Crise des migrants: «La société hongroise n'a jamais été aussi polarisée»
INTERVIEW•Depuis vingt ans, l'association Menedék tente de venir en aide aux réfugiés, dans un contexte politique de plus en plus difficile...Propos recueillis par Hélène Sergent
De notre envoyée spéciale en Hongrie
András Kováts dirige l’association Menedék à Budapest. Née en 1995, l’organisation accompagne migrants et réfugiés en Hongrie. Une mission de plus en plus difficile à accomplir au regard de la politique restrictive menée par le gouvernement hongrois en matière d’asile.
Comment la politique migratoire hongroise a-t-elle évolué ces dernières années ?
Au début des années 2000, la Hongrie était plutôt ouverte vis-à-vis des demandeurs d’asile et des réfugiés, la situation économique était bonne et le nombre d’arrivées était bien plus faible, entre 1.000 et 2.000 par an. 2010 a marqué un tournant politique avec l’arrivée de la droite conservatrice au pouvoir. Le gouvernement a tenté de restreindre autant que possible ce droit fondamental qu’est le droit d’asile. Tout a été fait pour rendre les démarches plus complexes. Après cette période de restriction, s’est suivie une période plus ambiguë pour contenter les observateurs internationaux qui ont condamné ce durcissement. La seule constante notable reste le manque d’organisation, de vision et de volonté de la classe politique en matière d’asile.
Quel impact cette crise migratoire a-t-elle sur la société hongroise ?
La société hongroise est de plus en plus polarisée. Ceux qui n’étaient pas favorables à l’accueil des réfugiés et demandeurs d’asile sont devenus encore plus hostiles à ces populations. Et à l’inverse, les Hongrois qui se sentaient concernés par cette crise sont devenus de plus en plus actifs au sein des associations. La médiatisation de la construction de la barrière a participé à la radicalisation des uns et des autres.
Quelle a été votre réaction à l’annonce de la construction du mur de barbelés ?
J’étais complètement choqué. On parle de gens qui ont fui un conflit, une réelle menace, la torture, on parle d’enfants, de nourrissons. La politique qui consiste à les stopper avec des barbelés va à l’encontre des droits humains. Et au-delà de cette considération idéologique, cette barrière ne résout absolument rien, elle n’a aucun effet. Ça peut peut-être causer quelques difficultés supplémentaires lors de la traversée, mais il est possible de la contourner par la Roumanie, ça va simplement déplacer le problème.