PORTRAITPuigdemont, le gamin de Gérone qui rêve de l'indépendance de la Catalogne

Carles Puigdemont, le gamin de Gérone qui rêve de l'indépendance de la Catalogne

PORTRAITLe président catalan a fait de l'indépendance de la région le combat d'une vie...
Thibaut Chevillard

T.C. avec AFP

L'essentiel

  • Le président Catalan a assuré mercredi que son gouvernement s’apprêtait à déclarer l’indépendance de cette région de l’Espagne probablement « à la fin de la semaine ».
  • Il s’agit, pour Carles Puigdemont, du rêve d’une vie.

C’est un rêve de gosse. Une idée qui a germé dans la tête de Carles Puidgemont, issu d’une modeste famille de pâtissiers, qui a grandi dans un petit village de 2.200 habitants, à quelques kilomètres de Gérone. Le président catalan n’a jamais cessé d’imaginer qu’un jour, sa région serait un territoire indépendant. Un songe qui, aujourd’hui, n’est pas loin de devenir réalité pour cet homme politique de 54 ans qui en a fait le combat d’une vie.

Son engagement prend corps en 1981, alors qu’il étudie la philosophie catalane à l’université de Gérone. Cette année-là, le jeune Puigdemont participe à la refondation de la Jeunesse nationaliste de Catalogne, au sein de la Convergence démocratique de Catalogne, un parti de droite qui négociait à l’époque avec Madrid une plus grande autonomie de la régigon. L’année suivante, il se lance dans le journalisme et devient correcteur au sein du journal El Punt. Un titre qu’il finira par diriger.

« Il a toujours associé son militantisme politique », confie à l’AFP le journaliste de la radio Ser, Ramon Iglesias, originaire de Gérone. En 1991, Carles Puigdemont, âgé de 29 ans, travaillait alors dans un journal local de Gérone. Il avait déclenché une campagne pour changer le nom de la ville, de « Gerona » en espagnol à « Girona » en catalan, se souvient Ramon Iglesias.

« Cata… quoi ? »

Entre 1999 à 2002, Puigdemont devient directeur de l’Agència Catalana de Notícies, l’Agence catalane d’information et directeur de la revue anglophone Catalonia Today, qui contribuera à sa notoriété. C’est durant cette période qu’il publie Cata… què (« Cata… quoi ? »), un ouvrage présentant le point de vue de la presse internationale sur la Catalogne. Une thématique qu’il continue d’aborder dans les textes publiés dans la revue Presència.

En 2006, il entre enfin dans l’arène politique et se fait élire député au Parlement de Catalogne, sur la liste de la coalition Convergence et Union (CiU), à laquelle appartient CDC. Réélu en 2010, il devient l’année suivante maire de Gérone. L’édile demande en 2014 que Leonor, la fille du nouveau roi Felipe VI, n’utilise pas le titre de « princesse de Gérone » qui devrait lui revenir en tant qu’héritière du trône d’ Espagne. Silvia Paneque, élue socialiste à Gérone, voit dans cette requête la preuve d’un nationalisme qui « s’entête à séparer partisans et non partisans du projet indépendantiste ».

Ces convictions bien ancrées en ont fait « le candidat idéal » pour succéder, en 2015, à l’ancien président Artur Mas, dont le profil de récent converti au séparatisme et les politiques d’austérité braquaient les indépendantistes de gauche, explique le journaliste Enric Juliana. « Puigdemont est une personne plus directe, avec les idées claires, plus tournée vers l’action », souffle un membre de son parti.

Un rêve « à portée de main »

Il n’a pas hésité à promouvoir l’organisation d’un référendum d’autodétermination qui ne faisait pas l’unanimité dans son parti ou à pousser à la démission quatre membres de son gouvernement jugés trop timorés vis-à-vis du duel avec Madrid. « Il n’aspirait pas à une carrière politique et ça lui donne une énorme liberté », estime son ami, l’écrivain Antoni Puigverd.

Quasi inconnu il y a deux ans, cet homme à l’épais casque de cheveux bruns qui cache une cicatrice due à un grave accident de voiture est devenu l’ennemi numéro un du gouvernement conservateur de Mariano Rajoy. Son rêve d'indépendance, n'a jamais été aussi proche de se réaliser. Il l'a encore partagé avec ses partisans, il y a quelques jours, lors d’un meeting de fin de campagne pour la consultation d’autodétermination. « En ces heures de veille, en ces moments si intenses et si émouvants, nous nous rendons compte que ce qui n’était qu’un rêve jusqu’à récemment, nous l’avons maintenant à portée de main. »