Mossoul: L'arrestation d'une Française et ses quatre enfants au cœur d'un imbroglio franco-irakien
TERRORISME•Retrouvés dans les ruines de Mossoul (Irak) le 8 juillet, une Française et ses quatre enfants en bas âge souhaitent être rapatriés en France...Vincent Vanthighem
L'essentiel
- Une Française et ses quatre enfants ont été retrouvés à Mossoul, le 8 juillet.
- Ils demandent leur rapatriement dans l’Hexagone, par la voix de leur avocat.
- Le Quai d’Orsay indique qu’ils pourraient être jugés sur le sol irakien.
Commencer par savoir où ils se trouvent, s’ils sont en bonne santé… Le ministère des Affaires étrangères a indiqué, ce mercredi midi, avoir effectué des « démarches officielles auprès des autorités irakiennes (…) afin de connaître le lieu de détention » d’une Française et de ses quatre enfants retrouvés et arrêtés, le samedi 8 juillet, dans les décombres de Mossoul (Irak).
Après avoir chassé Daesh de la ville, les forces antiterroristes irakiennes avaient découvert dans la cave d’un immeuble en ruine, près du marché aux poissons, une jeune Française très amaigrie portant un nourrisson de cinq mois dans les bras. A ses côtés, se trouvaient aussi trois enfants de 3, 5 et 8 ans.
Selon son récit reconstitué par Le Monde, la jeune femme serait arrivée à Mossoul, via Raqqa (Syrie), en octobre 2015 dans le but de connaître « l’expérience du califat » avec ses enfants et son mari. Elle prétend que ce dernier n’a jamais pris les armes pour le compte de Daesh et qu’il n’a plus donné de nouvelles depuis qu’il est parti chercher de l’eau, quelques heures avant l’arrestation de sa famille.
« Ce qui m’importe, c’est qu’ils soient rapatriés »
Les autorités françaises, elles, n’excluent pas qu’il soit mort dans les récents combats. Cet homme ne leur est pas inconnu. « Ce n’est pas vraiment un civil qui a refusé de combattre », confie ainsi une source judiciaire. Selon nos informations, il a, en effet, été condamné, en son absence, le 15 mars 2016 à quatre ans de prison pour « association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste » et était également visé par une deuxième enquête judiciaire, toujours pour des faits de terrorisme.
« Je ne veux pas m’exprimer au sujet de cet homme. Moi, je défends sa femme et ses enfants, confie l’avocat William Bourdon. Et, ce qui m’importe, c’est qu’ils soient rapatriés en France ! » Sauf que ce n’est pas aussi simple que cela.
L’intérêt des Irakiens à les juger sur place
Très frileux sur le retour en France de possibles djihadistes, le Quai d’Orsay s’est bien gardé de prendre position sur un éventuel rapatriement de cette famille française. Il indique même dans son communiqué que cette femme et ses enfants pourraient être « poursuivis par les juridictions irakiennes » et bénéficieraient alors « du droit à la protection consulaire » là-bas.
Soucieux de présenter Daesh comme l’émanation d’un complot venu de l’étranger, l’Irak aurait un intérêt de politique intérieure évident à juger cette femme sur son sol. Évoquant la peine de mort sur place, William Bourdon fait donc tout pour éviter cela. « Là-bas, la situation humanitaire est tragique. Nous œuvrons donc pour qu’elle rentre en France avec ses enfants. Elle s’expliquera devant un juge d’instruction et nous l’assisterons pour cela. Mais, au moins, ses enfants seront placés et à l’abri… »
57 mineurs ont été rapatriés en France depuis 2013
Ce ne serait pas la première fois. Selon les chiffres communiqués à 20 Minutes par l’Unité de coordination de la lutte antiterroriste (Uclat), 57 mineurs présents sur la zone de conflit sont rentrés en France depuis 2013. Dont une douzaine depuis janvier. « Ils ont été systématiquement placés dans une structure d’accueil dès leur retour. » William Bourdon précise déjà, à ce propos, qu’il a pris contact avec les grands-parents des enfants et que ceux-ci sont « d’accord pour les accueillir chez eux en région parisienne ».
Il y aurait actuellement 1 200 Français en Syrie et en Irak dont 500 mineurs (une centaine seraient nés sur place). Dix-huit d’entre eux auraient choisi de prendre les armes au nom de Daesh.