Désaccord sur le climat, fermeté de Macron, double discours… Que retenir de ce G7 de Taormina ?
DIPLOMATIE•Après deux jours de négociations en Sicile, le G7 s'est achevé sans accord sur le climat samedi...O.G.
L'essentiel
- C'est dans un cadre idyllique que les dirigeants des sept pays les plus riches du monde se sont rencontrés à Taormina pour parler vendredi et samedi des grands enjeux actuels
- S'ils ont facilement trouvé un consensus sur le terrorisme, la pomme de discorde reste le climat. Car Donald Trump ne semble pas disposé à respecter l'accord de Paris.
- C'était un premier G7 pour Emmanuel Macron, qui s'est montré ferme mais optimiste sur Donald Trump... et amical avec Justin Trudeau
Un 43e rendez-vous du G7 particulièrement atypique… et peu productif. Les dirigeants des Etats-Unis, Grande-Bretagne, France, Allemagne, Japon, Canada et Italie se sont réunis vendredi et samedi dans le cadre magnifique de Taormina en Sicile pour parler terrorisme, climat, migrants… Mais à l’issue de ces discussions, rien de concret ou presque. Petit tour des événements qui ont marqué ce rendez-vous diplomatique de haute volée.
Pas d’accord sur le climat
Samedi, le sommet s’est terminé sur un échec. Pour la première fois de son histoire, l’unité du G7 s’est brisée sur la question cruciale du climat, face à un Donald Trump plus résolu que jamais à jouer sa partition. En dépit des pressions répétées des Européens (Allemagne, France, Italie, Grande-Bretagne et Union européenne), du Canada et du Japon, Donald Trump est resté de marbre. « Les Etats-Unis d’Amérique sont en train de réévaluer leur politique sur le changement climatique et sur l’Accord de Paris et ne sont donc pas en mesure de rejoindre le consensus sur ce sujet », indique la déclaration finale.
Restera ou restera pas dans l’Accord de Paris ? Trump prend son temps. « Je prendrai ma décision finale sur l’accord de Paris la semaine prochaine ! », a-t-il tweeté samedi.
aQu’est ce que ça changerait ? L’accord de Paris, conclu en novembre 2015, vise à contenir la hausse de la température mondiale sous la barre des 2°C par rapport aux niveaux préindustriels. Les Etats-Unis pourraient sortir purement et simplement de cet accord âprement négocié ou rester mais annoncer une révision à la baisse de leurs objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre.
Deux versions distinctes
Faute de consensus à commenter, les observateurs ont observé avec attention l’ambiance de ce sommet. Pour Trump comme pour Macron, ce G7 était une première. Et Emmanuel Macron a choisi l’amabilité et l’optimisme : il a décrit Donald trump comme « pragmatique, ouvert ».
« J’ai vu un dirigeant qui a des convictions fortes, dont je partage une partie, comme sur le terrorisme et la volonté de tenir notre rang dans le concert des nations. Et avec lequel j’ai des désaccords », a-t-il lancé lors d’une conférence de presse à l’issue du sommet de deux jours à Taormina (Italie).
Autre son de cloche du côté de la chancelière allemande : « Toute la discussion sur le climat a été insatisfaisante » et « difficile », a critiqué Angela Merkel. Un double discours qui n’a pas manqué d’étonner certains politiques, notamment Benoît Hamon…
Mais un consensus sur le terrorisme
Dès vendredi, les dirigeants du G7 ont facilement trouvé un terrain d’entente sur la lutte contre le terrorisme, après l’attentat meurtrier de Manchester.
Dans une déclaration commune, le G7 il accentue la pression sur les grands groupes internet pour qu’ils luttent davantage contre les contenus radicaux, à la demande de la Grande-Bretagne. Le G7 a également exprimé son inquiétude face au retour des combattants étrangers, particulièrement après l’attentat de Manchester commis par un Britannique d’origine libyenne qui pourrait s’être rendu en Syrie après une visite en Libye.
Une poignée de main très commentée
C’est un détail… largement commenté. Fermeté et virilité ne font visiblement pas peur au nouveau Président français. Alors qu’il rencontrait pour la première fois Donald Trump jeudi à Bruxelles, la veille du G7,Emmanuel Macron a surpris en soutenant pendant cinq secondes la poignée de main vigoureuse et appuyée, yeux dans les yeux
Bras de fer ou diplomatie muette ? En tout cas, Emmanuel Macron ne laisse rien au hasard. « Ma poignée de main avec lui, ce n’est pas innocent, ce n’est pas l’alpha et l’oméga d’une politique mais un moment de vérité », confie ce dimanche au JDD le nouveau Président. « Il faut montrer qu’on ne fera pas de petites concessions, même symboliques, mais ne rien surmédiatiser non plus », précise Emmanuel Macron. « Donald Trump, le président turc ou le président russe sont dans une logique de rapport de forces, ce qui ne me dérange pas. Je ne crois pas à la diplomatie de l’invective publique mais dans mes dialogues bilatéraux, je ne laisse rien passer, c’est comme cela qu’on se fait respecter », assure le Chef de l’Etat. Une attitude qu’il devrait garder lundi pour sa rencontre avec Vladimir Poutine à Versailles…
Le show Macron-Trudeau
Les G7 ont un autre enjeu : c’est l’une des rares occasions où les dirigeants du monde se rencontrent physiquement et peuvent se mesurer, échanger, créer des liens. Et le président français s’est déjà fait un ami en la personne du Premier ministre canadien Justin Trudeau.
« Assis à la même table qu’Emmanuel Macron pour la première fois, nous parlons emploi, sécurité et climat, j’ai hâte d’avoir d’autres conversations, mon ami », a affirmé sur Twitter Justin Trudeau, lui aussi né dans les années 1970.
Emmanuel Macron a lui-même twitté des images des deux hommes devisant, tout sourire, sous une petite brise au milieu des fleurs sur fond de mer Méditerranée.
De quoi faire fondre internet, où les commentaires ont fleuri sur cette apparente « bromance », ou romance fraternelle, entre deux dirigeants considérés comme parmi les plus photogéniques du moment.
La Russie, grande absente et sujet de débat
Elle en est bannie… mais reste omniprésente. La Russie, qui a été exclue du G8 depuis la crise ukrainienne, a beaucoup fait parler d’elle à Taormina. Le G7 s’est en effet dit prêt à prendre des sanctions supplémentaires contre Moscou, en raison de sa « responsabilité » dans le conflit ukrainien.
Autre point de tension : la Syrie. Les pays membres du G7 se sont déclarés « prêts à travailler » avec la Russie, alliée indéfectible du régime de Damas, pour trouver une solution politique au conflit syrien. « Nous pensons qu’il y a une occasion de mettre un terme à cette crise tragique. Aucun effort ne sera épargné » pour stopper le conflit, selon la déclaration, qui réitère la nécessité d’un « processus politique inclusif sous l’égide de l’ONU ». Autant dire que les discussions entre Macron et Poutine lundi à Versailles seront scrutées avec attention...