Canada: Omar Khadr, emprisonné à 15 ans à Guantanamo, a retrouvé la liberté
Le Canadien Omar Khadr a retrouvé jeudi la liberté après 13 ans d'emprisonnement, dont 10 dans l'enfer de Guantanamo, grâce à son avocat qui s'est battu sans relâche jusqu'à la Cour suprême des Etats-Unis.© 2015 AFP
Le Canadien Omar Khadr a retrouvé jeudi la liberté après 13 ans d'emprisonnement, dont 10 dans l'enfer de Guantanamo, grâce à son avocat qui s'est battu sans relâche jusqu'à la Cour suprême des Etats-Unis.
La cour d'appel d'Edmonton (Alberta, ouest) a ordonné la libération conditionnelle du jeune homme capturé en 2002 à l'âge de 15 ans en Afghanistan et emprisonné depuis, en dépit de l'opposition acharnée du gouvernement conservateur à sa remise en liberté.
«Je suis heureux, incroyablement heureux, cela a pris tellement d'années pour en arriver là», a lâché son avocat Dennis Edney, à la sortie du tribunal.
«On a réussi», avait glissé l'avocat à son client juste après la décision de la remise en liberté. «Il n'a rien dit» car il était entouré par des gardes, mais il a «esquissé un sourire», a-t-il raconté.
Dès sa capture en Afghanistan, Omar Khadr avait été transféré à la prison américaine de Guantanamo, à Cuba. C'est là qu'il avait été condamné en 2010 à huit ans de prison pour avoir jeté une grenade sur les forces armées américaines en Afghanistan, tuant un sergent.
Transféré en 2012 dans une prison de haute sécurité au Canada, il était éligible à une libération conditionnelle en juin mais depuis plusieurs années son avocat se battait pour faire reconnaître son statut de mineur au moment des faits.
Omar Khadr est né à Toronto. Son père était un membre influent d'Al-Qaïda tué en octobre 2003 au cours d'un accrochage avec les forces armées pakistanaises.
«C'est un beau jour pour la justice», s'est réjoui Dennis Edney qui va faire office de père adoptif. L'avocat va héberger et financer les études de ce jeune homme «jeté dans l'enfer de Guantanamo à 15 ans, qui n'est jamais sorti depuis et qui n'a jamais respiré l'air pur ou l'odeur des arbres».
- «Harper est un bigot» -
«Ma femme a préparé la maison depuis des semaines, elle est allée lui acheter des vêtements et elle en a volé quelques-uns à mon fils qui est en Asie», s'est amusé l'avocat en invitant les journalistes pour un café vendredi quand Omar Khadr s'exprimera publiquement pour la première fois.
Plus sérieusement, Dennis Edney s'est livré à une vive critique du gouvernement conservateur de Stephen Harper qu'il accuse d'avoir avec acharnement abandonné un enfant canadien.
«Nous avons laissé tomber un enfant, un enfant canadien soumis à la torture à Guantanamo. Nous n'avons pas seulement abandonné un enfant à la torture mais nous, Canadiens, nous avons participé à cette torture».
L'avocat a ensuite demandé à M. Harper de simplement se poser la question quand il met ses enfants au lit: «aimeriez-vous que vos enfants soient abusés comme l'a été Omar Khadr»?
«M. Harper est un bigot, M. Harper n'aime pas les musulmans», a lancé cet avocat entêté, écossais d'origine.
Pour sa libération conditionnelle, Omar Khadr doit verser une caution de 5.000 dollars, soit nettement moins que les 100.000 réclamés par le gouvernement. Il devra également porter en permanence un bracelet électronique, un couvre-feu lui est imposé, et ses déplacements sont circonscrits à la province d'Alberta où réside son avocat.
Le gouvernement canadien a regretté cette remise en liberté pour ce qu'il appelle «un terroriste».
«La décision rendue aujourd’hui nous déçoit, et nous regrettons qu’un terroriste reconnu coupable puisse réintégrer la société canadienne sans avoir purgé toute sa peine», a déploré le ministère de la Sécurité publique.