Le possible rapprochement de Canal+ et BeIN Sports en quatre questions
MEDIAS•Le groupe Vivendi a confirmé vouloir se rapprocher de la chaîne sportive qatarie, BeIN Sports…C.W.
Les rumeurs couraient depuis quelques semaines, Vivendi l’a confirmé ce jeudi matin. Comme l’a annoncé Libération, il y a bel et bien discussions concernant un éventuel rapprochement entre Canal + et BeIN Sports. Si la forme du deal demeure encore floue, ces accords, voire cette fusion, posent déjà quelques questions.
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Quel est l’intérêt de Vivendi de se rapprocher de BeIN Sport ?
Depuis l’arrivée de Vincent Bolloré à la tête du groupe Vivendi, les relations se sont nettement détendues entre les deux concurrents Canal + et BeIN Sports. A tel point que le premier oscille vers le second. La raison ? Depuis près d’un an, les abonnés ne cessent de déserter la chaîne cryptée, 88.000 environ comme le précise Libération. Des pertes dues à la rude concurrence de Netflix coté ciné, et de BeIN côté sport, mais aussi d’Altice, le propriétaire de l’opérateur SFR-Numericable, qui a raflé le championnat anglais de football fin novembre.
Comme le rappelle Philippe Bailly, analyste médias et fondateur de l’agence médias NPA Conseil, « le sport, un contenu extrêmement spectaculaire, est une pépite pour les chaînes payantes. Il suscite une envie suffisamment forte pour être un motivateur d’abonnements, et est en l’occurrence l’un des piliers fondateurs de Canal ». Grâce à BeIN, la chaîne récupérerait le championnat de football français et la Ligue des champions, mais aussi le basket américain ou le tournoi de tennis de Wimbledon.
Pourquoi le Qatar serait-il tenté par ce deal ?
Si les enjeux se précisent côté français, le Qatar n’est pas en reste. Pour la filiale de BeIN Media Group (anciennement Al-Jazeera Sport), qui a attiré 2,5 millions d’abonnés en quelques années grâce à un prix relativement bas (13 euros par mois actuellement), ce pourrait être une bonne occasion d’arrêter les frais. Natixis estime les pertes de la filiale française à plus de 250 millions d’euros par an. De plus, son propriétaire, le fonds souverain du Qatar, est durement touché par la chute du prix du baril de pétrole et de ses participations dans plusieurs grands groupes, dont ses 15 % dans le constructeur allemand en difficulté Volkswagen.
Citant une source proche du dossier, Le Monde explique donc que « les deux groupes ont intérêt à un deal ». En décembre, l’offre promotionnelle du groupe français - BeIN Sports gratuit pendant trois mois pour toute souscription à Canalsat ou à Canal + - avait été le premier signe d’une trêve entre les ex-frères ennemis.
Un rapprochement de quel ordre ?
Fusion, accords de diffusion, rachat ? La forme que prendrait le rapprochement entre Canal + et BeIN pose encore de nombreuses questions. A ce jour, deux options sont envisagées. La première consiste en un partenariat de distribution exclusif, auquel cas BeIN Sport serait réservée aux abonnés de Canal + et CanalSat. Selon Libération, BeIN ne consentirait pas à un accord de diffusion exclusive « à moins de 100 millions d’euros », sachant que Canal + paye actuellement 50 millions par an à l’américain Discovery pour l’exclusivité d’Eurosport.
Seconde option, et nettement plus ambitieuse, le rachat. Natixis évalue la valeur de BeIN Sport à 500 millions d’euros (deux fois son chiffre d’affaires), que Vivendi pourrait financer soit en piochant dans sa trésorerie nette (8 milliards d’euros à fin septembre, grâce à la cession de l’opérateur SFR), soit en payant en actions, ce qui permettrait à BeIN de prendre 8 % de Canal +.
Un rapprochement imminent ?
Selon une source du dossier, les deux acteurs se sont donnés jusqu’à « fin février ou début mars » pour conclure un accord, ou non. Selon Libération, Nicolas Sarkozy, proche de Vincent Bolloré et connaisseur du Qatar, suivrait les discussions. Tout comme le président de la République en personne, « qui voit à terme une fusion entre BeIN Sports et Canal + », tel que l’a rapporté Le Parisien. Mais même si les protagonistes s’accordent, une nouvelle embûche pourrait survenir, celle de l’autorité de la concurrence française. Affaire à suivre.