Dans le Triangle d'Or, lutte sans fin contre le trafic de drogue

Dans le Triangle d'Or, lutte sans fin contre le trafic de drogue

Au coeur du Triangle d'Or, un bateau de la police thaïlandaise surmonté d'une mitrailleuse patrouille sur le fleuve Mékong. Après avoir longtemps traqué l'opium et l'héroïne, les autorités cherchent aussi désormais les méthamphétamines.
© 2013 AFP

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Au coeur du Triangle d'Or, un bateau de la police thaïlandaise surmonté d'une mitrailleuse patrouille sur le fleuve Mékong. Après avoir longtemps traqué l'opium et l'héroïne, les autorités cherchent aussi désormais les méthamphétamines.



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Dans cette région chargée de mythes, aux confins de la Thaïlande, du Laos et de la Birmanie, les produits changent mais les trafics demeurent.

«Il est vraiment difficile d'empêcher le trafic de drogue vers la Thaïlande. Mais nous essayons par tous les moyens», promet le général Manop Senakun, commandant de la police de Chiang Saen, porte thaïlandaise du Triangle d'Or.

Le Centre contre le crime sur le Mékong -- 30 policiers et trois bateaux en lien avec les pays voisins -- contrôle la navigation sur 17 km de frontière fluviale entre Thaïlande et Laos. Une unité créée après la mort fin 2011 de 13 marins chinois dans une attaque, au terme de laquelle plus de 900.000 cachets ont été saisis.

Depuis, Naw Kham, parrain birman de la drogue, et trois de ses acolytes, ont été exécutés en Chine pour cette tuerie. Et les deux navires aux impacts de balles encore visibles rouillent dans le port de Chiang Saen.

De fait, le fleuve est moins emprunté par les trafiquants qu'auparavant, assure le général Manop. La plupart du trafic se fait «par les terres hautes, le long de la frontière», admet-il.

La Chine s'est jointe à cette surveillance accrue du fleuve, qui fait officiellement l'unanimité. «Les crimes liés à la drogue sur le Mékong ont été placés sous contrôle», a estimé l'ambassade de Chine en Birmanie à l'issue d'une opération conjointe de deux mois sur le fleuve avec ses voisins, qui vient de s'achever.

L'opération «Mékong sûr» a permis l'arrestation de 2.534 suspects et la saisie de près de 10 tonnes de drogue, selon les autorités thaïlandaises.

«Je ne suis pas convaincu», tempère pourtant Pierre-Arnaud Chouvy, géographe au CNRS. «On a bien quelques cas de saisies très médiatisés, mais a priori pas d’évaluation de l’efficacité des patrouilles».

En outre, il existe «peu de grands réseaux, organisés de la production à la vente au détail», souligne-t-il, décrivant des filières «à géométrie variable, avec beaucoup d’intermédiaires et notamment nombre de petits trafiquants non professionnels qui profitent des opportunités».

Le tout sur fond de corruption des officiers sur le terrain, qui «reste un problème en Thaïlande, où certains responsables sont sujets aux pots-de-vin», selon le Département d'Etat américain.

A chaque coin de rue

Paradorn Pattanatabut, patron du Conseil de sécurité nationale, l'admet lui-même en filigrane: «je ne le nie pas», lâche-t-il à l'AFP. En promettant que les coupables seront punis.

L'Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC) estime à un minimum de 1,4 milliard le nombre de pilules de yaba, nom thaïlandais des méthamphétamines, fabriquées chaque année dans la région. La plupart vient de petits laboratoires mobiles et isolés au coeur de la jungle de l'Etat Shan, dans l'est birman.

Une marchandise estimée à 8,5 milliards de dollars, à laquelle il faut ajouter l'héroïne, en provenance aussi de Birmanie, deuxième producteur mondial d'opium derrière l'Afghanistan.

L'opium et l’héroïne qui ont fait la renommée de la région, premier producteur mondial il y a trente ans, avaient cédé la place aux méthamphétamines aux débuts des années 2000, à la faveur de politiques d'éradication du pavot.

Mais «depuis 2006, la culture de l'opium a repris et augmente sur six années consécutives», note Tun Nay Soe, de l'ONUDC à Bangkok, décrivant des «niveaux alarmants» pour les opiacés comme pour les méthamphétamines. Le Triangle d'Or «demeure à l'épicentre du trafic et de la production».

Du coup, les trafiquants sont plus menaçants, s'inquiète le général Manop, évoquant des «caravanes de 20 à 30 personnes» en armes à travers la jungle. Et les accrochages sont réguliers, comme lorsque huit trafiquants présumés ont été abattus par les forces de l'ordre, en 2012.

Mais du point de vue des consommateurs thaïlandais, rien ne change.

«Je suis à Klongtoey depuis longtemps et je n'ai jamais vu le problème diminuer», constate Nisanart Trirat, assistante sociale d'un centre de santé de ce bidonville de Bangkok, confirmant que les méthamphétamines ont remplacé l'héroïne et rendu quasi caducs les traitements à la méthadone.

Ici, pilules et poudre sont en vente à chaque coin de rue. «Des enfants me demandent +frère, qu'est-ce que tu veux?+», raconte Joon, 35 ans, qui dit n'avoir plus rien pris depuis sa sortie de prison, où il passé quelques années pour meurtre.

Colle, valium, marijuana, yaba, Ice, héroïne... il a touché à tout depuis ses dix ans. Mais malade du sida, il veut décrocher. «C'est ma dernière chance de faire plaisir à ma mère avant de mourir».

Cet article est réalisé par Journal du Net et hébergé par 20 Minutes.