La crise au Burundi en quatre questions

La crise au Burundi en quatre questions

Le Burundi votait mardi dans un climat de tension extrême pour ...
© 2015 AFP

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Le Burundi votait mardi dans un climat de tension extrême pour une élection présidentielle où la victoire du chef d'Etat sortant Pierre Nkurunziza est assurée, en raison du boycott de l'opposition, après trois mois de crise politique émaillée de violences meurtrières.

QU'EST-CE QUI A DECLENCHE LA CRISE?

L'officialisation le 25 avril de la candidature du président Pierre Nkurunziza à un troisième mandat a déclenché dès le lendemain des manifestations, quasi quotidiennes jusqu'à ce que la répression parvienne, mi-juin, à les étouffer.

Interdites, ces manifestations, concentrées à Bujumbura et dans quelques localités de province, ont été marquées par des affrontements avec la police et sévèrement réprimées, parfois à balles réelles, avec un bilan estimé de 80 morts..

Un coup d'Etat militaire a même été déjoué mi-mai.

La crise couvait depuis plusieurs mois, l'opposition dénonçant les velléités du président de se représenter mais aussi la restriction de l'espace démocratique, le climat de terreur entretenu par les Imbonerakure (membres de la ligue de jeunesse du parti au pouvoir CNDD-FDD) et la captation partisane de l'organisation des scrutins.

La Cour constitutionnelle a validé la candidature de M. Nkurunziza mais le vice-président de l'institution a fui le pays, affirmant que les magistrats avaient subi des pressions pour signer un document rédigé d'avance.

Opposition et société civile ont déjà boycotté les élections législatives et communales qui se sont tenues le 29 juin et qui ont été largement remportées par le parti au pouvoir et ses alliés. Elles boycottent à nouveau la présidentielle, jugeant les conditions pour des élections crédibles pas remplies.

QUELS ENJEUX POUR LA CRISE?

Selon les contestataires, un nouveau mandat de M. Nkurunziza, élu en 2005 et 2010, viole la Constitution et l'Accord d'Arusha qui avait permis la fin de la guerre civile ayant opposé, entre 1993 et 2006, l'armée alors dominée par la minorité tutsi (environ 15% de la population) et des groupes rebelles hutu (environ 85%).

En faisant fi de l'Accord d'Arusha, le président met en péril à terme le savant équilibre ethnique que le texte consacre au sein du pouvoir et des institutions et qui a apporté 10 ans de paix au Burundi, après des décennies de massacres entre Hutu et Tutsi.

Au-delà des autres motifs de colère contre M. Nkurunziza (autoritarisme, répression de toute contestation, échec de la lutte contre la pauvreté, corruption...), c'est le maintien d'Arusha en tant que socle démocratique au Burundi qui est en jeu, selon les observateurs.

UNE CRISE ETHNIQUE?

Des cadres du CNDD-FDD ont accusé les Tutsi d'alimenter la contestation. Certes, la société civile, en pointe dans l'animation de la contestation, est dominée par des Tutsi et ce sont eux qui ont le plus à perdre d'une remise en cause d'Arusha, «leur assurance-vie», selon un analyste.

Mais le front anti-Nkurunziza transcende les lignes ethniques: l'opposition réunit des partis hutu et tutsi et son principal opposant, Agathon Rwasa, est le chef historique des FNL, la plus ancienne rébellion hutu.

Le chef de l'Etat est contesté jusque dans les rangs du CNDD-FDD, dont certains cadres frondeurs ont fui le pays. Quant au chef du coup d'Etat militaire avorté des 13 et 14 mai, le général hutu Godefroid Niyombare, il fut l'un de ses compagnons d'armes dans la rébellion qu'était le CNDD-FDD pendant la guerre civile.

Mais à l'approche des élections, des observateurs craignent une instrumentalisation des anciens antagonismes Hutu-Tutsi, toujours dans les esprits.

QUELLES PERSPECTIVES?

La fuite en avant d'un pouvoir de plus en plus isolé, sourd aux pressions internationales, privé de financement par ses bailleurs, semble réelle. Et une partie des adversaires de M. Nkurunziza, opposants échaudés par l'échec d'une contestation pacifique et contraints à l'exil ou putschistes en fuite, pourraient être tentés par les armes, selon des observateurs.

Un retour de la violence à grande échelle pourrait déstabiliser la région des Grands Lacs, qui a connu son lot de conflits depuis deux décennies. Plus de 160.000 Burundais ont déjà trouvé refuge dans les pays voisins.

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