« une femme enceinte a un pied dans la tombe »

« une femme enceinte a un pied dans la tombe »

« Une femme enceinte a un pied dans la tombe et un pied sur la terre », affirme un dicton africain. C'est dire si la mortalité maternelle est monnaie courante sur le continent. Amnesty International se concentre sur la situation du Burkina Faso dans ...
Armelle Le Goff

Armelle Le Goff

« Une femme enceinte a un pied dans la tombe et un pied sur la terre », affirme un dicton africain. C'est dire si la mortalité maternelle est monnaie courante sur le continent. Amnesty International se concentre sur la situation du Burkina Faso dans un rapport qui paraît aujourd'hui : « Donner la vie, risquer la mort ». Petit Etat africain de 14 millions d'habitants, c'est l'un des plus pauvres du monde, mais aussi l'un des plus actifs en matière de politique publique.

Malgré tout, chaque année, 2 000 Burkinabés meurent en donnant la vie, soit 307 femmes pour 100 000 naissances. Les causes en sont connues : hémorragie, infection, rupture utérine, éclampsie (convulsion liée à une hypertension). Mais au-delà des chiffres, l'association pointe le drame social : « C'est une tragédie qui prive chaque année des milliers de familles d'une épouse, d'une mère, d'une soeur ou d'une fille. » Salvatore Saguès, co-auteur de l'enquête, raconte qu'entre elles les jeunes filles burkinabés se souhaitent « que jamais ce malheur [la grossesse] ne t'arrive dessus ».

Pourtant, ces décès pourraient facilement être évités si les droits des femmes étaient mieux respectés. C'est là toute l'originalité de ce rapport, qui analyse les dysfonctionnements du système de santé à l'aune des discriminations qui font le quotidien des femmes.

Premier écueil : leur statut. Considérées comme des « outils de reproduction », elles ne décident ni du moment, ni du nombre de leurs grossesses. D'autant plus si elles sont issues de milieux ruraux et pauvres. L'insuffisance numéraire, la vétusté et l'éloignement géographique des centres de santé expliquent ensuite les retards fatals dans l'accès au soin des parturientes. Le coût des soins constitue un autre facteur de danger pour leur santé. Enfin, la maltraitance que les personnels médicaux exercent est un obstacle à une bonne prise en charge. Non seulement les femmes sont parfois insultées et frappées, mais de nombreux témoignages font état du racket endémique qui sévit dans les structures de santé.

Raison majeure de ces insuffisances, le manque de moyens consacré à la santé des femmes : « L'argent dépensé pour lutter contre le sida, qui touche les hommes et les femmes, est incomparablement plus important que celui alloué à la maternité », note cet expert du dossier. Les autorités burkinabés ont salué un rapport « important et méticuleux » avant de promettre de s'attaquer au problème. W