Arabie Saoudite: la flagellation d'un blogueur reportée
Les autorités saoudiennes ont reporté la flagellation du blogueur ...© 2015 AFP
Les autorités saoudiennes ont reporté la flagellation du blogueur Raef Badaoui, qui s'était vu infliger la semaine dernière une première série des 1.000 coups de fouet auxquels il a été condamné pour insulte à l'islam, au grand dam des défenseurs des droits de l'Homme.
Prévue ce vendredi, la flagellation de Raef Badaoui a été reportée, probablement d'une semaine, car les plaies des premiers coups de fouets n'ont pas suffisamment cicatrisé, selon son épouse et Amnesty International.
M. Badaoui, 31 ans, a été condamné en novembre à dix ans de prison, une amende de 1.000 riyals (266.000 USD) et 1.000 coups de fouet répartis sur 20 semaines pour «insulte à l'islam».
Il s'est vu infliger le 9 janvier devant une mosquée de Jeddah (ouest) les 50 premiers coups de fouet, déclenchant un tollé international, et devait en recevoir 50 autres ce vendredi.
Mais selon Amnesty International, «le médecin avait conclu que les blessures n'avaient pas encore cicatrisé correctement et que (le militant) ne serait pas capable de supporter une autre séance de coups de fouet».
L'épouse du blogueur, Ensaf Haidar, a indiqué à l'AFP avoir appris vendredi que le cas de Raef Badaoui avait été «renvoyé par le Tribunal royal à la Cour suprême il y a presque un mois», ce qui pourrait ouvrir la voie à un appel.
- 'Inhumanité scandaleuse' -
Les prochains coups de fouet auront «probablement lieu vendredi» 23 janvier, a ajouté l'épouse du blogueur jointe par téléphone au Canada où elle a trouvé refuge avec ses trois enfants. Elle a exhorté «le monde entier (...) à mettre la pression sur l'Arabie saoudite pour qu'elle libère Raef».
Amnesty International a de nouveau dénoncé une peine d'une «inhumanité scandaleuse», tandis que Reporters sans frontières a demandé «l’abandon pur et simple de cette sentence barbare», craignant que M. Badaoui ne survive pas aux coups.
Emprisonné depuis 2012, Raef Badaoui était l'animateur du site internet Liberal Saudi Network et a été le lauréat en 2014 du prix Reporters sans frontières (RSF) pour la liberté de la presse.
Les autorités ont fermé ce site. Une femme qui militait pour les droits de l'Homme aux côtés de M. Badaoui, Souad Chammari, avait indiqué lors de sa condamnation que le site avait «critiqué la police religieuse».
Mme Haidar a déclaré à l'AFP que le procès était centré sur des déclarations qu'il avait faites à France 24 en décembre 2010. «Un athée a le droit de dire ce qu'il veut (...) et personne n'a le droit de lui réclamer des comptes pour ses opinions», avait-il dit à la chaîne basée à Paris.
- Condamnations internationales -
A l'époque, M. Badaoui avait indiqué que son site «avait mis en colère les radicaux en Arabie parce qu'il exposait leurs actions, tout particulièrement ceux de la Commission de la promotion de la vertu et de la prévention du vice», la police religieuse.
Il avait également dit avoir dû se cacher après avoir reçu des menaces, notamment de mort.
Jeudi, le Haut Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, Zeid Ra'ad Al Hussein, avait exhorté le roi Abdallah d'Arabie saoudite à gracier le blogueur, soulignant que la flagellation «est interdite par la législation internationale».
Cette peine a été jugée «inacceptable» par l'Union européenne, et les Etats-Unis ont évoqué une «punition inhumaine» et appelé les autorités à l'annuler.
L'Arabie saoudite, berceau du wahhabisme (version rigoriste de l'islam), est un royaume ultraconservateur. Toute critique de la dynastie des Al-Saoud, des institutions religieuses et de l'islam est passible de poursuites judiciaires.
Le royaume est par ailleurs régulièrement épinglé par les ONG de défense des droits de l'Homme pour ses exécutions. Pas moins de 10 personnes ont déjà été exécutées depuis le début de l'année.