Bagdad fait appel aux milices chiites pour reprendre Ramadi aux jihadistes
L'armée irakienne tentait lundi avec les milices chiites de préparer une contre-attaque pour reprendre au groupe jihadiste Etat islamique (EI) la ville clé de Ramadi, dont la perte a constitué un revers d'envergure pour le pouvoir.© 2015 AFP
L'armée irakienne tentait lundi avec les milices chiites de préparer une contre-attaque pour reprendre au groupe jihadiste Etat islamique (EI) la ville clé de Ramadi, dont la perte a constitué un revers d'envergure pour le pouvoir.
Des véhicules de miliciens chiites convergeaient vers la capitale de la province occidentale d'Al-Anbar, à majorité sunnite, où les forces gouvernementales sont à la peine face aux jihadistes.
Dimanche, les troupes ont déserté leurs dernières positions à Ramadi, située à une centaine de km de Bagdad, après la progression des jihadistes dans la ville prise au bout de trois jours d'une nouvelle offensive.
Pour Bagdad, la perte du chef-lieu de la plus grande province du pays est le revers le plus important depuis le début de l'offensive lancée fin 2014 pour reconquérir les larges pans de territoires irakiens conquis par l'EI.
L'issue des combats démontre la capacité du mouvement ultraradical sunnite à mener bataille sur plusieurs fronts, que ce soit en Irak ou en Syrie, où il a lancé le 13 mai une offensive pour prendre la cité antique de Palmyre (centre).
Le Premier ministre irakien Haider al-Abadi, les Etats-Unis et les chefs locaux d'Al-Anbar s'étaient montrés jusqu'à présent réticents à déployer des milices chiites, dont certaines sont soutenues par l'Iran, par crainte de s'aliéner la population majoritairement sunnite d'Al-Anbar.
Pour les chefs des milices chiites, la perte de Ramadi démontre que le gouvernement ne pouvait se passer des «Unités de mobilisation populaires», ces groupes de combattants volontaires.
Hadi al-Ameri, chef du groupe paramilitaire chiite Badr, «tient pour responsables les représentants d'Al-Anbar de la chute de Ramadi car ils ont contesté la participation des Unités de mobilisation à la défense de leur propre peuple», a indiqué la télévision de Badr, Al-Ghadeer.
- Raids de la coalition -
Plusieurs milices dont celles des Kataëb Hezbollah et Asaïb Ahl al-Haq ont annoncé avoir des unités dans Al-Anbar, notamment à Fallouja et Habbaniyah, prêtes à se rendre à Ramadi.
«Demain, si Dieu le veut, des renforts vont rejoindre Ramadi et le début des opérations pour nettoyer la zone conquise par Daech (un acronyme en arabe de l'EI) sera annoncé», a déclaré Jaafar al-Husseini, porte-parole de Kataëb Hezbollah.
M. Ameri se trouvait lundi à Habbaniyah pour coordonner les opérations militaires. Avec le nombre très important et l'expérience des membres de ces groupes paramilitaires, une contre-offensive semble possible avant que l'EI n'ait le temps de fortifier ses positions.
Les «Unités de mobilisation populaires» avaient joué un rôle crucial dans la reprise le 31 mars par l'armée de la ville de Tikrit, au nord de Bagdad, mais les analystes ont toujours averti que la province d'Al-Anbar serait une tâche plus ardue.
Les combats pour la prise de Ramadi ont fait au moins 500 morts -civils et soldats- selon des responsables, et dimanche les jihadistes ont hissé le drapeau noir de l'EI sur les principaux bâtiments publics.
Environ 24.000 personnes ont fui la ville, d'après l'Organisation internationale des migrations (OIM).
Pour le Pentagone, «si [Ramadi] est perdue, cela signifie seulement que la coalition devra soutenir les forces irakiennes lors de la reconquête».
La coalition internationale menée par les Etats-Unis a annoncé avoir lancé ces dernières 48 heures 15 frappes contre les positions de l'EI dans la région de Ramadi.
- 'Les gens ont peur' -
L'EI a diffusé lundi une vidéo montrant les célébrations de la conquête de Ramadi à Mossoul, deuxième ville du pays et prise en juin 2014 par les jihadistes.
Le groupe extrémiste sunnite, fort de dizaines de milliers d'hommes, occupe en Irak et en Syrie voisine de larges pans de territoire sur lesquels il a proclamé un «califat».
Dans le centre de la Syrie, pays en guerre depuis plus de quatre ans, l'EI s'est emparé de deux champs gaziers près de l'antique de Palmyre, où au moins cinq civils dont deux enfants ont été tués par des obus, a rapporté une ONG.
Les jihadistes se trouvent désormais autour de la ville et sont à un kilomètre des ruines de ce site inscrit au patrimoine mondial de l'Humanité. A la périphérie de Palmyre, les violents combats se sont poursuivis entre les troupes du régime et l'EI, qui tente de capturer cette cité de plus de 2.000 ans située dans la province de Homs, limitrophe de l'Irak.
Dans la ville, «chacun est cloîtré chez soi», a affirmé au téléphone à l'AFP Khalil al-Hariri, directeur du musée, présent sur place. «Les gens ont peur de sortir».