Argentine: Qui sont les protagonistes de l’affaire Nisman ?
Justice•L'enquête sur la mort du procureur argentin Alberto Nisman ébranle les hautes sphères du pouvoir argentin...L. Cometti
Le successeur du procureur Alberto Nisman, mort dans de mystérieuses circonstances le 18 janvier, a requis vendredi l’inculpation de la présidente argentine. Il accuse Cristina Kirchner d’avoir entravé l’enquête sur un attentat perpétré contre une mutuelle juive en 1994, afin de préserver des accords commerciaux.
Alors que l’enquête sur le décès de Nisman se poursuit, 20 Minutes fait le point sur les rôles des principaux protagonistes de cette affaire.
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Alberto Nisman, une mort mystérieuse
Tout commence avec la mort suspecte d’Alberto Nisman. Le soir du 18 janvier, le procureur est découvert mort dans la salle de bains de son domicile, à Buenos Aires, une balle dans la tête et un pistolet à ses côtés. Le 19 janvier, à 15h, il devait présenter au Parlement des preuves que la chef de l’Etat avait tenté de blanchir les inculpés iraniens impliqués dans l’attentat de l’Amia. En 1994, une attaque à la voiture piégée visant les locaux de l’Association mutuelle israélite argentine (Amia) avait fait 85 morts et 230 blessés.
Alberto Nisman enquêtait depuis dix ans sur cette affaire. Il était convaincu que l'Iran avait commandité des hommes du groupe armé chiite libanais Hezbollah pour mener l’attentat contre la mutuelle juive. Le 14 janvier, le procureur avait accusé la présidente Cristina Kirchner d’avoir tenté de soustraire des suspects iraniens à la justice, afin de préserver les relations commerciales entre les deux pays. Ce sont les preuves de cette accusation qu’il devait présenter aux députés argentins le 19 janvier.
Cristina Kirchner, le pouvoir fragilisé
Dans un premier temps, la chef de l’Etat s’est risqué à défendre la thèse du suicide de Nisman sur Facebook, avant de soutenir la piste de l’assassinat, sur le même réseau social. «Le suicide (j’en suis convaincue) n’en est pas un», écrit-elle. La présidente est coutumière de ces réactions spontanées et hâtives sur les réseaux sociaux.
Huit jours après le décès de Nisman, Cristina Kirchner a pris la décision de dissoudre la Secretaria de Inteligencia (SI), les services secrets argentins, dont elle accuse un secteur d'avoir précipité la mort de Nisman pour porter préjudice au gouvernement.
Quelle que soit la direction prise par l’enquête sur la mort de Nisman, Cristina Kirchner et son parti sont fragilisés par cette affaire qui vient s’ajouter aux accusations de corruption, à quelques mois de l’élection présidentielle d’octobre, dans un contexte économique médiocre. Son image est fortement ternie dans l’opinion publique qui ne croit pas à la thèse du suicide et qui a exprimé son ras-le-bol face à l’impunité judiciaire.
Rappelons que Cristina Kirchner, directement accusée par le procureur Nisman, a qualifié son dossier d’accusation de «château de cartes», qui n'aurait pas tardé à s'effondrer.
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Viviana Fein, chargée d’élucider la mort de Nisman
La procureure a la lourde charge d’enquêter sur la mort d’Alberto Nisman. Trois scénarios sont envisagés: l’assassinat - sur ordre du pouvoir ou commandité par des services secrets -, le suicide avec intervention d’un tiers, et le suicide. Début février, Viviana Fein a dévoilé les résultats d’une expertise qui établit qu’Alberto Nisman n’avait aucune trace de poudre sur les doigts. Une contre-expertise doit être menée.
Viviana Fein a démenti une information publiée dans quotidien Clarin, selon laquelle Alberto Nisman envisageait de demander la détention de la présidente, avant de reconnaître qu’un document confirmant cette hypothèse avait été trouvé au domicile du procureur. De quoi ajouter à la confusion générale.
Jaime Stiusso, le grand absent
Ancien chef opérationnel des services secrets argentins, Jaime Stiusso a été convoqué par la justice dans le cadre de l’enquête sur la mort de Nisman. Selon une source proche de l'enquête, il serait la dernière personne à avoir parlé avec le procureur, le jour de sa mort. Mais l’espion reste introuvable.
Jaime Stiusso était responsable de l’enquête sur l’attentat de l’Amia au sein des services secrets. Il avait collaboré avec Nisman, qu’il avait rencontré en 2004 grâce à l’ancien président argentin, Néstor Kirchner, feu le mari de la présidente. Le dossier instruit par Nisman et l’accusation contre Cristina Kirchner repose essentiellement sur des écoutes téléphoniques menées par les services de renseignements.
En poste depuis 1972, Jaime Stiusso a travaillé aux services secrets pendant les sombres années de la dictature, puis lorsque l’Argentine a pris le chemin de la démocratie, avant d’être écarté fin 2014. Le rôle obscur des services secrets est vivement décrié de manière générale.
Gerardo Pollicita, dans les pas de Nisman
Le procureur, chargé de reprendre l’enquête de Nisman sur l’attentat de l’Amia, a requis vendredi l'inculpation de Cristina Kirchner et de son ministre des Affaires étrangères, Hector Timerman, pour «les délits d'entrave à la justice et manquement au devoir d'un fonctionnaire». Il se positionne ainsi dans la lignée du travail d’Alberto Nisman.
Le juge Daniel Rafecas va désormais examiner le dossier de 290 pages ainsi que de nombreuses écoutes téléphoniques, avant de décider s'il ouvre ou non une procédure judiciaire contre Cristina Kirchner.
Carlos Menem, l’ancien président en attente de procès
Cristina Kirchner n'est pas la première à être accusée d'obstruction dans l’affaire de l’attentat de l’Amia. L’ancien président Carlos Menem, qui a dirigé le pays de 1989 à 1999, a lui aussi été mis en cause pour «dissimulation aggravée» et il est soupçonné d’avoir couvert des responsables présumés de l’attentat. Cela fait trois ans qu’une date doit être fixée pour son procès.