INTERVIEWVIDEO. Démission de Tsipras: «Avec ce timing, il peut espérer ratisser large lors des élections»

VIDEO. Démission de Tsipras: «Avec ce timing, il peut espérer ratisser large lors des élections»

INTERVIEWLe sociologue Michel Vakaloulis décrypte l'annonce du Premier ministre grec...
Alexis Tsipras face au président de la République grecque, Prokopis Pavlopoulos, à Athènes, le 20 août 2015.
Alexis Tsipras face au président de la République grecque, Prokopis Pavlopoulos, à Athènes, le 20 août 2015. - Petros Giannakouris/AP/SIPA
Nicolas Beunaiche

Propos recueillis par Nicolas Beunaiche

Alexis Tsipras a décidé d’appuyer sur le bouton de son siège éjectable. Ce jeudi soir, le Premier ministre grec a annoncé sa démission de son fauteuil de Premier ministre et appelé les électeurs aux urnes dans un délai d’un mois. Un nouveau rebondissement dans la vie politique grecque qui intrigue. Comment l’analyser ? Eléments de réponse avec Michel Vakaloulis, enseignant chercheur en sociologie politique à Paris 8.



La démission d’Alexis Tsipras est-elle une surprise ?

Absolument pas. La tenue d’élections législatives anticipées était déjà dans l’air. L’annonce de Tsipras est la conséquence d’un changement de la donne en Grèce depuis son arrivée au pouvoir, en janvier. L’accord avec les créanciers du pays le 13 juillet a suscité un clivage au sein même de Syriza -un tiers des députés du parti n’ont pas approuvé ce texte il y a quelques jours-, mais il a également eu un impact énorme dans la population. Dans l’imaginaire politique, Syriza devait emprunter une autre voie. Or, plus de six mois plus tard, une partie des Grecs qui l’ont soutenu ont l’impression d’un revirement significatif, d’une capitulation. On ne peut pas parler de trahison, mais au moins d’une phase de dépression collective. Pour Tsipras, il était temps de relégitimer la représentation politique.

Comment analysez-vous le timing de l’annonce ?

La précipitation de Tsipras me surprend un peu. Son annonce intervient alors que les vacances ne sont pas terminées… Je pense que deux facteurs l’ont influencé. D’abord, l’essentiel des mesures d’austérité devrait se faire ressentir à la fin septembre seulement. En appelant les électeurs aux urnes avant cette échéance, Tsipras peut donc espérer minimiser leur impact sur le vote. Ensuite, il peut profiter du manque d’organisation de ses opposants au sein de Syriza. Ces derniers forment pour l’instant une composante, pas un parti. Un congrès devait justement se tenir en septembre… On peut penser qu’il n’aura pas lieu. Tsipras, lui, peut espérer ratisser large.

Peut-il sortir gagnant de ce pari ?

Il n’aura pas la majorité absolue. Syriza peut espérer rester le premier parti de Grèce, mais il devra sans doute nouer des alliances classiques avec la droite ou avec les socialistes, ou bien des alliances composites avec différentes forces selon leurs intérêts ponctuels. Le scrutin pourrait toutefois aussi voir l’essor de la Plateforme de gauche derrière Panagiotis Lafazanis, qui souhaite une sortie de la zone euro et un retour à la drachme. Il pourrait également voir un retour en force des néonazis d’Aube dorée, qui pourrait bien absorber une partie de la radicalité dans la société.