Quatre spécialités françaises retoquées par des chefs japonais
TENDANCE•Experts gastronomiques, François Simon et Ryoko Sekiguchi publient un beau livre de cuisine sur ces nouveaux chefs japonais qui ravivent la flamme de nos marmites tricolores...Stéphane Leblanc
La Nippone touch est dans l'assiette. De plus en plus de jeunes chefs japonais ouvrent des restaurants français dans l'Hexagone et on ne compte plus les talentueux qui décrochent des étoiles au Guide Michelin.
Les protagonistes du livre 12 chefs japonais cuisinent en France (Ed. Chêne) ont en commun d'avoir fait leurs classes ici et d'exceller à revisiter nos plats traditionnels à la lueur du soleil levant. Tous mêlent «tendresse et impertinence loin de la doxa environnante», s'enthousiasme l'auteur, le critique gastronomique François Simon, qui signe ce livre avec Ryoko Sekiguchi. 20 Minutes a suivi les recettes de quatre d'entre eux pour établir son menu de fête.
L'entrée la plus iodée: les huîtres du Breizh Café
Au Japon, on fait souvent griller les huîtres dans leur coquille au barbecue. Au Breizh Café de Cancale, en Bretagne, Fumio Kudaka dépose délicatement quelques tranches de chou-fleur et du daikon marinés dans du ponzu sur les huîtres plates de Cancale (à g.). Une gelée de pomme et de citron au vinaigre de cidre enveloppe les huîtres creuses et charnues Tsarskaya (au c.). Et un chutney de tomates, un pistou de ciboule et de sarrasin, et quelques champignons enokis domptent les huîtres sauvages de la Baie du Mont-Saint-Michel (à dr.).
Mêmes touches japonaises sur ses coquilles Saint Jacques marinées avec du thé en poudre ou grillées et servies avec une sauce à la prune. Sur son turbot poêlé au yuzu kosho ou accompagné d'une crème de céleri-rave au wasabi...
Le poisson le plus ébouriffant: le bar aux agrumes de Kei
«Son credo est aussi méthodique qu'inspiré», note le critique gastronomique François Simon en parlant de Kei Kobayashi, chef du restaurant Kei, et de sa «palette créative riche et variée de compositions subtiles». Connu des chasseurs d'images pour ses salades de légumes croquants aux allures de compositions florales, ce jeune chef étonnera le plus endurci des gourmets avec un plat de poisson détonnant, où le pavé de bar est cuit avec force délicatesse pour que ses écailles se redressent et que la peau croustille sous la dent.
Sa recette: faites chauffer vivement de l'huile d'olive dans une poêle, (bien) saler les pavés de bar (de 90g). Saisissez-les, côté peau, contre la poêle et laissez cuire jusqu'à ce que la chair devienne légèrement blanche, translucide. Retournez les pavés dans la poêle et débarrassez-les sur du papier absorbant. Toute la difficulté, c'est de maîtriser le feu pour ne pas brûler la peau, qu'elle gonfle au contraire et devienne croustillante.
Le bar aux agrumes de Kei Kobayashi (Kei) - P;VAURES SANTAMARIA/CHÊNE
Le plat de viande le plus simple: la selle d'agneau de lait rôtie d'Abri
«Pourquoi ne ferais-tu pas de la cuisine française?» lui suggéra un jour son professeur de sport, après qu'une vilaine blessure éloigne Katsuaki Okiyama des pistes d'athlétisme. Pourquoi pas en effet? Celle qu'il sert chez Abri est simple et accessible, sans homard ni foie gras, mais pleine de soupes de légumes et de viandes à peines saisies afin de «servir aux Français ce qu'ils aiment bien manger».
Son truc pour cuire la selle d'agneau (300g pour 4 personnes), c'est de l'emballer dans du papier d'aluminium et de la passer 30 minutes au four à 180°C. Pendant ce temps, faites cuire dans du beurre demi-sel des racines de persil coupées en deux. Puis servez avec une purée de pommes de terre cuites à l'eau (300g), assez liquide et légère parce que vous n'aurez incorporé que du lait (100g).
Le dessert le plus doux: le blanc-manger sauce Earl Grey de Es
«Le Japon reste plus renfermé alors qu'ici [en France], on accepte tous le monde et notamment les idées.» Takayuki Honjo est assurément le plus français des cuisiniers de cette sélection. Le chef du restaurant Es écoute les saisons et préfère délaisser les produits japonais pour ceux qu'il trouve au marché.
Pour son blanc-manger (deux personnes), portez 10cl de crème liquide, 5cl de lait et 25g de sucre à ébullition. Laissez infuser un petit quart d'heure. Filtrez alors le lait infusé et ajoutez la gélatine préalablement ramollie dans un bol d'eau, puis 25g de jus et une pincée de zeste de citron. Laissez refroidir. Pour la sauce Earl Grey, plongez une bonne pincée de thé dans 100g d'eau froide, laissez macérer pendant trois heures pour parfumer l'eau. Ajoutez 7g de sucre en poudre et filtrez.