Brésil: l'étoile rouge du PT de Lula et de Rousseff a pâli

Brésil: l'étoile rouge du PT de Lula et de Rousseff a pâli

L'étoile rouge, symbole du Parti des Travailleurs (PT-gauche) de l'ancien président Lula et de Dilma Rousseff, décline car elle est désormais associée à la corruption, mais elle n'est pas éteinte pour autant, affirment des experts.
© 2016 AFP

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L'étoile rouge, symbole du Parti des Travailleurs (PT-gauche) de l'ancien président Lula et de Dilma Rousseff, décline car elle est désormais associée à la corruption, mais elle n'est pas éteinte pour autant, affirment des experts.

Treize ans après son élection - le plus grand cycle d'un parti au pouvoir après la dictature (1964-85) - le «parti de l'éthique» a vu sa trajectoire brutalement interrompue par le Sénat qui a accepté l'ouverture d'un procès en destitution de Mme Rousseff, 68 ans, pour maquillage des comptes publics.

Ecartée du pouvoir pour six mois avant son jugement final, ses chances de retour sont pratiquement nulles.

C'est son vice-président Michel Temer, 75 ans, qui a pris son fauteuil pour former un gouvernement de transition qui pourrait durer jusqu'à la prochaine présidentielle de 2018 quand un candidat du PT pourra se présenter à nouveau.

«Le PT a le meilleur maillage des partis avec des représentants dans 98% des villes. Cette grande force d'organisation ne finit pas du jour au lendemain», déclare à l'AFP le professeur de Sciences Politiques de l'Université du Parana, Adriano Codato.

Il prévoit que le PT va subir «une hécatombe» lors des municipales d'octobre car sa «marque» est maintenant associée à la corruption et il apparaît depuis des mois comme «le plus grand mal de la politique brésilienne dans la presse».

- «Racisme de classe» -

«Le PT a été victime aussi bien de ses erreurs, comme ses problèmes de corruption qu'il n'a pas résolus, que de ses succès, à l'image des quotas pour les Noirs à l'Université qui ont alimenté un +racisme de classe+ contre le gouvernement», lance-t-il.

La classe moyenne, qui soutenait le PT parce qu'il dénonçait la corruption, l'a abandonné car sa politique a «bénéficié aux plus pauvres et aux plus riches». «En tant que professeur, je paye 27,5% d'impôt sur le revenu. Si j'étais rentier, si j'avais 15 appartements loués, je ne paierai que 8%», dit-il à titre d'exemple.

Les manifestations massives de juin 2013 contre le coût de la Coupe du monde et pour de meilleurs services publics avaient tiré la sonnette d'alarme sur un malaise ambiant qui n'a pas été pris en compte.

Le PT aurait dû «au moins faire son autocritique», juge M. Codato.

Tarso Genro, 69 ans, ex-ministre PT de Lula et cacique du Rio Grande do Sul (sud), est l'un des rares membres du PT à prôner une «refondation».

«Le PT a perdu l'occasion de se refonder lors de son dernier Congrès (juin 2015) où a encore prévalu l'option politicienne de se maintenir au pouvoir à tout prix», juge-t-il dans un mail à l'AFP.

Il milite pour un retour du PT aux bases idéologiques, «l'examen de ses succès, qui ont été nombreux, et aussi de ses erreurs et limites, pour faire face à cette nouvelle phase de mondialisation libérale dominée et dirigée par le capital financier», explique Tarso Genro.

- Réorganiser la gauche -

Lula, l'icône de la gauche latino-américaine, serait-il en mesure de sauver son parti ?

Avec 20% d'intentions de vote, il est en tête des sondages pour la présidentielle de 2018 et reste l'épouvantail de la droite. Mais il suscite aussi un important rejet.

M. Genro, avocat de formation, ignore «si Lula veut être candidat ou s'il en aura les conditions légales» puisque le parquet a demandé une enquête sur l'ex-président dans le cadre du scandale de corruption Petrobras.

Il pense que les «persécutions» subies par Lula avaient pour but de «le retirer de la course présidentielle» pour 2018.

A cette échéance, il faut que le PT «réorganise la gauche unifiée pour présenter un programme alternatif aux réformes néolibérales que M. Temer veut entreprendre», souligne-t-il.

Fort de son projet politique qui a permis à 40 millions de Brésiliens de sortir de la misère, «le PT peut se reconstruire car il a une bonne ossature mais il va devoir se renouveler», renchérit Fabio Malini, de l'Université fédérale du Parana (sud).

«Le principal héritage du PT est une meilleure distribution des revenus mais il va devoir reprendre un programme qu'il a abandonné depuis longtemps», ajoute-t-il.

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