islamiste ou innocent, abattus par les forces de l'ordre russe lors d'opérations antiterroristes ou de «nettoyage». En quelques heures lundi, les autorités russes ont lié les deux femmes kamikazes aux rebelles du Caucase du Nord, qui appellent à la formation d’un État islamique indépendant dans cette région historiquement trouble.

«Une escalade de la violence n'est pas dans l'intérêt du pouvoir»

Plusieurs experts et officiels russes ont estimé, sous couvert d'anonymat, que ces attentats pourraient être une vengeance de la part des rebelles après l'intensification des opérations antiterroristes dans le Caucase au cours des derniers mois. En mars, trois des principaux leaders de la guérilla ont été tués par les forces russes.

Le Premier ministre russe et homme fort du pays, Vladimir Poutine, a promis lundi que les «terroristes» qui ont commandité les attentats seraient «anéantis». Dans la même veine, le président Dmitri Medvedev a indiqué que la lutte contre les «terroristes» se poursuivrait «sans compromis et jusqu'au bout».

Nikolaï Petrov, politologue au Centre Carnegie de Moscou, croit toutefois que l'intensification des opérations contre les rebelles peut s'avérer une arme à double tranchant pour le Kremlin. «Le pouvoir comprend qu'une escalade de la violence dans le Caucase n'est pas du tout dans son intérêt, particulièrement en prévision des Jeux olympiques de Sotchi de 2014» qui se dérouleront à quelques centaines de kilomètres de la Tchétchénie et de l'Ingouchie. Selon lui, le Kremlin doit surtout briser le «cercle vicieux» qui incite des jeunes du Caucase à prendre le maquis pour venger leurs proches, innocents ou vrais rebelles, tués par les forces russes. Sur la radio libérale Échos de Moscou, la chroniqueuse indépendante Ioulia Latynina, experte renommée du Caucase, a estimé lundi que le meilleur moyen d'empêcher ce genre d'attentats était d'offrir une «autre perspective d'avenir» aux jeunes des pauvres républiques du Caucase.

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Condamnation

Les dirigeants européens, Isrël, les Etats-Unis, l'Otan et l'ONU ont fermement condamné les deux attentats, et exprimé leur "solidarité" avec la Russie dans sa lutte contre le terrorisme. Depuis New York, Nicolas Sarkozy a appelé les démocraties à ne "pas se diviser" et à "travailler ensemble" pour lutter contre le terrorisme. Le maire de Moscou, Iouri Loujkov, a décrété une journée de deuil aujourd'hui dans la capitale russe. De son côté, la police de New York a renforcé "par précaution" ses mesures de sécurité dans le métro.