Tsipras, un politique doué mis au défi de regagner la confiance des Grecs

Tsipras, un politique doué mis au défi de regagner la confiance des Grecs

En janvier, il avait séduit les Grecs à la seule force du verbe, ...
© 2015 AFP

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En janvier, il avait séduit les Grecs à la seule force du verbe, devenant le premier dirigeant de gauche radicale en Europe. Sept mois et un demi-tour politique plus tard, Alexis Tsipras doit retrouver cette confiance, un défi à sa portée d'habile politique.

Lesté par six mois d'harassantes négociations avec la zone euro et le FMI pour maintenir la Grèce à flot et dans l'euro, et de louvoiements entre rebelles de gauche et une droite en embuscade, le dirigeant charismatique au sourire juvénile s'est un peu alourdi ces derniers temps, signe peut-être d'une pointe de lassitude.

A l'image de son électorat, appelé pour la troisième fois depuis janvier à donner à ce pourfendeur de la vulgate néolibérale l'assise qu'il revendique pour réformer en profondeur la Grèce et tourner la page de la crise où elle s'englue depuis 2010. Lâché par son aile gauche, qui l'a privé de majorité parlementaire, M. Tsipras a forcé ce scrutin en démissionnant le 20 août au nom d'une nécessaire reconquête de légitimité.

A 41 ans seulement, le benjamin de la classe politique grecque reste crédité dans les sondages, face à son sexagénaire rival conservateur Evangélos Meïmarakis, d'être le plus apte à gouverner. Une reconnaissance de l'aplomb, du sang-froid et du talent manoeuvrier dont il a su faire preuve, même à contre-cœur, jusque dans les capitales européennes.

Militant dès le lycée, en commençant par les Jeunesses communistes, le chef de Syriza peut encore se prévaloir d'une intégrité qui tranche avec la réputation de la classe politique en Grèce. Et reste fidèle dans sa vie personnelle à ses engagements : cravate en aucune circonstance, pas de mariage, une prestation de serment sur sa conscience plutôt que sur la «sainte trinité» : les arrangements avec le pouvoir semblent glisser sur cet ingénieur civil, qui vit toujours maritalement, dans un pays où la tradition du mariage reste forte, avec une ancienne camarade de lycée, mère de ses deux fils.

- «La lutte continue» -

Mais la vague d'enthousiasme et d'espoir qui l'avait propulsé au pouvoir en janvier, sur la promesse d'en finir avec l'austérité et la tutelle des créanciers, est retombée d'un coup lorsque, le 13 juillet, il a dû donner son accord à un troisième plan de sauvetage financier de son pays en contrepartie d'une nouvelle liste de réformes et mesures d'économie. Alors qu'il avait fait campagne sur «la fin des memorandums».

Et que la semaine précédente, les Grecs avaient rejeté à 62% les recettes d'austérité UE-FMI à l'issue d'un référendum orchestré par Alexis Tsipras lui-même.

Une victoire éclatante et rétrospectivement embarrassante, en plein milieu d'une quinzaine de jours de tension extrême avec les créanciers du pays, marquée par l'instauration d'un contrôle des capitaux, toujours en vigueur, et des menaces très précises de sortie de la Grèce de l'euro, que seule la capitulation du 13 juillet a permis d'éviter.

Ce n'est que cette semaine-là, en sept mois de rebondissements quotidiens, discours enflammés, rencontres tendues, débats parlementaires sans fin, et généralement nocturnes, qu'on a pu distinguer sur le visage de M. Tsipras ce qui ressemblait à un peu de tension ou de fatigue.

Rien ne semble devoir abattre cette machine politique. Face aux électeurs, il a expliqué avoir dû céder et signer un pacte financier «très douloureux» par la puissance des «forces asymétriques» contre lesquelles il a dû batailler dans une Europe majoritairement à droite et adepte de l'orthodoxie budgétaire à l'allemande. Il affirme avoir choisi de mettre «l'intérêt du peuple grec au-dessus de tout».

Surtout, il revendique encore une marge de manoeuvre pour mettre en oeuvre avec plus d'équité, de justice sociale et d'efficacité, les engagements contractés auprès des bailleurs de fonds, et négocier, dès cet automne, une restructuration de la dette grecque.

«La lutte continue» a lancé lors du premier débat de campagne cet admirateur de Che Guevara, qui s'était hissé dès 33 ans à la tête de la nébuleuse de fractions eurocommunistes et altermondialiste du Synaspismos pour en faire, sous le nom de Syriza, un parti de gouvernement dont le succès n'était pas garanti d'avance.

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