Fashion Week: Agnès B.: «Mon métier, c’est de raconter des histoires»

Fashion Week: Agnès B.: «Mon métier, c’est de raconter des histoires»

MODE – Rencontre avec la créatrice qui a présenté ce mardi une collection printemps-été 2014 et un défilé jubilatoires…
Anne Demoulin

Anne Demoulin

Agnès B. entrelace les univers, comme les fils. Dans son film Je m'appelle hmmm, la créatrice-réalisatrice croisait les itinéraires de Céline, une gamine victime d’inceste et celle d’un routier britannique. Lolita en minishort, Parisienne avec son béret, égérie des années 1970… A travers sa collection printemps-été 2014, Agnès B. raconte aussi des histoires. La couturière s’amuse avec sa galerie de personnages dans un défilé jubilatoire où même les mannequins sourient.

Vous vous amusez beaucoup dans cette collection printemps-été 2014…

Je m’amuse toujours, et plus l’été que l’hiver. Si je ne m’amusais pas, j’aurai du mal à faire mon travail. J’adore le faire car on a préparé cette collection dans la bonne humeur, avec très peu de stress. Je suis quelqu’un de serein par nature. Quand je m’énerve, c’est que cela vaut la peine, comme ma grand-mère

Vous avez montré dans ce défilé toute une série de personnages: la Lolita, la Parisienne…

Oui, je me raconte beaucoup d’histoires. Vous savez: «On dirait qu’on serait…», c’est ça mon travail. «On dirait qu’on serait à l’aéroport et qu’on serait habillés comme cela et qu’on attendrait son mec qui arriverait ou pas…» J’ai commencé à faire des films de mode en racontant des histoires. Mon métier, c’est toujours de raconter des histoires.

Où avez-vous trouvé l’inspiration pour les histoires de cette collection?

Ça vient tout seul, d’une certaine manière. Mais aussi par les matières, les tissus que je fais fabriquer. Les tissus sont exclusifs. Ces tweeds gris de printemps que j’adore, comme sur le manteau avec le nœud porté avec petit chapon rond, je trouvais ça très joli… On l’a eu hier soir ce manteau, je l’ai dessiné il y a une semaine. J’ai eu envie de ce manteau dans ce tissu, alors on l’a fait. Et puis l’atelier est formidable. Sans mon équipe, je ne serais rien. Tout le monde est formidable autour de moi. Ils se donnent un mal fou et ne comptent pas leurs heures. C’est ça aussi l’histoire d’une collection: celle d’un travail d’équipe.

La dernière histoire du défilé est africaine?

J’ai voulu faire un hommage à la beauté de l’Afrique. Aux coiffes de J. D. 'Okhai Ojeikere, ce photographe que je représente depuis longtemps, qui a été montré à la Biennale de Venise cette année dans une salle magnifique. Nous avons trouvé une dame qui a fait ces coiffes cette nuit, pour montrer la noblesse de l’Afrique. Le tissu utilisé vient d’Afrique du sud. J’ai voulu changer des dessins africains que j’utilise déjà depuis longtemps. J’aime beaucoup ces tissus. Certains, je les trouve à Barbès. D’ailleurs, il faut aller à Barbès, c’est passionnant, c’est beau le mix des cultures à Paris. Il y a une richesse ethnique extraordinaire à Belleville, à Barbès, dans le 10e où nous sommes installés. On n’en parle pas assez, on parle des immigrés comme des envahisseurs, alors qu’ils nous enrichissent. Les Noirs et Arabes se sont battus pour nous pendant les guerres. Moi, je suis islamophile!