Attentat d'Istanbul: La Turquie est-elle une destination touristique à risques?
SÉCURITÉ•L'aéroport international Atatürk d'Istanbul a été la cible d'une attaque kamikaze qui a fait au moins 41 morts et 239 blessés mardi...L.C.
La Turquie a été frappée mardi soir par la cinquième attaque kamikaze perpétrée sur son territoire en un an. L’aéroport international Atatürk d’Istanbul, porte d’entrée du tourisme, a été frappé. Au moins 41 personnes ont trouvé la mort et 239 ont été blessées dans cette ville, la plus visitée du pays. Alors que les vacances d’été débutent à peine, la Turquie est-elle une destination sûre pour les voyageurs ?
Le quai d’Orsay appelle à la vigilance
Depuis l’attentat suicide survenu mardi soir, le ministère des Affaires étrangères a publié un message dans la rubrique « Dernière minute » de ses conseils aux voyageurs, indiquant que « de fortes perturbations du trafic aérien sur Istanbul sont à prévoir dans les heures voire les jours qui viennent ». « Veuillez éviter la zone de l’aéroport et prévenez, le cas échéant, vos familles », poursuit le quai d’Orsay.
Pour l’heure, la grande majorité du territoire turc reste classée par Paris dans la catégorie « vigilance normale ». En revanche, les abords immédiats des frontières avec la Syrie et l’Irak sont « formellement déconseillés » (en rouge) et les départements du Sud et du Sud-Est sont « déconseillés sauf raison impérative » (en orange), en raison du conflit en Syrie et des affrontements entre les forces de sécurité turques et les rebelles kurdes du parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). En dehors de ces zones, le quai d’Orsay ne déconseille pas de séjourner dans le pays mais il conseille « vivement (…) de faire preuve d’une très grande vigilance dans [les] déplacements, en particulier dans les quartiers touristiques et dans tous les lieux de forte affluence ». Les villes d’Ankara et Istanbul sont concernées par l’appel à la « vigilance renforcée » du ministère.
a« Les lieux les plus touristiques sont des cibles privilégiées »
Dans le contexte actuel, faut-il annuler ses projets de vacances en Turquie ? Interrogé par 20 Minutes, Alican Tayla, spécialiste de la Turquie et enseignant en relations internationales à l’université Paris 13, déconseille la destination aux touristes. « Les risques sont objectivement trop élevés, les chiffres parlent d’eux-mêmes ». En deux ans, plus de 200 personnes ont trouvé la mort dans 14 attaques terroristes, perpétrées par des rebelles kurdes ou par l’organisation terroriste Etat islamique, selon un décompte du New York Times.
Au sujet de l’attentat de mardi à l’aéroport Atatürk, « on est sous le choc mais on n’est pas étonné », juge Alican Tayla. « Alors que la menace terroriste s’est accrue ces dernières années, les mesures de sécurité n’ont pas été renforcées, du moins pas de manière visible », estime-t-il. Si le Sud-Est du pays et la ville d’Ankara ont été particulièrement visés par les terroristes depuis le début de l’année, trois attentats ont eu lieu à Istanbul : à Sultanahmet, dans le centre historique [12 touristes allemands tués le 12 janvier], sur l’avenue Istiklal, une grande artère piétonne commerciale [4 morts le 19 mars] et dans le quartier historique de Vezneciler, près du Grand Bazar [12 morts le 7 juin]. « Les lieux les plus touristiques sont devenus des cibles privilégiées », observe le chercheur.
Des risques à relativiser
Ajouté à la guerre en Syrie, voisine de la Turquie, à la crise des migrants et aux tensions avec Moscou, le risque terroriste a plombé le secteur du tourisme. Les réservations sont en baisse depuis plusieurs mois selon les professionnels du secteur interrogés par 20 Minutes. « La demande a considérablement chuté ces derniers mois », explique Alain Capestan, PDG du groupe Voyageurs du monde. Il y a deux ans, un million de Français séjournaient chaque année dans le pays selon le cabinet d’étude Protourisme. « Il y aura des annulations, d’autant plus que l’on entre dans la saison touristique, prisée des familles, qui ne veulent pas prendre de risques », souligne son directeur Didier Arino, qui estime que la Turquie est désormais une destination plus risquée que la Tunisie.
Des inquiétudes qu’Alain Capestan souhaite toutefois relativiser. « Il y a une mondialisation des actes terroristes. Paris, Bruxelles, Copenhague ont notamment été frappées. La probabilité qu’un touriste soit touché par un attentat en Turquie reste extrêmement faible, même si elle n’est jamais égale à zéro », tempère-t-il.